LE CONTRAT D’AMODIATION

Publié le 23/08/2012 Vu 34 057 fois 0
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L’amodiation consiste en un louage pour une durée fixe ou indéterminée, sans faculté de sous-louage, de tout ou partie des droits attachés à un droit minier ou une autorisation de carrières, moyennant une rémunération fixée par accord entre l’amodiant et l’amodiataire. Il peut en effet arriver que dans la jouissance de leurs titres respectifs, certains titulaires se retrouvent en difficultés d’exercer de manière effective leur prérogative sur l’ensemble du périmètre minier qui leur revient et chercher une solution durable. L’amodiation est ainsi l’une des formules qu’ils peuvent envisager qui puissent tout, en demeurant dans le strict respect de la loi, leur permettre de contourner une difficulté. Il peut par exemple s’agir de l’occupation d’une partie du périmètre minier par des exploitants artisanaux sans titre ni droit. Plusieurs hypothèses peuvent être envisagées et l’on doit comprendre si au regard de la loi elles peuvent être possibles. D’où le mérite du questionnement ci-dessous: 1) L’amodiation est-elle possible entre un permis d’exploitation et une autorisation d’exploitation artisanale ?; 2) Un permis de recherche peut-il faire l’objet d’une amodiation ? Ce sont là les questions et les aspects y relatifs auxquels nous allons essayer d’apporter des solutions dans cet article.

L’amodiation consiste en un louage pour une durée fixe ou indéterminée, sans faculté de sous-louage, de

LE CONTRAT D’AMODIATION

L’amodiation consiste en un louage pour une durée fixe ou indéterminée, sans faculté de sous-louage, de tout ou partie des droits attachés à un droit minier ou une autorisation de carrières, moyennant une rémunération fixée par accord entre l’amodiant et l’amodiataire[1]. Il peut arriver que dans la jouissance de leurs titres respectifs, certains titulaires se retrouvent en difficultés d’exercer de manière effective leur prérogative sur l’ensemble du périmètre minier qui leur revient et chercher une solution durable. C’est ainsi qu’ils peuvent envisager plusieurs formules qui puissent, tout en demeurant dans le strict respect de la loi, leur permettre de contourner une difficulté. D’où parfois le recours notamment à l’amodiation. Il peut par exemple s’agir de l’occupation d’une partie du périmètre minier par des exploitants artisanaux[2] sans titre ni droit. Plusieurs hypothèses peuvent être envisagées et l’on doit comprendre si au regard de la loi elles peuvent être possibles. D’où le mérite du questionnement ci-dessous:

1) L’amodiation est-elle possible entre un permis d’exploitation et une autorisation d’exploitation artisanale ?

2) Un permis de recherche peut-il faire l’objet d’une amodiation ?

Voici les questions et les aspects y relatifs auxquels nous allons essayer d’apporter des solutions. Pour mieux appréhender la question, il est souhaitable de faire un bref aperçu sur le contrat d’amodiation à travers le passé et brosser quelques considérations générales.

Nous allons donc dans un premier temps parcourir l’historique (I), ensuite répondre à la question de savoir si l’amodiation est possible entre un permis d’exploitation et une carte d’exploitant minier artisanal (II). Ensuite, nous allons voir si le permis de recherches peut faire l'objet d'une amodiation (III). Et enfin une conclusion bouclera notre avis.

I. Historique et considérations générales sur l’amodiation

Le contrat d’amodiation n’est pas une nouveauté pour l’actuel code minier. Il est important de relever que la première législation générale sur les mines, en l’occurrence le décret du 24 septembre 1937[3], n’avait pas fait allusion à ce genre de contrat pour les titres miniers. Cette notion a été introduite pour la première fois dans l’arsenal juridique congolais par l’ordonnance - loi n° 67-231 du 11 mai 1967 portant législation générale sur les mines et hydrocarbures.

Trois articles étaient consacrés à ce contrat, soit de l’article 37 à 39.

L’article 37 énonçait que : « a) l’amodiation consiste en un louage pour une durée fixe ou indéterminée, sans faculté de sous-louage, moyennant une rémunération fixée par accord entre l’amodiant et l’amodiataire, sur les droits attachés à un permis d’exploitation ou à une concession.

