Caisse primaire d'assurance maladie et rupture abusive

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L'arrêt concernant l'article de presse

L'arrêt concernant l'article de presse

Caisse primaire d'assurance maladie et rupture abusive

CA Versailles

1 juillet 2010

n° 09/00150

Texte intégral :

CA Versailles 1 juillet 2010 N° 09/00150

République française

Au nom du peuple français

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 88G

H. L./I. O.

5ème Chambre

ARRET N°

RÉPUTÉ

CONTRADICTOIRE

DU 01 JUILLET 2010

R. G. N° 09/00150

AFFAIRE :

Béatrice B.

C/

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE PONTOISE

MISSION NATIONALE DE CONTROLE ET D'AUDIT DES ORGANISMES DE SECURITE SOCIALE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 25 Novembre 2008 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de PONTOISE

N° RG : 08:00083/P

Copies exécutoires délivrées à :

Me  Romuald SAYAGH

Me Michel GRAVISSE

Copies certifiées conformes délivrées à :

Béatrice B.

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE PONTOISE

MISSION NATIONALE DE CONTROLE ET D'AUDIT DES ORGANISMES DE SECURITE SOCIALE

le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE PREMIER JUILLET DEUX MILLE DIX,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Mademoiselle Béatrice B.

...

...

comparante en personne, assistée de Me  Romuald SAYAGH (avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G 0022)

APPELANTE

****************

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE PONTOISE

Immeuble les Marjobets

2 rue des Chauffours

95017 PONTOISE CEDEX

représentée par Me Michel GRAVISSE (avocat au barreau de PONTOISE, vestiaire : T75)

INTIMÉE

****************

MISSION NATIONALE DE CONTROLE ET D'AUDIT DES ORGANISMES DE SECURITE SOCIALE

58-62 rue Mouzaïa

75935 PARIS CEDEX 19

non représentée

PARTIE INTERVENANTE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Mai 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Isabelle OLLAT, Conseiller chargé(e) d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé(e) de :

Madame Jeanne MININI, président,

Madame Catherine R. FOLLIARD, Conseiller,

Madame Isabelle OLLAT, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Mme Sabrina NIETRZEBA CARLESSO,

FAITS ET PROCÉDURE,

Melle Béatrice B. a créée une entreprise de transports sanitaires ayant pour objet le transport d'enfants autistes entre l'hôpital de jour de Poissy, le domicile des enfants ou leur établissement scolaire.

Le 28 novembre 2003, elle a conclu une convention avec la Caisse primaire d'assurance maladie du Val d'Oise prévoyant que les transports d'assurés sociaux effectués dans son véhicule seront pris en charge par la caisse sous certaines conditions précisément définies .

Il est prévu à l'article 14 que la convention est conclue pour une durée d'un an, qu'elle est renouvelable par tacite reconduction d'année en année en attente de convention nationale et qu'elle peut être dénoncée à tout moment par l'une des parties signataires par envoi d'un lettre recommandée avec accusé de réception par l'autre partie , la résiliation ne prenant alors effet qu'à compter du premier jour du deuxième mois civil suivant la réception de la lettre ; il est également prévu une caducité immédiate et de plein droit de la convention en cas de disparition d'une des parties signataires ou de non respect d'une clause ( violation grave ou répétée des engagements conventionnels).

Par lettre recommandée en date du 18 septembre 2007, la Caisse primaire d'assurance maladie du Val d'Oise a dénoncé la convention au visa de l'article 14 de celle ci à compter du premier jour du deuxième mois au motif que la cocontractante avait commis des violations graves et répétées de ses engagements conventionnels, en l'espèce : surfacturation de kilomètres, transport prescrit sans rapport avec ALD et facturé à 100 %, abattement des 5 kilomètres non respecté, défaut de prescription médicale et abattement non renouvelé pour transport de plusieurs personnes.

