31/ - REGARD SUR LE F.L.N. -

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31/ -  REGARD  SUR  LE  F.L.N.  -

12.6.2012             - REGARD SUR LE FLN -

                              (Algérie 1962-2012)

Partie I -     Les quatre points cardinaux de la doctrine FLN

1 /     L’anti-colonialisme .

Pour le FLN, le colonialisme est une phase historique, humiliante,

condamnable , à combattre d'un mode de production surexploiteur

transplanté en Algérie par l'Etat français à l'époque des guerres

hégémoniques France-Angleterre, sans respect des populations

indigènes structurées depuis des siècles en tribus.

Ce mode de production a été complété par un peuplement intensif

d’émigrés européens qui a façonné et mis en opposition deux classes

sociales essentielles à son expansion : les "capitalistes" (entreprises

et colons européens propriétaires exclusifs des moyens de production

octroyés par l'administration locale) et les ouvriers et paysans indigènes

(ne possédant que leur force de travail, enchaînés de surcroît dans le

statut esclavagiste de l’indigénat). La règle négrière du travail a été

généralisée : produire plus et payer le moins possible, sans respect

de la personne humaine. Entre ces deux classes sociales, les rapports

de force et d'intérêt sont restés foncièrement antagoniques .

L'économie de l'Algérie a été édifiée un siècle durant dans le schéma

d'une agriculture d'exportation enfermée dans des infrastructures

d'occupation militaire.

Dans ces conditions, la lutte anti-colonialiste de cet arrière-pays de

l'économie française a consisté à mobiliser les masses indigènes

par une montée en puissance de la révolte et du sentiment national

(attentats et attaques visant les européens suivis de répression de

l'armée française) sous l'impulsion du FLN et de l'ALN..

En 1954, l'ALN n'était que le bras armé du FLN (financé par l'émigration

et les pays arabes).

En 1962, l'ALN s'est imposée au sommet du fait de la guerre et s’est

emparée des commandes de l’Etat, laissant au FLN le soin de diriger les

administrations centrales et territoriales.

De 1962 à 2012, les blessures de la rivalité de commandement ne

se sont pas complètement cicatrisées et ont ouvert la porte à la

guérilla des clans au sein de l'administration. Pour apaiser le conflit,

le discours du FLN a consisté à exalter l'indépendantisme, le nationalisme

et le socialisme pour ainsi désamorcer et exorciser les dangers du

régionalisme (frontières, Kabylie, Sahara...).

2 /     Le pouvoir étatique

La clé de voûte du règne du FLN a été, depuis la conquête du pouvoir

étatique en 62, la garde du système par l'ANP (héritière d’une ALN

dégarnie de ses cadres, après 62).

Sous ce régime, l'administration a alors formé la tête pensante et le

bras organisateur de la gestion du pays.

L'Etat s'est ainsi arrogé un rôle actif, exclusif et interventionniste dans

la vie économique, plus soucieux d’uniformisation nationale que de lutte

contre les disparités sociales (lutte contre les minorités, les zaouias,

les chefferies, les opposants…).

Le capitalisme d’Etat comme mode de développement dominant a

engendré l’avatar social de la société duale, un cancer social aussi

long que difficile à guérir.

3 /    Le nationalisme économique .

Dans son règne, le FLN a imposé l'industrialisation massive et intensive

du pays à la suite du Plan de Constantine de De Gaulle (1958). A la

faveur du discours socialiste (et des recettes pétrolières) l'économie

administrée s'est érigée sous forme de capitalisme d'Etat (armada des

sociétés nationales) selon le modèle prôné par De Bernis ( industries

industrialisantes) et Perroux ( pôles de développement).

Priorité a été assignée à l'industrie lourde au détriment de l'agriculture

dans un déséquilibre structurel qui a conduit à l'édification d’une société

duale, à la faveur de la dérive sociale .

Fallait-il pour ces choix réduire la parité monétaire fixée à 1dinar pour

1 euro en 1964, à plus de 100 DA pour 1 euro en 2012 ?

La ponction du pouvoir d’achat infligée à la population freine certes la

part importée de la consommation des ménages (dont le financement se

reporte sur les émigrés), mais elle permet aussi de faire obstacles aux

concurrents venus de l’étranger...

Les investisseurs algériens n’auraient-ils pas intérêt à investir

à l’étranger pour maximiser leurs profits et négocier emploi et fiscalité avec

le pays d’accueil ? En situation de crise, où se solidarisent les économies,

la combinaison des paramètres de l’investissement ne permettrait-elle pas

de mieux balancer la structure de la croissance en faveur des populations ?

