Lorsque l’un des époux ou les deux décident de se séparer et dès avant l’introduction d’une procédure de divorce, certaines précautions sont à prendre lorsque des comptes bancaires joints ont été ouverts ou que des procurations sur les comptes ont été mis en place.
Première étape : la clôture des comptes joints
Au cours du mariage, les époux décident fréquemment de souscrire l’ouverture d’un compte joint qui hébergera les revenus de l’un et/ou de l’autre et servira au règlement de charges communes (charges du mariage) Il permet à chacun des époux de procéder au règlement effectif de ces dépenses et chacun détient le droit d’effectuer l’ensemble des opérations sur ce compte (dépôt, retrait, paiement par carte bancaire, remise de chèques, virements,..), sans demander au préalable l'accord de l'autre. Lorsque des époux se séparent, le maintien de ce compte peut générer des problèmes dès lors que chaque titulaire demeure responsable des dettes générées par le fonctionnement de ce compte et ce, quel que soit la nature des débits réalisés et quel que soit le titulaire ayant opéré l’opération de débit. Ainsi, en présence d’un époux peu scupuleux, l’ensemble des avoirs d’un tel compte est susceptible d’être retiré par l’un des titulaires qui pourra, le cas échéant, créer un découvert en fonction du montant autorisé par la convention de compte. En raison de la solidarité attachée à ce compte, chaque époux sera tenu de rembourser le découvert bancaire. De plus, il sera ensuite nécessaire de se ménager la preuve des sommes déposées et des mouvements du compte pour pouvoir obtenir la réintégration de ces sommes dans l’actif au moment du calcul lié à la liquidation et au partage du régime matrimonial. Lorsque les époux n’ont pas signés de contrat de mariage, (cas le plus fréquent), l’application du régime légal de communauté réduite aux acquêts implique que les revenus déposés sur ce compte par les époux deviennent juridiquement des biens communs aux deux (Art. 1401 C. civ).
Afin d’éviter ces complications au cours de la procédure, il est recommandé aux époux :
L’ouverture d’un compte bancaire personnel afin d’y verser les revenus de son activité bien qu’en cas de mariage sous le régime légal de la communauté réduite aux acquêts, ces revenus conservent leur nature de bien commun, ce qui signifie qu’ils devront être pris en compte lors des opérations de liquidation partage.
La clôture des comptes joints nécessitera l’accord des deux époux. Il faut adresser à la banque une lettre recommandée AR signée par les époux. Cela nécessite de procéder au transfert les éventuels prélèvements automatiques et de prévenir les créanciers (emprunt prélevé sur le compte joint…) du changement des coordonnées bancaires.
En cas désaccord entre les époux, il existe deux possibilités pour contourner l’opposition de l’autre époux à la clôture :
- La désolidarisation du compte : Si l’un des époux présente à la banque une demande de désolidarisation du compte, celui-ci continuera à fonctionner mais sur un mode collectif ce qui signifie que les deux signatures conjointes des époux sera nécessaire pour toute opération de débit. Cela permet à la fois d’éviter les retraits individuels mais aussi de voir engager sa responsabilité. En revanche, la réunion des deux signatures pour toute opération de débit n’est pas de nature à permettre un fonctionnement très fluide de ce type de compte et peut aboutir à des situations conflictuelles entre les époux.
- Disjonction du compte : l’autre branche de l’alternative consiste à ce que l’un des titulaires demande à la banque la disjonction de ce compte commun. (Après un retrait éventuel de la moitié des avoirs correspondant à sa part) Dans ce cas, ce titulaire sort du compte joint qui devient dès lors un compte individuel au nom de son conjoint (l’autre n’y a plus accès puisqu’il n’est plus contractant). Cet époux peut ensuite ouvrir un autre compte personnel pour y déposer ses revenus.
Dans tous les cas, la séparation des comptes ne doit pas aboutir à la cessation de la participation aux charges communes par l’un des époux. Il est en effet recommandé de prévoir l’abondement d’un compte à hauteur de la part des dépenses du ménage. A défaut, l’autre époux pourra demander à l’autre le remboursement de ces sommes lors de la liquidation de la communauté.
Deuxième étape : la révocation des procurations sur les comptes personnels
Un compte bancaire ouvert au seul nom d’un époux peut également créer des difficultés si une procuration a été consentie par un des époux à l’autre car dans cette hypothèse, ce dernier est autorisé à faire fonctionner le compte de l’autre : émettre des virements, signer des ordres de débit (chèques, prélèvements, virements), demander la délivrance de chéquiers ou de cartes de paiement, obtenir la communication de toutes les informations relatives aux opérations enregistrées sur le compte. Pour éviter les abus en période de séparation, il convient de solliciter la révocation immédiate de toutes les procurtations en adressant à votre banque une LRAR de demande de révocation et d’en informer son conjoint en lui demandant également, le cas échéant, de restituer les formules de chéquier à l’établissement bancaire. De la même manière, la souscription de cartes de fidélité autorisant l’ouverture d’une ligne de crédit à la consommation pour effectuer des achats dans des magasins (Carte Cofinoga par exemple) et sur lesquelles l’autre époux bénéficie d’une procuration doit appeler la vigilance. En effet, le risque est ici que l’un des époux utilise ce mode de paiement pour financer des dépenses personnelles. Les organismes de crédit pourront réclamer le remboursement de ces sommes à l’autre conjoint. Il est recommandé de s’adresser aux différents organismes de crédit afin d‘obtenir soit la résiliation de ces cartes, quitte à demander ensuite l'ouverture de nouvelles cartes avec des coordonnées bancaires personnelles, soit la révocation de la procuration.
La conservation de ses derniers relevés de comptes est particulièrement conseillée (y compris les relevés du compte joint) pour la période antérieure et concomitante à la séparation. Ils serviront de preuve des mouvements de fonds au moment des opérations de liquidation et partage de la communauté.