Le 23 janvier 2008, Melle Béatrice B. a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale du Val d'Oise d'une demande dirigée à l'encontre de la Caisse primaire d'assurance maladie du Val d'Oise tendant à l'annulation de la décision de déconventionnement et à la condamnation de la caisse à lui payer la somme de 20 000 € à titre de dommages intérêts en réparation de son préjudice et de la somme de 3000 € à titre d'indemnité fondée sur les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par jugement en date du 25 novembre 2008, le tribunal des affaires de sécurité sociale du Val d'Oise a :

- constaté que la dénonciation par la Caisse primaire d'assurance maladie du Val d'Oise de la convention passée avec Melle Béatrice B. est régulière,

- condamné néanmoins la Caisse primaire d'assurance maladie du Val d'Oise à lui verser la somme de 1200 € à titre de dommages intérêts en raison de l'erreur de compétence mentionnée dans cette dénonciation,

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Melle Béatrice B. a régulièrement interjeté appel le 3 décembre 2008 de ce jugement qui lui a été notifié le 29 novembre précédent.

Vu les observations reprises dans les côtes de plaidoirie par lesquelles elle conclut à l'infirmation du jugement ; elle demande à la cour de :

- dire entachée d'abus de droit la rupture de la convention conclue avec la Caisse primaire d'assurance maladie du Val d'Oise, la demande de nullité étant abandonnée ainsi que le conseil de l'appelante l'a indiqué oralement lors des débats le 18 mai 2010,

- condamner la Caisse primaire d'assurance maladie du Val d'Oise à lui payer la somme de 45 000 € à titre de dommages intérêts en réparation de son préjudice avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 29 octobre 2007 et le bénéfice de la capitalisation et la somme de 5000 € à titre d'indemnité fondée sur les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Au soutien de son recours, elle fait essentiellement valoir que la rupture de la convention est abusive et fondée sur des motifs fallacieux.

Vu les conclusions de la Caisse primaire d'assurance maladie du Val d'Oise datées du 18 mai 2010 soutenues oralement tendant à la confirmation du jugement sauf en sa disposition ayant alloué une indemnité d'un montant de 1200 € à Melle B. ; elle sollicite en outre sa condamnation au paiement d'une indemnité d'un montant de 1200 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Elle a précisé qu'elle a rompu la convention dans le respect des dispositions contractuelles et sans aucun abus ; elle a motivé sa décision de rompre alors qu'une telle obligation ne s'imposait pas à elle ; la cour n'a donc pas à examiner les motifs de la rupture dès lors qu'ils étaient inutiles ;

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie, pour l'exposé des moyens des parties, aux conclusions qu'elles ont déposées et soutenues oralement à l'audience du 18 mai 2010.

MOTIFS DE LA DÉCISION,

Considérant que la convention de droit commun conclue le 28 novembre 2003 comporte une faculté de résiliation unilatérale ouverte à chacune des parties, la résiliation étant effective le premier jour du deuxième mois suivant la réception d'une lettre recommandée ; qu'il est également prévu une caducité immédiate et de plein droit du contrat en cas de disparition de l'une des parties contractantes ou de non respect d'une des clauses avec cette précision d'une violation grave ou répétée des engagements conventionnels ;

Considérant qu'en application du principe de la liberté contractuelle, chacune des parties peut mettre fin librement au contrat à durée indéterminée qui les lie, la seule obligation étant de respecter un délai de préavis,

Considérant au cas présent que si la Caisse primaire d'assurance maladie du Val d'Oise a usé de la faculté de résiliation unilatérale du contrat en respectant le préavis contractuel de deux mois, il apparaît cependant que la rupture contractuelle est intervenue à titre de sanction pour violation grave et répétée par Melle Béatrice B. de ses engagements conventionnels et qu'il suffit, pour s'en convaincre, de se reporter aux termes clairs et précis du courrier ; que la caisse a d'ailleurs pris soin de motiver sa décision ; que dans ces conditions, les motifs doivent être appréciés par la cour afin de vérifier le caractère abusif ou non de la rupture du contrat ;

Considérant que la lettre de résiliation du 18 septembre 2007 motive la rupture par l'existence des

anomalies suivantes : surfacturation de kilomètres, transport prescrit sans rapport avec ALD et facturé à 100 %, abattement des 5 kilomètres non respecté, défaut de prescription médicale et abattement non renouvelé pour transport de plusieurs personnes, à l'origine d'un préjudice d'un montant de 1289,35 € pour la caisse ; que ce motif est qualifié d'erroné et de fallacieux par Melle Béatrice B. qui fait valoir que la mise en demeure vise des surfacturations du1er octobre 2005 au 31 mars 2006 mais n'est accompagnée que d'un tableau qui vise les prestations facturées entre le 30 août 2005 et le 8 décembre 2005 ; qu'elle ajoute qu'elle n'a reçu aucune mise en demeure préalablement à la résiliation et considère qu'elle a payé pour les démêlées rencontrées par sa soeur Cristel,