L’amodiataire doit remplir les conditions exigées à l’article 24 alinéa b) et être préalablement agrée par le service des Mines.

a) Tout contrat d’amodiation comporte la responsabilité solidaire et indivisible de l’amodiant et de l’amodiataire vis-à-vis de l’Etat ; l’amodiataire est, nonobstant toute clause contraire, redevable des impôts, taxes et redevances, toutefois, en cas de défaillance de l’amodiataire, l’amodiant est solidairement responsable vis-à-vis de l’Etat, mais garde son droit de recours contre l’amodiataire défaillant.

b) La responsabilité civile vis-à-vis des tiers et les responsabilités pénales incombent au seul amodiataire ».

De cette disposition, il y a lieu de comprendre que le contrat d’amodiation devait être agrée par le service des Mines et c’est l’amodiant qui était responsable de tout fait quelconque de l’amodiataire et il revenait à celui-ci à recourir contre celui-ci.

Cette disposition établissait clairement que c’est l’amodiataire qui répondait vis-à-vis des tiers pour les fautes tant pénales que civiles commise par lui.

L’ordonnance-loi n° 81/013 du 02 Avril 1981 portant législation générale sur les mines et les hydrocarbures n’a pas fait exception, emboitant en cela le pas de son prédécesseur, a reconduit la disposition relative au contrat d’amodiation. C’est alors qu’il a organisé ce contrat à partir de l’article 35 jusqu’à 37 et ce, dans les mêmes termes que dans la précédente législation.

Vingt et un ans après, la loi n° 007/2007 du 11 Juillet 2002 portant code minier ainsi que le décret n° 038 du 26 Mars 2003 portant règlement minier, n’ont pas ignoré ce contrat.

Contrairement aux législations précédentes, le code minier du 11 Juillet 2002 a le mérite d’étendre les dispositions sur l’amodiation. C’est ainsi qu’il lui consacre 5 articles, soit de l’article 177 à l’article 181.

Quant au règlement minier, celui-ci prévoit l’amodiation de l’article 369 à l’article 373.

Contrairement aux précédents législateurs, le cadastre minier procède à l’instruction cadastrale de toute demande en amodiation et celle-ci, à l’instar des droits miniers, est accordée par le ministère des mines dans les mêmes formes que les droits miniers.

« Par parallélisme de forme, le retrait de l’autorisation d’amodiation n’invalide pas le contrat d’amodiation. Les parties demeurent tenues de respecter les clauses contractuelles jusqu’à la disposition des motifs du retrait de l’autorisation d’amodiation, à défaut, jusqu’à sa résiliation dans les formes et conditions qu’il organise lui-même »[4].

L’article 1èr, point 4 du code minier définit l’amodiation comme : « un louage pour une durée déterminée ou indéterminée, sans faculté de sous-louage, de tout ou partie des droits attachés à un droit minier ou une autorisation de carrières moyennant une rémunération fixée par accord entre l’amodiant et l’amodiataire ».

L’article 177 alinéa 1èr du code minier répète aussi que « l’amodiation consiste en un louage pour une durée fixe ou indéterminée, sans faculté de sous-louage, de tout ou partie des droits attachés à un droit minier ou une autorisation de carrières, moyennant une rémunération fixée par accord entre l’amodiant et l’amodiataire ». L’amodiant c’set la personne qui met son titre minier en location, tandis que l’amodiataire c’est celui qui loue ledit titre.

Il ressort de ce qui précède que l’amodiation est un contrat, mieux une convention au sens de l’article 1èr du code civil congolais livre III, qui dispose que « le contrat est une convention par laquelle une ou plusieurs personnes s'obligent, envers une ou plusieurs autres, à donner, à faire ou à ne pas faire quelque chose ».

Il a été jugé à ce propos que : « l’intention de s’obliger est un élément essentiel du contrat »[5].

Il est question d’un contrat synallagmatique dans lequel les cocontractants s’obligent réciproquement l’un vis-à-vis de l’autre.