4/          La restauration culturelle  .

Le FLN a imposé la restauration des valeurs arabo-islamiques en

contrepoint de l'étouffement culturel colonialiste, considérant

légitimement, l'écrasement de l'identité personnelle, l'analphabétisme

des populations et la sous-scolarisation de la jeunesse indigènes.

Dès 1963, il a imposé une marche forcée (mais décousue) vers

l'arabisation totale en s'aidant de ses deux leviers : l'Islam et les pays

arabes.

L'engagement idéologique du FLN a été répété (Congrès de la Soummam,

Charte de Tripoli, Charte d'Alger..), mais aussi à propos de la formation

professionnelle et de l'enseignement général, objectifs qui mettront en

opposition de phase arabisants et francisants. La jeunesse, d’où devait

émerger, après 62, une génération de ‘’bâtisseurs de cathédrales’’ de

l’islam et de la nation, se dit profondément désenchantée .

 

Partie II  -      Le FLN en question

Entre les réformateurs du Parti, qui ne veulent pas être traités de

fossoyeurs du FLN, et les continuateurs, qui ne concèdent aucune

erreur, la difficulté est de prendre un nouveau cap politique afin de

sortir du triangle des Bermudes d'un projet de société imprécis

(l’ordre religieux prime l’ordre civil et social) où toute solution pose

un problème chaque fois plus large à résoudre que celui auquel

répondait la solution (notamment, pas d’arbitrage social entre revenus,

répartition, dépenses).

Voilà pourquoi tant de déclarations et d'analyses contraires et

passionnées obscurcissent les débats à propos du FLN.

Ainsi, par exemple, la première volonté des indépendantistes avait

été d'instruire le peuple et de restaurer la culture arabo-islamique

mise à mal par la colonisation (Cf. textes fondamentaux plus haut).

Or, ce qui est souvent dénoncé, 50 ans après l’indépendance,

c'est l'inculture qui recouvre le pays et la langue de bois qui la

masque .

Les anciens étudiants se souviennent de la brutalité de ce chef

du Parti qui déclarait, ironique, lors de l'inauguration de la Foire

d'Alger :" la Foire c'est l'Algérie, l'Algérie c'est la foire "; ou encore

" l'Algérie était au bord du gouffre, heureusement elle a fait un

bond en avant "…

Le Président de la République s'est lui-même insurgé contre la

dévalorisation des diplômes du primaire au supérieur, diplômes

octroyés sans effort méritoire et dans un culte élitiste de façade

encouragé par de hauts responsables en mal de diplômes obtenant

des titres plus monnayés que mérités pour faire bonne figure

en réunion ou côté Fonction publique (comme pour les attestations

communales des calculs peuvent être faits).

En 1976, un inspecteur d’enseignement se déclarait affligé par la

faiblesse de niveau de l’encadrement pédagogique des écoles et

collèges.

En 1978, un chef d'établissement scolaire qualifiait sévèrement

l'université d'Alger de " CEG de la rue Didouche Mourad ".

Des militants sincères se sont indignés à tort de ces reproches,

convaincus que la pensée officielle était au service du bien public.

Mais, depuis, les rénovateurs ont souhaité prendre leurs distance avec

les islamistes arabophones jugés responsables de l’abaissement des

niveaux. Ces derniers auraient agi au sein du Parti, non pas pour

enrichir et préserver le projet culturel des indépendantistes, mais

pour déraciner la culture française et la sphère sociale des francisants

qualifiées de colonialistes (qui dominaient le gisement des emplois

qualifiés), en prônant l’arabisation comme une contre-culture et en

réduisant la création artistique à la copie de modèles étrangers.

Les islamistes du FLN se seraient enfermés dans un univers que

ses références et ses repères mettent à côté de l'univers réel et du

rationalisme .

Le débat plus récent sur la langue amazight n'a pas non plus épargné

les partisans de l'arabisation totale incapables de comprendre qu’une

langue n’est supérieure à une autre qu’à condition d’assimiler ou de

s’approprier les valeurs essentielles de l’autre langue.

Ainsi, beaucoup de ceux qui étaient imprégnés des exigences de la

restauration des valeurs arabo-islamiques lors de la lutte de libération

nationale avouent, maintenant, que leur engagement comportait une

large part d'affectif et d’irrationnel et que donc, leur attachement et

leur fidélité au nationalisme l'avaient emporté sur des choix

philosophiques peu formulés à l’époque.

