Priorité de la demande d’attribution préférentielle au conjoint survivant

Publié le 30/11/2015 Vu 6 599 fois 0
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À défaut de règlement amiable et conventionnel par les époux, le juge, lors du prononcé du divorce, ordonne la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux. Il statue sur diverses demandes telles que sur le maintien d’un bien immobilier dans l'indivision ou d'attribution préférentielle.

À défaut de règlement amiable et conventionnel par les époux, le juge, lors du prononcé du divorce, ordon

Priorité de la demande d’attribution préférentielle au conjoint survivant

I- Le sens de l’attribution préférentielle : ou l’attribution forcée de la part de l’autre conjoint…

En matière matrimoniale, l'attribution préférentielle d'un bien indivis n'est prévue qu'en cas de décès, au profit du conjoint survivant ou des héritiers, ou qu'en cas de divorce, au profit des époux divorcés.

Lors d'une procédure de partage liée à un divorce ou à une succession un indivisaire, un héritier ou légataire copartageant peut, sous des conditions strictes demander à se voir attribuer en priorité un bien (domicile conjugal; exploitation agricole; entreprise commerciale: parts de sociétés, fonds de commerce... ) par rapport aux autres copartageants.

C'est ce que l'on nomme l'attribution préférentielle définie par les articles 831 à 834 du code civil.

Ainsi la valeur du bien attribué amiablement ou par le tribunal dans le lot de la personne s’imputera sur ses droits et si elle est supérieure, donnera lieu au paiement d’une soulte.

Dans le cadre d'une demande d'attribution préférentielle formulée lors du divorce ,les juges du fond doivent rechercher si l’attribution préférentielle des parts d'une SCI emporte dévolution exclusivement au mari de la pleine propriété du seul local qui servait d’habitation aux époux et de ses accessoires.A défaut ils encourent la cassation. C'est ce qu'a jugé la 1ere Civ, 24 octobre 2012, pourvoi N° 11-20.075

L'article 832-3 dispose que: "L'attribution préférentielle peut être demandée conjointement par plusieurs successibles afin de conserver ensemble le bien indivis. A défaut d'accord amiable, la demande d'attribution préférentielle est portée devant le tribunal qui se prononce en fonction des intérêts en présence. En cas de demandes concurrentes, le tribunal tient compte de l'aptitude des différents postulants à gérer les biens en cause et à s'y maintenir. Pour l'entreprise, le tribunal tient compte en particulier de la durée de la participation personnelle à l'activité."

A) Les conditions préalables

1°) Textes

Article 831-2 du code civil

Le conjoint survivant ou tout héritier copropriétaire peut également demander l'attribution préférentielle : 1° De la propriété ou du droit au bail du local qui lui sert effectivement d'habitation, s'il y avait sa résidence à l'époque du décès, et du mobilier le garnissant ; 2° De la propriété ou du droit au bail du local à usage professionnel servant effectivement à l'exercice de sa profession et des objets mobiliers à usage professionnel garnissant ce local ; 3° De l'ensemble des éléments mobiliers nécessaires à l'exploitation d'un bien rural cultivé par le défunt à titre de fermier ou de métayer lorsque le bail continue au profit du demandeur ou lorsqu'un nouveau bail est consenti à ce dernier.

Article 831-3

L'attribution préférentielle de la propriété du local et du mobilier le garnissant visée au 1° de l'article 831-2 est de droit pour le conjoint survivant.

Les droits résultant de l'attribution préférentielle ne préjudicient pas aux droits viagers d'habitation et d'usage que le conjoint peut exercer en vertu de l'article 764 Article 833 du code civil

Les dispositions des articles 831 à 832-4 profitent au conjoint ou à tout héritier appelé à succéder en vertu de la loi, qu'il soit copropriétaire en pleine propriété ou en nue-propriété. Ces dispositions, à l'exception de celles de l'article 832, profitent aussi à l'héritier ayant une vocation universelle ou à titre universel à la succession en vertu d'un testament ou d'une institution contractuelle.

B) Que retenir ?

