Dans un premier article, j'ai présenté le fichier ADN ou FNAEG en expliquant son paradoxe au regard de la législation et des principes qui régissent le respect de la personne, jusqu’à intervention du conseil constitutionnel du 16 septembre 2010.
LE FICHIER FNAEG DES EMPREINTES GENETIQUES (ADN) ET LA LOI
Cet article fait corps avec l'article précité.
Je m'interrogerai ici, sur les possibilités de refuser le prélèvement ADN, ou postérieurement de demander son effacement du fichier.
Le refus de s'y soumettre, même s'il n'est pas fréquent ( environ 10%) reste sanctionné par l'article 706-56 CPP à'un an d'emprisonnement et 15 000 euros d'amende. Lorsque ces faits sont commis par une personne condamnée pour crime, la peine est de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende.
En réalité, les tribunaux prononceront des peines bien moindre de l'ordre de 500 euros d'amende !
Je m'interrogerai sur les motifs légitimes de refus au test ADN.
I- Les situations rendant possibles le prélèvement
L'article 706-54 al 1 du code de procédure pénale permet de reccueillir les empreintes génétiques des personnes déclarées coupables de l'une des infractions mentionnéesà l'article 706-55 du CPP ( cité à la fin de l'article)
L'article 706-54 al 2 envisage
la possibilité de prise des empreintes génétiques ou d'un raaprochement avec des empreintes inscrites au fichier concernant les personnes à l'encontre desquelles il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu'elles aient commis l'une des infractions mentionnées à l'article 706-55 sur décision d'un officier de police judiciaire agissant soit d'office, soit à la demande du procureur de la République ou du juge d'instruction ; il est fait mention de cette décision au dossier de la procédure....
Le fichier contient aussi les empreintes génétiques issues des traces biologiques recueillies à l'occasion des procédures de recherche des causes de la mort ou de recherche des causes d'une disparition ... ainsi que les empreintes génétiques correspondant ou susceptibles de correspondre aux personnes décédées ou recherchées."
L’article R 53-21 du code de procédure pénale, envisage le fait que le prélèvement ADN des personnes condamnées doit être effectué dans un délai d’un an après l’exécution de leur condamnation.
Forte de ces textes, l'inscription supposera :
1) une personne déclarée coupable d'une infraction visée à l'article 706-55 CPP et dans ce cas, le prélèvement devra se faire dans l'année après exécution de la condamnation, s'il n'a pas été opéré jusque là.
2) une personne contre laquelle il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable le fait qu'elle ait commis l'une des infractions mentionnées à l'article 706-55 avec un rapprochement des empreintes avec le fichier.
3) une procédure de recherche des causes de mort ou de disparition.
II- A contrario, les refus pour motifs légitimes, fondant la relaxe
A) Le refus justifié en cas de dépassement du délai de un an, à compter de l'exécution d'une peine.
L’article R 53-21 du code de procédure pénale, envisage le fait que le prélèvement ADN des personnes condamnées doit être effectué dans un délai d’un an après l’exécution de leur condamnation.
C'est ce qu'a rappelé Crim, 10 juin 2009, pourvoi N° 08-87615
en rejetant le pourvoi.
-- Le délai d’un an court à compter de l’exécution de la peine et non de la condamnation.
en cas d'amende, de TIG ou de peine de prison ferme sans arrestation à la barre, la date de l’exécution de la peine peut être postérieure à la date où la condamnation est devenue définitive.
Dans le cas d’espèce la réquisition était hors délai.
B) Le refus justifié si la demande de prélèvement vise une infraction non envisagée par la loi dans le fichier FNAEG article 706-55 du CPP
Ce texte a été rappelé in extenso en fin d'article.
--exemple les infractions liées à l'usage ou à la détention de stupéfiants ( mais pas au trafic)
-- Le délit de destruction d'OGM ( maïs transgénique) sur lequel la jurisprudence a pas mal statué réprimé par l'article 7 de la loi n° 2008-595 du 25 juin 2008 (Code rural, article L. 671-15),iinfraction non insérée dans l'article 706-55 du CPP .