Le désenchantement pourrait s'examiner au regard de cette opinion

selon laquelle les arabisants, influencés par les mythes surfaits d’un

Moyen-orient arabe, gardien des puits de pétrole, sous tutelle anglo-saxonne,

" ont fait depuis 1962, tout ce qu'il fallait pour alimenter l'anti-arabisation ".

Une autre vérité ressort de ces confrontations : le plus grand parti FLN

d'Algérie serait en fait celui des ex-FLN.

Entre ‘’ex‘’ subsisterait un puissant élan de solidarité et de fraternité

qui donne encore sa raison d’être au FLN. Leur nostalgie écorchée

par tant de déceptions renvoie à une idéalisation de l’époque de la

Régence turque sublimée et exaltée pour la résistance valeureuse du

bey de Constantine à l'Est, de l’émir El Mokrani au Centre, de l'émir

Abd-el-Kader à l'Ouest et des tribus des Oasis au Sud (massacres

et pillage de Laghouat en1852) lors de la conquête cruelle de l'armée

française.

Mais, l'époque évoquée par les historiens fait, à son tour, l'impasse

sur les dynasties berbères (Almoravide et Almohade), du 11ème au

15 ème siècle, qui ont brillé au Maghreb et en Espagne, certes bien

après le royaume numide et la défaite de Jugurtha à l'époque romaine.

Elle fait aussi l'impasse au Sahara sur le pays des touareg, terres de

parcours des immenses caravanes de sel, jamais soumises ni au

pouvoir spirituel marocain, ni ottoman ni français.

-       tel décrit son itinéraire à partir de ses souvenirs d'enfance: militant

ordinaire, fils d'émigré entré au FLN avant 1962 sous l'empire d'une

aversion anti-colonialiste et anti-raciste. Il a quitté ensuite le Parti dans

une crise intellectuelle portée par sa formation (et son régionalisme).

Il y a, dit-il, chez le raïs une ‘’aspiration de médersa’’ (?) si marquée qu'il

en a imbibé son entourage et subjugué le pays. Il ne fait que reproduire

des discours marxistes puisés au Moyen-orient et ne pense qu’à prendre

le leadership du monde arabe. Il ne voit plus que c'est dans sa diversité

et sa proximité avec l’Europe que l'Algérie est forte et riche ".

-        tel autre, militant ayant vécu ou côtoyé les combats de

l'anti-colonialisme, se félicite, au contraire, du succès remarquable

des mouvements de libération en Asie, au Moyen-Orient, en Afrique

engagés dans des changements profonds encouragés par le FLN,

alors que les capitalistes se sont enfoncés dans une crise profonde

et que cette évolution se poursuit à travers le monde. Le FLN n’est

pas anachronique. " Pouvait-on mieux faire ?" interroge t-il

en guise de soutien au vieux parti.

-       telle autre, militante féministe réfugiée en France, revendique la

parité pour les femmes, mais non l’égalité avec les hommes et

fustige les discriminations et la violence des islamistes.

-        tel autre, militant anti-colonialiste, européen d'origine, s'interroge

dans son témoignage sur l’intérêt de sa présence dans le mouvement

national algérien désorienté par les changements du monde et déclare

au journaliste qui l'interroge douter de l'utilité de son engagement.

Il est regrettable d’avoir privé le pays des débats de société aux

différentes étapes de la construction nationale, d’autant que le combat

n’est plus celui de l’anti-colonialisme, mais celui de l’appontage des

cultures sur l’échiquier d’un monde mouvant traversé de forces hostiles .

Revenu en France, il estime que l’Etat français est seul fautif et

responsable de l’épisode douloureux vécu par le petit peuple européen

durant la guerre de libération. Il estime que les Pieds Noirs, attirés dans

le piège de la colonisation comme demandeurs d’emploi, non comme

mercenaires, devraient se joindre à la demande d’excuse des Algériens

adressée non à la France mais à l’Etat français responsable du gâchis

de la guerre et de leur exclusion violente d’Algérie.

Il déplore la projection sur les immigrés de l’hostilité des Français

à l’égard du terrorisme.

-       tel autre, enfin, dénonce l'opportunisme plutôt que le pragmatisme

des clans obnubilés par la course au pouvoir , s'accommodant

d'une gestion libérale faussement armés d'un discours nationaliste

ou pseudo marxiste selon les interlocuteurs et les milieux destinataires .

Pour lui, il n'y avait ni dogme ni sectarisme dans la lutte de libération.

