La réforme de la prescription pénale : des victimes davantage protégées ?

Publié le Modifié le 13/03/2017 Vu 10 020 fois 7
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La loi portant réforme de la prescription en matière pénale allonge les délais de prescription des crimes et des délits et consacre - en partie - la jurisprudence de la Cour de cassation.

La loi portant réforme de la prescription en matière pénale allonge les délais de prescription des crimes

La réforme de la prescription pénale : des victimes davantage protégées ?

Malgré un désaccord entre les deux Chambres du Parlement, la loi n° 2017-242 du 27 février 2017 portant réforme de la prescription pénale a été promulguée https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do;jsessionid=E41B0E533042219C282B3B3FADC41081.tpdila08v_3?cidTexte=JORFTEXT000034096721&dateTexte=&oldAction=rechJO&categorieLien=id&idJO=JORFCONT000034096714.

Elle est composée de cinq articles qui modifient les articles 7 à 9 du Code de procédure pénale, insèrent de nouveaux articles à la suite de l'article 9 du Code de procédure pénale et modifient d'autres dispositions extérieures à celui-ci.

L'aspect essentiel de la réforme réside dans le doublement du délai de prescription de l'action publique en matière criminelle (qui passe de 10 à 20 ans) et en matière délictuelle (qui passe de 3 à 6 ans). Il existe toujours quelques délais spécifiques et il convient de remarquer que - en droit - seuls les crimes contre l'humanité demeurent imprescriptibles. En effet, le Parlement a renoncé à rendre les crimes de guerre imprescriptibles. De même, les crimes sexuels contre les mineurs demeurent prescriptibles (Voir sur la question http://www.legavox.fr/blog/mikael-benillouche/affaire-flavie-flament-viol-mineur-22120.htm#.WKWlpYWcHcs).

Cet allongement du délai de prescription se justifie par l'augmentation de l'espérance de vie ainsi que par les évolutions de la preuve scientifique. En effet, désormais, des années après la commission de l'infraction, une preuve fiable peut permettre d'apporter la preuve de la culpabilité (notamment en cas d'analyse ADN).  

L'autre apport essentiel de la loi réside dans l'insertion des articles 9-1 à 9-3 dans le Code de procédure pénale.

L'article 9-1 consacre les notions d'infractions dissimulées et d'infractions occultes, retardant le point de départ du délai de prescription au jour où l'infraction a été découverte dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique. Toutefois, pour éviter de rendre, comme c'était le cas jusqu'ici, ces infractions - en fait - imprescriptibles, le législateur prévoit un délai de prescription préfixe de 12 ans en matière délictuelle et de 30 ans en matière criminelle à compter de la commission des faits. Ainsi, de façon assez étrange, en France, pendant longtemps, étaient imprescriptibles, les infractions les plus graves du droit positif (les crimes contre l'humanité) et des délits de droit commun (abus de confiance) ou de droit pénal des affaires (abus de biens sociaux). L'infraction occulte est définie comme étant, en raison de ses éléments constitutifs, ni connue de la victime, ni de l'autorité judiciaire. L'infraction dissimulée est celle dont l'auteur a effectué délibérément toute manoeuvre caractérisée tendant à en empêcher la découverte.

L'article 9-2 contient la liste des actes interruptifs de prescription.

L'article 9-3 définit la suspension de l'action publique comme tout obstacle assimilable à la force majeure, de fait ou de droit.

Le principe de la légalité et d'intelligibilité de la loi sort donc renforcé de la réforme, des notions prétoriennes ayant été consacrées et précisées par le législateur...pour autant le développement le droit des victimes semble s'être quelque peu estompé au gré des travaux parlementaires !

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1 Publié par Visiteur
28/02/2017 08:49

Peut-on faire un lien avec l'actualité récente et notamment la saisine du PNF dans l'affaire Fillon?

2 Publié par Visiteur
28/02/2017 10:23

Cher collègue et néanmoins ami,
Votre analyse reste pertinente et TOUT prochainement un commentaire sous cet angle sera diffusé....

3 Publié par Visiteur
28/02/2017 10:30

Bonjour,

Tout d'abord merci pour votre article, j'ai cependant une question. Je ne suis pas sûr de comprendre la notion de délai de prescription préfixé de 12 ans pour les délits et 30 ans pour les crimes. Si un meurtre est commis et que le cadavre est dissimulé, les ossements refont surface 29 ans après le meurtre: l'action publique se prescrit elle l'année suivante, sous réserve d'actes interrompant la prescription ? Ou alors dispose t'on d'un nouveau délai de 20 ans dès lors que l'on a connaissance de l'infraction?

4 Publié par Visiteur
28/02/2017 11:06

Ah non dans ce cas, il s'agit d'une infraction dissimulée et le crime se prescrit au bout de 30 ans !

5 Publié par Visiteur
28/02/2017 11:49

Pour rebondir sur cet exemple du meurtre:sauf erreur de ma part la loi défini l'infraction dissimulée mais n'en donne pas de listes?Donc il reviendra à la Crim de déterminer les infractions auxquelles la nouvelle disposition est applicable.Or jusqu'ici elle a refusé d'appliquer la théorie de l'infraction dissimulée au meurtre?

6 Publié par Visiteur
28/02/2017 13:37

Bonjour Monsieur,

Alors que votre billet est largement diffusé sur les réseaux sociaux, j'ai lu avec attention vos écrits. Je ne parviens pas à déceler le ou les paragraphe dans lequel(s) vous décryptez les enjeux de la réforme. Serait-ce dans le 4e paragraphe ? Et/où dans le dernier ?

Mais ne passez-vous à côté de l'essentiel ? N'entendez-vous pas les avocats et les magistrats, vent debout contre cette réforme ?

Pourquoi passer sous silence les vives critiques adressées par les professionnels du droit au législateur ? Les règles relatives à la prescription visent à l'apaisement social parce qu'au pardon et à l'oubli.
Le Parlement ajoute une pierre à l'édifice de la victimisation du procès pénal.

Et lorsque les victimes, portées aux nues, seront, encore davantage, malheureusement déboutées de leurs demandes faute de preuves (les analyses d'ADN dont vous faîtes état existent dans une minorité de dossier), le problème restera entier.

Plutôt que "description des enjeux", un titre comme " mon point de vue sur..." aurait été préférable et conviendrait mieux à ce billet, hélas, trop incomplet.

7 Publié par Visiteur
01/03/2017 00:20

@Juliette : tout à fait
@YPB : vous devriez vous présenter avant toute chose. Si vous n'êtes pas d'accord n'hésitez pas à écrire et diffuser votre point de vue. Pour le reste, je vous remercie de vos suggestions mais sur un blog je ne poursuis - semble-t-il - pas les mêmes objectifs que vous

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A propos de l'auteur
Blog de Mikaël Benillouche

Ce blog est destiné à recenser les actualités juridiques en pénal inhérentes à ma profession d'avocat

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