Dans ce cadre, le Tribunal Correctionnel de Bordeaux le 28 octobre 2010
a relaxé un prévenu H.Georges poursuivi pour refus de prélèvement ADN qui a fait suite à sa condamnation pour avoir participé à l'action anti-OGM. en 2009 et avait ensuite refusé de payer une amende de 300 euros dans le cadre d’une procédure de « plaider coupable ».
Les deux motifs visent ;
- le fait de destruction de maïs transgénique réprimé par une incrimination spécifique,
- l'article 8 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme.
Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui.
Dans le même sens, Crim, 22 juin 2010, pourvoi N° 10-80957
La Cour d'Appel de Caen le 11 janvier 2010 a confirmé un jugement de première instance sur la base de l'article 1er de la Convention de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales et relaxé les deux militants locaux et faucheurs volontaires d'OGM du sud Manche.
C) Le refus justifié en l'absence d'indices graves ou concordants rendant vraisemblable la commission de l’infraction qualifiée crime ou délit.
Ce point sera soumis à appréciation des tribunaux.
Crim, 2 septembre 2009, N° de pourvoi: 08-87616
L’article 706-54 al 2 du Code de procédure pénale impose, pour la conservation dans le fichier de l’empreinte génétique de personnes suspectées des crimes ou délits énumérés à l’article 706-55, qu’existent à l’encontre de celles-ci « des indices graves ou concordants rendant vraisemblable la commission de l’infraction ».
Conclusion :
Dans ces situations, toutes personnes poursuivies pourront contester les faits.
Toutes personnes déjà fichées pourraient demander leur désinscription du Fichier National Automatisé des Empreintes Génétiques au procureur de la république, puis, en cas de refus au juge des libertés et de la détention (avec appel possible devant le président de la chambre de l'instruction).
Le ministère de la justice a mis en ligne sur son site , rubrique « Services-Formulaires- Pour les particuliers », des formulaires de demande d’effacement d’un signalement au FNAEG.
Ces recours sont essentiels quand on sait que les données FNAEG seront conservées, donc tout abus de pouvoir y compris doit être surveillé
40 ans pour les personnes définitivement condamnées, les personnes décédées, les personnes disparues et les traces,
25 ans pour les personnes mises en cause, sauf irresponsabilité pénale
Demeurant à votre disposition pour toutes précisions.
Sabine HADDAD
Avocate au barreau de Paris
PJ Liste des infractions visées
Le fichier national automatisé des empreintes génétiques centralise les traces et empreintes génétiques concernant les infractions suivantes :
1° Les infractions de nature sexuelle visées à l'article 706-47 du présent code ainsi que le délit prévu par l'article 222-32 du code pénal ;
2° Les crimes contre l'humanité et les crimes et délits d'atteintes volontaires à la vie de la personne, de torture et actes de barbarie, de violences volontaires, de menaces d'atteintes aux personnes, de trafic de stupéfiants, d'atteintes aux libertés de la personne, de traite des êtres humains, de proxénétisme, d'exploitation de la mendicité et de mise en péril des mineurs, prévus par les articles 221-1 à 221-5, 222-1 à 222-18, 222-34 à 222-40, 224-1 à 224-8, 225-4-1 à 225-4-4, 225-5 à 225-10, 225-12-1 à 225-12-3, 225-12-5 à 225-12-7 et 227-18 à 227-21 du code pénal ;
3° Les crimes et délits de vols, d'extorsions, d'escroqueries, de destructions, de dégradations, de détériorations et de menaces d'atteintes aux biens prévus par les articles 311-1 à 311-13, 312-1 à 312-9, 313-2 et 322-1 à 322-14 du code pénal
4° Les atteintes aux intérêts fondamentaux de la nation, les actes de terrorisme, la fausse monnaie et l'association de malfaiteurs prévus par les articles 410-1 à 413-12, 421-1 à 421-4, 442-1 à 442-5 et 450-1 du code pénal ;
5° Les délits prévus par les articles L. 2353-4 et L. 2339-1 à L. 2339-11 du code de la défense ;
6° Les infractions de recel ou de blanchiment du produit de l'une des infractions mentionnées aux 1° à 5°, prévues par les articles 321-1 à 321-7 et 324-1 à 324-6 du code pénal.