I.1. Conditions de recevabilité ou de l’irrecevabilité de la demande d’inscription du contrat d’amodiation

Les conditions de recevabilité ou de non recevabilité de l’inscription du contrat d’amodiation sont fixées par l’article 370 du règlement minier.

Pour sa recevabilité, toute demande d’inscription d’un contrat d’amodiation doit comporter les éléments suivants : «

a) Les identités et les adresses de l’amodiant et l’amodiataire, avec les pièces justificatives pour l’amodiataire ;

b) Les références du droit minier ou des carrières qui fait l’objet de l’amodiation ;

c) Les sociétés affiliées de l’amodiataire, s’il en existe ;

d) Les droits détenus éventuellement par l’amodiataire et les sociétés affiliées qui sont du même genre que le droit minier ou de carrières qui fait l’objet de l’amodiation ».

En dehors des conditions fixées par la loi, il y a lieu de retenir en pratique que le contrat doit en outre indiquer :

  • La durée : il peut être question d’un contrat à durée indéterminée ou déterminée ainsi que la date de l’échéance doit être indiquée avec précision.
  • La nature du titre : le titre détenu par l’amodiant doit clairement ressortir pour préciser s’il est question d’un permis d’exploitation des rejets des mines ou un permis d’exploitation à petite échelle, …
  • Les substances sur lesquelles le contrat porte : c’est le principe du respect de la spécialité du régime minier qui voudrait que chaque titre minier indique sans équivoque les substances minières pour lesquelles il a été octroyé.

Ce principe se retrouve bien traduit dans l’alinéa 1èr de l’article 64 du code minier qui énonce que : « le permis d’exploitation confère à son titulaire le droit exclusif d’effectuer, à l’intérieur du périmètre sur lequel il est établi et pendant la durée de sa validité, les travaux de recherche, de développement, de construction et d’exploitation visant les substances minérales pour lesquelles le permis est établi et les substances associées s’il en a demandé l’extension… ».

Le périmètre minier (superficie) doit être conforme aux limites légales.

Il est enfin important de noter que la sous–location du titre est interdite par le contrat d’amodiation, toute dérogation par les parties doit être considérée comme une violation du code minier conformément aux dispositions relatives aux infractions.

I.2. Les obligations des parties

Les obligations des parties dans un contrat d’amodiation sont différentes selon qu’il s’agit de l’amodiant ou de l’amodiataire. Nous allons donc voir les obligations de l’amodiant (1.1.a) et celles de l’amodiataire (1.1.b).

I.2.1. Les obligations de l’amodiataire

En principe, l’amodiataire répond aux mêmes critères d’éligibilité aux droits miniers et de carrières tels que fixés par le code minier en son article 23.

Il doit avoir la qualité, c'est-à-dire être éligible au droit minier ou de carrières postulé par lui, en démontrant pour une personne physique le domicile élu en RDC et justifier d’une bonne moralité. Pour la personne morale, elle devra être constituée régulièrement en conformité au décret du 23 juin 1960 relatif aux sociétés commerciales. L’amodiataire doit en outre démontrer l’existence d’un gisement exploitable pour lequel il doit présenter un programme de production et d’investissement correspondant à l’importance du gisement. Il doit par ailleurs veiller à la protection de l’environnement en mettant sur pied un mécanisme pour le respect des normes environnementales comme le ferait le titulaire lui-même. C’est ainsi qu’il doit se conformer à l’EIE et au PGEP.

L’amodiataire n’est pas exempté des obligations qui découlent de l’article 69 du code minier, relatif à la contribution du projet au développement des communautés environnantes[6].

I.2.2. Les obligations de l’amodiant

Les obligations de l’amodiant découlent de l’article 180 du code minier. Il lui est reconnu le pouvoir d’exercer un droit de surveillance et d’inspection des travaux de l’amodiataire, soit par tout expert de son choix dûment mandaté par lui ou lui-même personnellement.

La direction des mines doit en principe communiquer à l’amodiant les observations qu’elle formule à l’endroit de l’amodiataire et ce dernier doit prendre connaissance des rapports d’inspection.