1°) L'attribution préférentielle est une modalité de partage de l'indivision

dans laquelle le bien indivis est attribué à un indivisaire qui, en contrepartie, doit régler une soulte aux autres indivisaires,

A défaut d'être prévue dans l'acte d'acquisition liant les indivisaires, ce mécanisme n'est possible que dans des hypothèses limitées et précises spécialement prévues par la loi. Aux termes de l’article 267 du code civil le juge en prononçant le divorce statue sur les demandes de maintien dans l’indivision ou d’attribution préférentielle. Cette attribution n’est jamais de droit en matière de divorce.

L’article 1476 du code civil soumet le partage de la communauté en ce qui concerne l’attribution préférentielle et les soultes aux règles successorales établies pour les partages entre cohéritiers

2°) Dans le cadre d’une succession où le conjoint titulaire dispose de droits d’usufruit, il ne pourra la solliciter du fait de son absence de vocation à disposer de droits en pleine propriété ou en nu propriété

1 ere Civ,27 juin 2000, pourvoi N°98-17-1777

Dans le cadre d'une demande d'attribution préférentielle formulée lors du divorce,les juges du fond doivent rechercher si l’attribution préférentielle des parts d'une SCI emporte dévolution exclusivement au mari de la pleine propriété du seul local qui servait d’habitation aux époux et de ses accessoires.

A défaut ils encourent la cassation.

C'est ce qu'a jugé la 1ere Civ, 24 octobre 2012, pourvoi N° 11-20.075

3°) Il résulte des dispositions des articles 832 et suivants du code civil, dans leur rédaction issue de la loi du 23 juin 2006,

qu'un local servant d'habitation ne peut faire l'objet d'une attribution préférentielle lorsque ce bien appartient indivisément aux héritiers et à un tiers

1 ere Civ, 15 janvier 2014 N° de pourvoi: 12-25322 et 12-26460

Autrement dit lorsqu’un bien est indivis avec un tiers, étranger à la succession, une demande d’ attribution préférentielle au profit d’un héritier ne prospèrera pas,

Cass. 1re Civ, 15 février 1972, pourvoi N° 70-12.640, Cass. 1re Civ, 13 novembre 1967 : Bull. civ. I, n° 329 ;

4°) Le conjoint sera prioritaire au regard d’autres héritiers s’il résidait dans les lieux lors de la demande. Cela sous entend une résidence principale.

A contrario une attribution de la résidence secondaire ne pourrait prospérer 1 er juillet 1997, pourvoi N°95-12263

5°) Dans le cadre d’une succession :

le conjoint titulaire de droits d’usufruit dans une succession ne peut la solliciter puisqu’il n’a pas vocation à disposer de droits de pleine propriété ou de nu propriété 1 ere Civ,27 juin 2000, pourvoi N°98-17-1777

6°) Le partenaire pacsé ( article 515-6 du code civil ) est concerné, mais pas le concubin

Article 515-6 Les dispositions des articles 831, 831-2, 832-3 et 832-4 sont applicables entre partenaires d'un pacte civil de solidarité en cas de dissolution de celui-ci. Les dispositions du premier alinéa de l'article 831-3 sont applicables au partenaire survivant lorsque le défunt l'a expressément prévu par testament.

Lorsque le pacte civil de solidarité prend fin par le décès d'un des partenaires, le survivant peut se prévaloir des dispositions des deux premiers alinéas de l'article 763. pour le logement qui servait effectivement d'habitation ainsi que le mobilier le garnissant.

1ere Civ, 26 septembre 2012 pourvoi n°11-12838 : "l'attribution préférentielle ne peut être demandée que par le conjoint, le partenaire d'un pacte civil de solidarité ou tout héritier".

1ere Civ , 9 décembre 2003 N° Pourvoi : 02-12884 pas pour le concubin

7°) L’attribution préférentielle s’applique à une indivision à la fois conventionnelle et successorale

II Les conséquences de l’attribution préférentielle sur le transfert de propriété et des droits dans le partage successoral, la valeur du bien , de la soulte et de l'indemnité d'occupation

A) Le transfert de propriété au jour du partage définitif

Article 834 du code civil

Le bénéficiaire de l'attribution préférentielle ne devient propriétaire exclusif du bien attribué qu'au jour du partage définitif. Jusqu'à cette date, il ne peut renoncer à l'attribution que lorsque la valeur du bien, telle que déterminée au jour de cette attribution, a augmenté de plus du quart au jour du partage indépendamment de son fait personnel.

