Jurisprudence de la Cour suprême
Code de la famille (Moudouana)- Divorce judicaire pour discorde (Chiqaq)
Chambre des affaires du statut personnel et de l’héritage
Arrêt n°427 du 10 septembre 2008 –Dossier n°61/2/1/2007. Publié en langue arabe dans la Revue spéciale de la Cour suprême. N°1/2009 sous n°18, page 77.
Divorce judiciaire- Réparation du dommage causé au conjoint, par celui à qui incombe l’entière responsabilité du divorce pour discorde.
Rejet du pourvoi.
Lorsque le divorce a eu lieu pour discorde, le tribunal tient compte de la responsabilité de chaque époux en ce qui concerne la cause du divorce pour déterminer la responsabilité à imputer à l’un ou à l’autre des époux.
Du fait qu’il est probant que c’est le mari qui tient à son épouse et qu’il a introduit une instance contre elle, l’invitant à rejoindre le domicile conjugal alors que l’épouse persiste à vouloir obtenir le divorce pour cause de discorde.
Que le tribunal, en la condamnant à payer à son mari une indemnité pour réparation du préjudice subi à cause des frais engagés par lui, pour la cérémonie du mariage, pour l’équipement de la mariée et pour préjudice moral subi et en en fixant le montant selon son pouvoir discrétionnaire, sur la base de l’entière responsabilité de l’épouse, d’avoir provoqué le divorce pour cause de discorde, a justifié sa décision sur les éléments et les documents versés au dossier ainsi que sur le résultat de l’enquête à laquelle il a été procédé.
Commentaire :
Qu'est ce que le divorce judiciaire pour cause de discorde, en droit marocain ?
La discorde est tout conflit profond et permanent entre les époux rendant impossible la vie conjugale.
Les époux ou l'un d'eux, peuvent saisir le tribunal par une requête en divorce judiciaire.Il incombe au tribunal de tenter de concilier les époux. En cas d'échec de la tentative de conciliation, le tribunal prononce le divorce et statue sur les droits de l'épouse et des enfants. Le tribunal peut également dans le même jugement accorder réparation, à celui des époux ayant subi un préjudice, sur sa demande.
Le tribunal statue sur la demande de divorce pour cause de discorde dans un délai n'excédant pas six mois à compter de la date de la requête.
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Dans cette affaire les conjoints ont saisi le tribunal de première instance (section du statut personnel), l’épouse pour obtenir le divorce judiciaire pour cause de discorde, le mari pour obtenir la réintégration de l’épouse au domicile conjugal.
Après avoir tenté de réconcilier les époux, sans y parvenir, conformément aux prescriptions du code de la famille et du fait que l’épouse persiste à vouloir divorcer, malgré l’insistance du mari à vouloir reprendre la vie normale et compte tenu des éléments de l’enquête à laquelle il a été procédé et des documents versés au dossier, le tribunal a conclu à la responsabilité de l’épouse et a prononcé le divorce à ses torts et l’a condamnée à dédommager son mari.
Ce jugement a été rendu sur la base des dispositions de l’article 97 du code de la famille (Moudouana) qui stipule que :
« En cas d’impossibilité de réconciliation et lorsque la discorde persiste, le tribunal en dresse procès-verbal, prononce le divorce et statue sur les droits dus conformément aux articles 83, 84 et 85 ci-dessus, en prenant en compte, dans l’évaluation de ce qu’il peut ordonner à l’encontre de l’époux responsable au profit de l’autre, la part de responsabilité de chacun des époux dans la cause de la séparation.
Il est statué sur l’action relative à la discorde dans un délai maximum de six mois à compter de la date de l’introduction de la demande ».
La Cour suprême, après avoir examiné les éléments portés à sa connaissance, a conclu au rejet du pourvoi en cassation formulé par l’épouse, confirmant ainsi le jugement du tribunal de première instance, au motif que cette juridiction a pleinement motivé sa décision, dans le cadre de son pouvoir discrétionnaire et sur la base des éléments du dossier, des documents versés et du résultat de l’enquête d’usage.
Notons au passage que le divorce judiciaire pour cause de discorde a été nouvellement introduit par le code marocain de la famille (communément appelé« Moudouana » permettant ainsi à l’épouse d’accéder au divorce judiciaire à égalité avec le mari, à charge pour chacun d’eux d’apporter la preuve de ses allégations.
Conçu par Me Mohamed Boufous, Avocat au Barreau de Rabat.