I.3. Des conditions de validité du contrat d’amodiation

A l’instar de tout contrat, le contrat d’amodiation nécessite le respect de certaines conditions générales et particulières, car « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites »[7].

I.3.1. Conditions générales

Le contrat d’amodiation, l’avons-nous dit, répond au prescrit de l’article 1e.r du CCCL III et doit, pour sa validité, remplir les conditions édictées à l’article 8 du code précité :

La teneur de l’article 8 est comme suit : « quatre conditions sont essentielles pour la validité d’une convention :

  • Le consentement de la partie qui s’oblige ;
  • Sa capacité de contracter ;
  • Un objet certain qui forme la matière de l’engagement ;
  • Une cause licite dans l’obligation. La doctrine souligne que « tout contrat qui ne respecterait pas l’une des conditions ne serait pas « légalement formé » et ne sortirait pas d’effets juridiques escomptés. En exigeant ces quatre conditions, la loi veut se réserver un contrôle sur la manière dont l’accord doit être conclu, sur la personnalité même des individus qui peuvent contracter, sur le contenu de lieu accord et enfin, sur la cause de leur engagement, c'est-à-dire sur le but que poursuivent les parties en contractant »[8].

Il va sans dire donc que pour que le contrat d’amodiation soit valable, il doit répondre aux conditions ci-dessus.

I.3.2. Conditions légales particulières

Les conditions légales particulières ressortent de l’article 177 du code minier qui dispose que

- Tout contrat d’amodiation doit comporter, sous peine de nullité, une clause résolutoire :

« 

a) pour non paiement par l’amodiataire des impôts, taxes et redevances dus à l’Etat.

b) pour non observation des lois et règlement pouvant entrainer des conséquences financières ou administratives préjudiciables à l’amodiant.

Tout contrat d’amodiation doit comporter, sous peine de nullité, des clauses fixant les conditions d’entretien et de réinvestissement raisonnable du gisement.

Tout contrat d’amodiation comporte la responsabilité solidaire et indivisible de l’amodiant et de l’amodiataire vis-à-vis de l’Etat. L’amodiataire est, nonobstant toute clause contraire, redevable des impôts, taxes et redevances dus en vertu du titre minier ou de carrières. Toutefois, en cas défaillance de l’amodiataire, l’amodiant est responsable vis-à-vis de l’Etat sous réserve de son droit de recours contre l’amodiataire défaillant ».

Nous allons essayer de passer en revue ces différentes conditions et au besoin les commenter.

I.3.2.a. Tout contrat d’amodiation doit comporter sous peine de nullité une clause résolutoire

S’agissant de la clause résolutoire, l’article 81 du CCCLIII énonce que : « la condition résolutoire est celle qui, lorsqu’elle s’accomplit, opère la révocation de l’obligation, et qui remet les choses au même état que si l’obligation n’avait pas existé ».

Cette condition, selon l’article 82 du même code, est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques pour le cas où l’une de deux parties ne satisferait point à son engagement.

En droit minier, le législateur fait une imposition d’insérer une clause résolutoire dans le contrat d’amodiation de manière expresse notamment en ce qui concerne :

1.3.2.b. Le non paiement par l’amodiataire des impôts, taxes et redevances dus à l’état

Il est important de savoir ici que le non paiement par l’amodiataire des taxes ci-dessus entraîne ipso facto la résolution de son contrat par l’amodiant de sorte qu’il ne sera plus nécessaire de recourir à une quelconque procédure pour démontrer le manquement de l’amodiataire dès lors qu’il sera établi qu’il ne s’est pas acquitté du paiement des taxes énumérées par l’article 177 du code minier.

Cette clause est aussi applicable en ce qui concerne le manquement à l’inobservance des lois et règlements qui sont susceptibles d’entraîner des conséquences financières ou administratives capables de causer préjudice à l’amodiant. Il faut entendre par là tout manquement à un règlement ou à une loi dont les conséquences se conçoivent en termes de pénalités que l’amodiant doit payer. Cependant, quand bien même son titre est loué par l’amodiataire, en cas de défaillance, c’est l’amodiant qui doit payer à l’administration car c’est lui qui est responsable au regard de la loi.