Malheureusement, l’uniformité de pensée avant 62 a empêché le débat

de société après 62. La libération de la parole devait être totale, mais

elle a été réservée à d’autres fins.

 

Partie  III  -          Dilemmes…et avenir.

En Algérie, le FLN se maintient toujours à la tête de l’Etat, en dépit

des épreuves politiques traversées. Il revendique contre d’autres

la première place au nom de sa légitimité historique tirée de la lutte

anti-colonialiste menée avant et depuis 1962.

Ainsi, l’usure de son image résulte autant de son exceptionnelle

longévité que des transformations sociales qui ont métamorphosé

la problématique du développement national au lendemain de

l’indépendance.

A l’usure de son image, s’est ajouté le vent contraire d’une démographie

nationale galopante qui a porté la population de 9 millions d’individus à

plus de 35 millions (quatre fois l’Algérie de 62 !), dont 80% sont nés

après l’indépendance et 75% au nord du pays !

Nonobstant les difficultés, le pays s'est fortifié dans tous les domaines

de la vie nationale, au point que le FLN peut faire valoir à son actif des

succès indéniables (mais coûteux) dans l'industrie, les infrastructures,

la construction, la formation, les technologies, l'éducation…

Mais, l’ancrage au pouvoir a fini par priver le FLN, gardien du passé,

de sa capacité de rénovation et de rayonnement . Si la rente pétrolière

(dont le développement du Sud a été injustement privé) a permis de

quadrupler la population au nord, elle a ajouté deux grands fléaux :

la perte aberrante de terres fertiles de l’agriculture au nord et la

faiblesse calamiteuse de la productivité économique caractérisant une

dépendance de l’étranger consécutive au choix des technologies.

Dans les années 1968-70, le FLN, confronté aux obstacles de la

construction nationale, avait présenté la refondation dans les termes

suivants : le FLN doit-il devenir un parti de masse ou un parti

d’avant-garde ?

Il avait été proposé de faire appel aux étudiants alors que s’amplifiaient

la lutte anti-colonialiste en Asie et en Afrique, les contradictions des pays

socialistes, l’enlisement des pays de la périphérie bridés par l’OMC,

l’appel à la solidarité des non-alignés face au FMI et aux zones monétaires.

L’échec de la guerre des six-jours, précédé par la guerre meurtrière

du Gara Djebilet avec le Maroc en 63, avait fait apparaître un autre

type de guerre que celle des maquis, une autre façon de regarder le

monde.

 

Quel enseignement tirer du passé pour ancrer quelle stratégie d’avenir

peut-on demander au FLN ?

Un constat s’impose : déferlement de la mondialisation, imbrication des

marchés, mise en concurrence des pays émergents, progrès des

technologies… Or, tout est dans la main de puissances financières en

embuscade, menaçant souverainetés et identités nationales, clôturant

ou ouvrant à leur guise les espaces de richesses ou de pauvreté .

Un autre constat s’impose : en n’admettant pas résolument dans ses

rangs la jeunesse ‘’éclairée’’, le FLN s’était condamné à prendre

l’apparence d’un club d’anciens combattants gardien de la voie «sacrée».

Il n’est plus fréquenté que par des prétendants à de hautes responsabilités

venus s’y baptiser pour obtenir par cooptation une fonction politique.

Ce faisant, le FLNa dû concéder que d’autres partis se créent sur la

scène politique. Mais, dans un scénario de rivalités, de dépérissement

institutionnel !

Pas en valeurs nouvelles ! Pas en projet de société !

Or, depuis 1970 , il apparaît de façon cinglante que ce sont l’imprévoyance

et la brutalité des transformations sociales qui alimentent, à feu continu,

le moteur de la société duale. «Ramer dan le sens du courant fait rire les

crocodiles» dit un vieux proverbe africain.

Il est plus que temps d’orienter la croissance et développement selon

les prescriptions d’une saine gouvernance sociale .

Cette tâche revient à un FLN recomposé.

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  Le prochain anniversaire du cinquantenaire de l’indépendance de

l’Algérie 1962-2012 est l’occasion d’annoncer, sur les deux rives

de la Méditerranée, une politique de Coopération-développement

ambitieuse, courageuse visant, simultanément, à aider l’Algérie à

surmonter les obstacles de son développement pour la hausser au

niveau des pays européens et à permettre à la France d’affronter

l’hégémonie industrielle de l’Allemagne soutenue (sous cape) par les

pays de l’Est et l’hégémonie financière de l’Angleterre soutenue (sous

cape) par son Commonwealth.

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