Considérant que la caisse primaire a analysé l'activité de Melle Béatrice B. pour la période comprise entre le 1er janvier 2006 et le 31 mars 2006 ; qu'elle joint le tableau correspondant précisant la date du transport, le nom de la personne transportée, la commune de départ et la commune d'arrivée, le nombre de kilomètres facturés et le nombre de kilomètres relevés sur le site Michelin et le préjudice résultant de la surfacturation ; que si ce tableau fait apparaître quelques anomalies en matière de distance facturée par Melle B. à l'occasion de certains transports, il met également en évidence des incohérences de la part de la caisse en ce qui concerne les 72 transports du passager Fraga M. qui constituent l'essentiel de la vérification ; que Melle Béatrice B. a ainsi facturé ce transport sur la base de 15 km ainsi que la caisse l'avait recommandé à l'occasion du contrôle effectué par elle sur l'activité de Melle Cristel B. (qui a transporté ce même passager et qui facturait à tort 31 km) ; que l'on recherche dès lors vainement quelle faute a pu commettre Melle Béatrice B. qui a facturé 15 km ; que les autres manquements ne constituent pas une violation grave ou répétée au sens des dispositions contractuelles ; que la cour relève également que Melle Béatrice B. n'a fait l'objet d'aucune mise en demeure préalable à la rupture ; qu'il convient en conséquence de dire la rupture abusive et d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Considérant que Melle B. réclame la somme de 45 000 € à titre de dommages intérêts en détaillant ainsi son préjudice : elle a poursuivi son activité de transport d'enfants sans être payée jusqu'à la décision du tribunal des affaires de sécurité sociale et il en est résulté un chiffre d'affaire d'un montant de 34 395,21 € sur lequel aucun remboursement n'a été accordé par l'organisme social ; elle est en déficit de 15 136 € ,

Considérant que si Melle B. est bien fondée à solliciter la réparation de son préjudice du fait de la rupture abusive, l'indemnisation sollicitée à hauteur de la somme de 45 000 € est sans lien avec la faute commise par la caisse ; qu'en effet, en continuant de son propre chef à réaliser des transports sanitaires alors que le contrat était résilié, Melle B. a participé, dans une large mesure à la réalisation de son préjudice ; que la cour dispose d'éléments suffisants, compte tenu des circonstances de l'espèce, pour dire que le préjudice, toutes causes confondues, lié à la rupture sera intégralement réparé par l'allocation de la somme de 6000 € correspond à la perte des facturations des transports effectués jusqu'à la date anniversaire de la signature de la convention ; que le surplus de la demande doit être rejeté comme non fondé ;

Considérant que l'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile au profit de l'appelante dans la mesure prévue au dispositif du présent arrêt ; que cette même demande doit être rejetée en ce qu'elle émane de la caisse ;

PAR CES MOTIFS,

La COUR,

Statuant publiquement, par arrêt RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE,

INFIRME le jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale du Val d'Oise le 25 novembre 2008,

Et statuant à nouveau,

DIT que la rupture du contrat intervenue à titre de sanction est abusive,

CONDAMNE en conséquence la Caisse primaire d'assurance maladie du Val d'Oise à payer à Melle Béatrice B. la somme de 6000 € à titre de dommages intérêts avec intérêts au taux légal à compter de la date du présent arrêt,

DÉBOUTE les parties du surplus de leurs prétentions,

CONDAMNE la Caisse primaire d'assurance maladie du Val d'Oise à payer à Melle Béatrice B. une indemnité d'un montant de 1800 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Arrêt prononcé par Mme Jeanne MININI, président, et signé par Mme Jeanne MININI, président et par Mme Sabrina NIETRZEBA CARLESSO, Greffier présent lors du prononcé.

Le GREFFIER, Le PRÉSIDENT,

Composition de la juridiction : Madame Jeanne MININI,  Romuald SAYAGH, Michel GRAVISSE

Décision attaquée : TASS Pontoise, Versailles 25 novembre 2008

Dalloz jurisprudence © Editions Dalloz 2011

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