L'usage correspond à une pratique habituellement suivie dans l'entreprise et prend la forme d'un avantage supplémentaire accordé aux salariés ou à une catégorie d'entre eux par rapport à la loi, aux accords collectifs ou au contrat.
L'employeur ne saurait déroger par usage, dans un sens moins favorable, à des dispositions d'ordre public.
Pour qu'une pratique d'entreprise acquière la valeur contraignante d'un usage, dont les salariés pourront se prévaloir, certaines conditions définies par la jurisprudence doivent être remplies. Il est en effet nécessaire que la pratique soit :
- - constante ;
- - fixe ;
- - générale.
Le caractère général de l'usage implique que l'avantage bénéficie à l'ensemble des salariés, des anciens salariés ou, tout au moins, à une catégorie déterminée d'entre eux (Cass. soc. 27 mai 1987 n°82-42.115).
La catégorie de salariés concernés par l'usage peut être néanmoins très minoritaire, sans que le caractère général de l'usage ne soit remis en cause (Cass. soc. 7 nov. 1985 n° 83-41.616).
La constance, la généralité et la fixité de la pratique doivent permettre d'établir la volonté non équivoque de l'employeur de s'engager envers ses salariés et de leur octroyer un avantage (Cass. soc. 7 déc. 1978 n° 78-40.099).
Ces trois conditions sont cumulatives et si l'une d'entre elles fait défaut, il ne sera pas possible de présumer que l'employeur a souhaité accorder, en pleine connaissance de cause, un droit supplémentaire aux salariés par rapport à la loi, au statut collectif ou au contrat individuel de travail (Cass. soc., 28 févr. 1996, n° 93-40.883).
En l’espèce, un ancien salarié, responsable du service accastillage, sollicitait un arriéré de primes sur encarts publicitaires et sur chiffre d'affaires instaurées par usage.
L'employeur estimait que cet arriéré n'était pas dû car il ne s'agissait pas d'avantages instaurés par voie d'usage mais accordés à titre individuel.
La Cour de cassation avait donc à répondre à la problématique suivante :
è La généralité de l'usage peut-elle être caractérisée lorsque l'usage bénéficie à un seul salarié, représentant unique de sa catégorie ?
La Cour de cassation répond par l’affirmative.
Pour la Haute juridiction, le critère de généralité est rempli lorsque l'avantage est versé à l'unique représentant d'une catégorie du personnel.
En l'espèce, la fonction de responsable du service accastillage occupée par le salarié était distincte de celle de chef de rayon, en ce que la qualité de cadre de l'intéressé et le périmètre de ses attributions excédaient le périmètre des attributions d'un chef de rayon, et que le salarié était le seul à occuper un emploi de cette catégorie de personnel, ce dont elle a déduit que le critère de généralité était rempli.
En outre, les primes litigieuses étaient versées de façon constante depuis plusieurs années et à tout le moins depuis la reprise du contrat de travail du salarié par l'employeur et leurs montants étaient calculés selon des modes de calcul prédéterminés et des seuils fixes et précis. Les conditions de fixité et constance étaient dès lors elles aussi remplies.
Ainsi la Cour de cassation approuve la Cour d'appel en ce qu'elle en a déduit que le versement des deux primes litigieuses, dont elle a fait ressortir qu'elles étaient versées en raison des attributions du salarié dépassant les fonctions d'un chef de rayon qu'il était seul à exercer, résultait d'un usage et que les demandes en paiement de ces chefs devaient être accueillies.