I.4. De la responsabilité solidaire et indivisible de la l’amodiant et de l’amodiataire vis-à-vis de l’Etat

En droit congolais, la notion de la responsabilité civile est régie par l’article 258 du CCCLIII qui dispose que : « tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».

C’est donc cette responsabilité que le législateur rend solidaire et indivisible entre l’amodiant et l’amodiataire.

Pour Michel de JUGLART, « La solidarité, appelée aussi corréalité ou, par nos anciens auteurs, solidarité, met obstacle à la division des créances et des dettes. La solidarité active permet à l’un quelconque des créanciers de réclamer au débiteur la totalité–solidum-de la créance ; la solidarité passive permet au créancier de demander à l’un quelconque des débiteurs paiement de la totalité de la dette »[9].

Paul Orban clarifie la notion de l’obligation solidaire en disant que « l’obligation est solidaire quand chacun des créanciers peut réclamer, en vertu du lien obligatoire, au débiteur la totalité de la prestation promise (solidarité active) ou quand le créancier peut réclamer, en vertu du lien obligatoire, à chacun des débiteurs, la totalité de ce qui est dû (solidarité passive), le paiement fait par le débiteur ayant dans les deux cas, effet libératoire total du ou des débiteurs à l’égard du ou des créanciers »[10].

Le code minier a imposé les deux obligations à la fois. Elles sont donc solidaires et indivisibles. « La solidarité et l’indivisibilité constituent toutes deux des exceptions au principe de l’obligation conjointe »[11].

En ce qui concerne l’application de ces principes à l’amodiant et à l’amodiataire, le législateur considère qu’il ne doit pas rester à la merci des parties pour qu’elles aient l’occasion de s’échapper au paiement. Dès lors, titulaire et locataire sont tenus tous de manière solidaire et indivisible, de sorte que l’administration peut recouvrer les sommes dues chez l’un ou l’autre et ce de manière indistincte.

Nous pensons qu’il y là en quelque sorte un prolongement du cordon ombilical entre l’amodiant et l’amodiataire dans la mesure où, bien que le titre appartienne à l’amodiant et qu’il est exploité par l’amodiataire, en cas de manquement c’est l’amodiant qui est responsable vis-à-vis de l’Etat. Ce dernier a néanmoins un droit de recours contre l’amodiataire.

I.5. De la responsabilité de l’amodiant et l’amodiataire vis-à-vis des tiers

En matière de responsabilité civile et pénale de l’amodiant et de l’amodiataire vis-à-vis des tiers, le principe retenu par le législateur congolais à l’article 181 du code minier c’est l’exonération de l’amodiant. Nous pensons que la position du législateur est conforme au bon droit dans la mesure où c’est l’amodiataire qui exerce au quotidien les droits portant sur le titre en tant que locataire, et c’est lui qui exerce la jouissance du droit minier.

Cependant, quelques restrictions sont à observer en ce qui concerne cette responsabilité. L’amodiant pourra être relevé de sa responsabilité dans certains cas. Il s’agit notamment lorsqu’il prouve que :

« a) Le dommage est survenu avant l’existence du contrat d’amodiation. Ici, le fait générateur de la responsabilité a eu lieu avant le contrat d’amodiation, ce qui naturellement atteste qu’au moment de la survenance du dommage, l’amodiataire n’avait pas encore commencé le louage du titre.

b) Le fait dommageable est intervenu après l’existence du contrat d’amodiation, mais avant l’occupation effective du lieu d’exploitation par lui. Dans cette occurrence, bien que le contrat ait déjà été passé entre l’amodiant et l’amodiataire, dès lors qu’il est établi que ce dernier n’est pas encore entré en possession effective des lieux, il ne peut pas être tenu responsable du fait dommageable, sauf si c’est établi qu’il est survenu par son fait.

c) le dommage est causé par une exploitation frauduleuse faite soit par l’amodiant soit par un tiers ». Cette hypothèse est envisageable lorsque bien qu’ayant loué son titre à l’amodiataire, l’amodiant continue à faire ou à permettre une exploitation frauduleuse au préjudice de l’amodiataire. Dans pareille situation, malgré l’exonération légale dont jouit l’amodiataire, il sera néanmoins tenu responsable du dommage causé aux tiers.