B) La soulte éventuelle due au(x) copartageant(s)

La valeur du bien « attribué » s’imputera sur les droits dans le partage liquidatif ou successoral du conjoint survivant .

En absence de testament, le droit légal sera du quart en propriété ou de tout en usufruit ( sauf en présence d’enfants issus d’un premier lit) qui empêche une telle option et impose le quart en propriété Les biens faisant l'objet d'une attribution préférentielle sont estimés à leur valeur au jour du partage Si le bien excede la valeur de la part du conjoint dans le partage , une soulte sera alors due et sera payable comptant en principe.

Article 832-4 du code civil

Les biens faisant l'objet de l'attribution sont estimés à leur valeur à la date fixée conformément à l'article 829. Sauf accord amiable entre les copartageants, la soulte éventuellement due est payable comptant.

Toutefois, dans les cas prévus aux articles 831-3 et 832, l'attributaire peut exiger de ses copartageants, pour le paiement d'une fraction de la soulte, égale au plus à la moitié, des délais ne pouvant excéder dix ans.

Sauf convention contraire, les sommes restant dues portent intérêt au taux légal.

En cas de vente de la totalité des biens attribués, la fraction de la soulte y afférente devient immédiatement exigible ; en cas de ventes partielles, le produit de ces ventes est versé aux copartageants et imputé sur la fraction de la soulte encore due.

La question de la qualification en donation déguisée lorsqu’ un conjoint divorcé obtient l'attribution préférentielle d'un immeuble acquis en indivision avec son époux, alors que le mari en a payé entièrement le prix. Rappelons qu’une donation déguisée entre époux antérieure au 1er janvier 2005 était nulle au regard de l'ancien article 1099, alinéa 2, du code civil : 1re Civ, 9 décembre 2009, pourvoi n° 08-20.570

Cass. 1re Civ, 2 octobre 1985 pourvoi N°84-13.136 a ainsi jugé que dans ce cas le conjoint divorcé qui obtient l'attribution préférentielle de l’immeuble indivis payé par son mari risque de subir les conséquences d’une qualification judiciaire de cette opération en donation déguisée.

En conséquence, cette épouse gratifiée devra d’une part payer comme soulte la moitié de la valeur de l'immeuble et d’autre part l'autre moitié au titre de la restitution de deniers sur lesquels portait, la donation déguisée annulée en vertu de l'article 1099-1 du Code civil.

Elle devra pour obtenir l’attribution d’abord rembourser les sommes reçues à titre de donations déguisées et ensuite payer sa soulte

La question de la preuve de l’intention libérale postérieure à janvier 2005, car toute donation demeure aussi révocable si elle a été effectuée avant le 1er janvier 2005 au regard de l'ancien article 1096 du code civil, Tel n’est plus le cas si elle est postérieure à cette date, en application du nouvel article 1096, alinéa 2, du code civil

C) L'indemnité d'occupation au profit de l'époux non-attributaire.

Cette indemnité sera due par l'épouse attributaire qui a été autorisée à occuper le bien depuis l’ordonnance de non conciliation à titre gratuit ou onéreux lors du partage en particulier lorsqu’elle a été en mesure de pourvoir à son logement et de contribuer à celui de ses enfants qui occuperait, un bien immobilier commun, Cass. 1re Civ, 9 octobre 1990 : JurisData n° 1990-002559

D) La  liquidation judiciaire et l’impossible attribution préférentielle du bien indivis

A défaut d’une clause contractuelle en ce sens dans l’acte d’acquisition d’un bien la Cour de cassation a rejeté la demande d'attribution préférentielle formée par l'épouse indivisaire suite à la procédure en licitation partage engagée sur le domicile familial par un liquidateur judiciaire de son conjoint.

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