Oui. Un mandat de vente signé par un seul indivisaire produit effet.
Toutefois ce mandat n’engage contractuellement que cet indivisaire vis-à-vis du cocontractant et n’est pas opposable aux autres indivisaires.
A noter qu’en signant seul un mandat de vente, l’indivisaire prend le risque qu’une offre conforme aux prix et aux conditions du mandat lui soit présentée par la suite l’obligeant dès lors à signer le compromis de vente.
Or, le consentement de tous les indivisaires est requis pour effectuer tout acte de disposition [1]. La vente d'un bien immobilier est soumise à la règle de l'unanimité.
Par conséquent, s’il n’obtient pas l’accord de tous les coïndivisaires, il pourra être tenu de payer une indemnisation au professionnel de l’immobilier voire d’indemniser l’acquéreur.
Mandat exclusif
Dans un litige, une propriétaire avait consenti à une société un mandat exclusif de vente d’une officine de pharmacie dont elle était propriétaire indivisément. L’autre indivisaire avait dès l’origine expressément refusé de signer le mandat. Le mandat prévoyait que la commission, à la charge du vendeur, était payable au jour de la réalisation de la vente. La vente avait ensuite été conclue, puis la société avait fait opposition entre les mains du notaire pour une somme correspondant au montant de sa commission. La propriétaire l'avait alors assignée en nullité du mandat. Saisie du contentieux, la Cour d’appel a déboutée l'intéressée en jugeant que le mandat n'était pas nul et cette dernière s'est pourvue en cassation. Les magistrats de la plus haute juridiction, ont validé l'appréciation des juges du fond ayant retenu que le contrat par lequel un indivisaire, agissant seul, donne mandat à un tiers de vendre la chose indivise, s'il est inopposable, sauf ratification, aux coïndivisaires, n'est pas nul et produit ses effets entre les contractants [2].
Mandat non exclusif
Dans une autre affaire une propriétaire en indivision d’une maison d’habitation avait seule donné mandat non exclusif de vente à une première agence immobilière, puis à une seconde agence. Cette dernière avait fait visiter à deux reprises le bien à un couple marié d'acquéreurs et ceux-ci avaient, par l’entremise de la première agence, signé une promesse de vente avec les propriétaires indivis, après négociation du prix et de la commission d’agence. La seconde agence avait ensuite assigné la propriétaire en paiement de la clause pénale prévue au mandat et celle-ci avait opposé la nullité du mandat. En cours de procédure, la propriétaire est décédée laissant sa fille comme seule héritière. Saisie du litige, la Cour d’appel a déclaré, comme l'avait fait les premiers juges, que le mandat était valable quand bien même il y était mentionné comme mandant la "succession Y représentée par Y...Nathalie" et que le mandat ne comportait que sa signature. Les juges d'appel ont jugé que le mandat ne liait pas les autres indivisaires, qu'il n'était pas nul et qu'il produisait ses effets entre les contractants. Par suite, l’héritière s’est pourvue en cassation et les magistrats ont approuvé la décision des juges d'appel ayant retenu que le contrat par lequel un indivisaire, agissant seul, donne mandat à un tiers de vendre la chose indivise, s’il est inopposable, sauf ratification, aux coïndivisaires, n’est pas nul et produit ses effets entre les contractants [3].
Notes de l'article :
[1] Article 815-3 du Code civil
[2] Cass. Civ., 1ère, 16/06/1987, n° 84-17840, Bull. 1987, I, n° 197, p. 146
[3] Cass. Civ., 1ère, 15/01/2015, n° 13-25955