II. L’amodiation est-elle possible entre un permis d’exploitation et une autorisation d’exploitation artisanale ?

Chercher à répondre à cette question c’est établir un parallélisme entre le mode d’exploitation lié à un permis d’exploitation et à une autorisation d’exploitation artisanale pour voir si le mariage juridique de ces deux titres est possible. L’article 1er point 52 du code minier définit les titres miniers et les énumèrent. Par titres miniers, il faut entendre « les certificats officiels délivrés par le cadastre minier conformément aux dispositions du présent code et constatant les droits miniers. Le certificat de recherche, le certificat d’exploitation, le certificat d’exploitation des rejets et le certificat d’exploitation de petite mine sont des titres miniers ».

Il va s’en suivre de cette énumération que la carte d’exploitant artisanal n’est pas reprise comme titre minier. Un mot mérite d’être dit à propos de l’exploitation minière artisanale. C’est l’article 109 du code minier qui constitue le siège de la matière.

En effet, « Lorsque les facteurs techniques et économiques qui caractérisent certains gîtes d’or, de diamant ou de toute autre substance minérale ne permettent pas d’en assurer une exploitation industrielle ou semi-industrielle, mais permettent une exploitation artisanale, de tels gîtes sont érigés, dans les limites d’une aire géographique déterminée, en zone d’exploitation artisanale … ». Il ressort de cet alinéa, qu’il est difficile d’envisager une cohabitation entre le permis d’exploitation et la carte d’exploitant artisanal car les critères d’exploitation diffèrent d’une activité à l’autre. Il est possible qu’un titulaire d’un permis d’exploitation soit incapable d’exploiter une partie de son périmètre minier. Dans ce cas, il peut louer partiellement son titre uniquement sur la partie qu’il ne souhaite pas exploiter. Ce louage ne peut se concevoir qu’à l’égard d’une personne physique ou morale éligible au permis d’exploitation car on ne peut transférer plus ou moins de droit qu’on en a.

« Un périmètre minier faisant l’objet d’un titre minier en cours de validité ne peut pas être transformé en zone d’exploitation artisanale. Un tel périmètre est expressément exclu des zones d’exploitation artisanale instituées conformément… ». Il découle de cet alinéa qu’un périmètre tant qu’il est couvert par un titre valide ne peut pas subir une transformation même partielle en zone d’exploitation artisanale.

De tout ce qui précède, sans qu’il ne soit nécessaire d’aborder d’autres aspects relatifs à l’exploitation minière artisanale, il est important de retenir que l’amodiation ne peut pas se concevoir entre un permis d’exploitation et une carte de négociant pour les raisons avancées ci-dessus. Peut –on envisager une piste de solution à ce propos ?

Nous pouvons proposer au titulaire en difficulté au cas où la partie occupée par les creuseurs ne l’intéresserait pas, d’orienter l’amodiation vers une personne capable d’exploiter le périmètre de manière industrielle.

Toutefois, l’article 110 du code minier énonce en son alinéa 1er que « Lorsque les facteurs qui ont justifié l’institution d’une zone d’exploitation artisanale ont cessé d’exister ou qu’un nouveau gisement ne relevant pas de l’exploitation artisanale vient à être découvert, le Ministre, sur avis de la direction de géologie, procède à la fermeture de la zone d’exploitation artisanale ».

Une autre solution pourra provenir de l’alinéa ci-dessus. Le titulaire peut aussi solliciter du Ministre des mines la fermeture pure et simple de la zone d’exploitation artisanale même si formellement cette zone n’existe pas. La décision du Ministre permettra de déclencher des pourparlers entre le titulaire et les responsables de différentes coopératives installées sur le site s’il y en a.

III. Un permis de recherche peut-il faire l’objet d’une amodiation ?

La dernière préoccupation du consultant consistait à savoir s’il était possible d’amodier un permis de recherche. La réponse à cette question ressort de l’alinéa 2 de l’article 177. En effet, cet alinéa est ainsi libellé : « Les droits miniers et/ou de carrières de recherche ne peuvent pas faire l’objet d’amodiation ». Quelle peut en être la raison ? A notre avis, nous estimons qu’il serait anormal d’admettre que le détenteur d’un permis de recherche puisse se permettre de louer son titre. Il n’est en effet qu’à la phase de recherche, qui n’est pas une fin en soi, et est lui-même soumis à beaucoup d’exigences, dont notamment en préalable son PAR[12].

IV. Conclusion

Il a été question au cours de cette étude, de faire une analyse sur certains aspects légaux de l’amodiation. Nous avons eu à donner le rapport de droit qui peut exister entre l’amodiation et un permis d’exploitation et une carte d’exploitant artisanal. Nous avons démontré qu’il est impossible d’envisager un tel contrat dans la mesure où les raisons qui justifient l’institution d’une zone d’exploitation artisanale sont différentes de celles qui militent en faveur de l’octroi d’un permis d’exploitation. Et bien plus, nous avons démontré aussi par la loi qu’un périmètre couvert par un titre valide ne peut pas être transformé en une zone d’exploitation artisanale. Au-delà des différents arguments, quelques pistes de solution ont été proposées.

S’agissant de l’amodiation d’un permis de recherches, le code minier l’avons-nous dit, exclu expressis verbis ce genre de contrat.

Nous espérons que le consultant trouvera, à travers cet avis, quelques éléments de réponse à ses préoccupations et nous restons à son entière disposition pour d’éventuels éclaircissements.

 

BIBLIGRAPHIE

 I. Lois et documents officiels

  1. Loi N° 007/2002 du 11 juillet 2002 portant code minier
  2. Decret loi n° 038/2003 du 26 mars 2003 potrant reglement minier
  3. Bulletin officiel du Congo belge, 1937, p. 903

 II. Ouvrages

  1. BAMBI KABASHI Adolphe, Le droit minier à l’épreuve des droits foncier et forestier, L’Harmattan, Paris, 2012, 248 p.
  2. EMERY MUKENDI WAFWANA, Droit minier congolais, juricongo, kinshasa, 2000, p.178, Cass.2 déc.1875, Pas., 1876, I, 308 p.
  3. KALONGO MBIKAYI ; Droit civil, T I les obligations, CRDJ _ Kinshasa, 432 p.
  4. De JUGLART, Leçons de droit civil, éd. Monchrestien, Paris, 1973, 1189 p.
  5. ORBAN Paul, Contrats et obligations, Fernand Larcier, Bruxelles, 749 p

III. Articles et sites internet

  1. BAMBI KABASHI Adolphe, Les obligations sociales des entreprises minières, www.legavox.fr/blog/bambi-adolphe-law-firm/administration/index.php


[1] Article 77 alinéa 1er du code minier

[2] On peut les appeler ainsi faute de termes sinon ce sont des imposteurs car au regard du code minier un exploitant minier artisanal répond à un nombre de critères notamment une carte et l’activité doit porter dans une zone réservée à l’exploitation artisanale.

[3] Bulletin officiel du Congo belge, 1937, p. 903.

[4] EMERY MUKENDI WAFWANA, Droit minier congolais,juricongo,kinshasa,2000, p.178.

[5] Cass.2 déc.1875,Pas., 1876, I, p. 37

[6] Voir à ce sujet : BAMBI KABASHI Adolphe, Les obligations sociales des entreprises minières, www.legavox.fr/blog/bambi-adolphe-law-firm/administration/index.php; Voir aussi BAMBI KABASHI Adolphe, Le droit minier à l’épreuve des droits foncier et forestier, L’Harmattan, Paris, 2012, p. 141.

[7] Article 33 CCCLIII

[8] KALONGO MBIKAYI ; Droit civil, T I les obligations, CRDJ _ Kinshasa, 49 p.

[9] De JUGLART, Leçons de droit civil, éd. Monchrestien, Paris, 1973, p. 990

[10] ORBAN,Paul, Contrats et obligations, Fernand Larcier, Bruxelles, p. 266

[11] Op.cit., p. 267

[12] PAR : Plan d’Atténuation et de Réhabilitation

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