Interpellation policière : les violences doivent être strictement nécessaires et proportionnées

Publié le Modifié le 25/01/2014 Vu 2 093 fois 0
Légavox

9 rue Léopold Sédar Senghor

14460 Colombelles

02.61.53.08.01

En droit français, l'interpellation est régie par la combinaison des articles 53 et 73 du code de procédure pénale, elle est donc constamment utilisée par les forces de police et de gendarmerie dès lors qu'ils agissent dans le cadre d'une enquête de flagrance.

En droit français, l'interpellation est régie par la combinaison des articles 53 et 73 du code de procédure

Interpellation policière : les violences doivent être strictement nécessaires et proportionnées

Si certaines interpellations se déroulent sans bavures, d'autres donnent lieu à de plus amples difficultés notamment en raison de la résistance que peut opposer les interpellés. C'est dans ce contexte que la Cour européenne s'est vu confiée une affaire dans laquelle, un individu interpellé avait été victime de violences policières : Dans cette affaire les gendarmes avaient ordonné à l'individu de sortir de son véhicule et de mettre les mains dans le dos afin qu'il puisse être menotté. Or ce dernier, avait opposé une résistance passive en refusant d'obtempérer. Les gendarmes l'avaient donc sorti de force du véhicule pour enfin le maintenir au sol par une clé de bras. Or un des gendarmes avait trouvé opportun de matraquer le bras de l'interpellé avec sa matraque télescopique en même temps que du maintient au sol. A la suite de l'interpellation, l'individu a subi plusieurs blessures entrainant une interruption temporaire de travail pendant 5 jours. Il avait donc préalablement saisi les juridictions nationales pour obtenir réparation de son préjudice.

Les juridictions nationales, tout en relevant qu'il y avait eu effectivement des violences exercées par les gendarmes, avaient jugé que celles-ci avaient été strictement nécessaires et proportionnées à la nécessité de procéder à l'interpellation. Les recours internes ayant été épuisés, il ne restait plus qu'une solution : saisir la Cour européenne des droits de l'homme. L'individu saisi donc la juridiction en invoquant une violation de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Un article qui interdit l'administration de traitements inhumains et dégradants. Si l'article 3 est un des rares articles qui ne prévoit pas de limitation au droit qu'il consacre, la jurisprudence de la Cour admet que les forces de l'ordre peuvent user de la violence pour arrêter un individu mais seulement si celles- ci sont strictement nécessaires et proportionnées. Pour déterminer si ces conditions sont bien réunies, la Cour opère sa traditionnelle appréciation in concreto : elle compare le comportement du requérant ( s'il s'agit d'une résistance active ou passive, le degré de résistance ) aux moyens employés par les forces de l'ordre, voir par ex : CEDH 12 oct. 2010, Karatepe c. Turquie; 

Or en l'espèce, elle constate que l'intéressé n'a opposé qu'une résistance passive et qu'une fois au sol, il n'a rien fait de plus que se débattre. Par conséquent, le seul maintient en force aurait suffit à procéder à son interpellation. Pour la Cour, les conditions de nécessité et de proportionnalité ne sont donc pas remplies.

Par conséquent, elle décide de condamner la France pour violation de l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme dans l'arrêt CEDH 3 oct. 2013, Douet c. France, req. n° 16705/10

Cet arrêt vient recadrer une politique souvent trop laxiste des juridictions françaises en ce qui concerne les violences policières et l'appréciation des conditions de nécessité et de proportionnalité. Les juridictions françaises sont souvent réticentes à mettre en cause les forces de l'ordre mais les voilà prévenues. Avec cet arrêt, la Cour vient renforcer l'effectivité de l'article 3 de la Convention et les juridictions françaises auront tout intérêt à durcir leur position et à veiller à ce que les conditions de nécessité et de proportionnalité soient strictement appliquées. Si tel n'est pas le cas, elles se doivent de punir les responsables comme l'avait déjà rappelé la Cour européenne dans son arrêt McCann et autres c. Royaume-Uni de 1995. 

Pour toute question rendez vous sur http://info-juriste.com/

Vous avez une question ?

Posez gratuitement toutes vos questions sur notre forum juridique. Nos bénévoles vous répondent directement en ligne.

Publier un commentaire
Votre commentaire :
Inscription express :

Le présent formulaire d’inscription vous permet de vous inscrire sur le site. La base légale de ce traitement est l’exécution d’une relation contractuelle (article 6.1.b du RGPD). Les destinataires des données sont le responsable de traitement, le service client et le service technique en charge de l’administration du service, le sous-traitant Scalingo gérant le serveur web, ainsi que toute personne légalement autorisée. Le formulaire d’inscription est hébergé sur un serveur hébergé par Scalingo, basé en France et offrant des clauses de protection conformes au RGPD. Les données collectées sont conservées jusqu’à ce que l’Internaute en sollicite la suppression, étant entendu que vous pouvez demander la suppression de vos données et retirer votre consentement à tout moment. Vous disposez également d’un droit d’accès, de rectification ou de limitation du traitement relatif à vos données à caractère personnel, ainsi que d’un droit à la portabilité de vos données. Vous pouvez exercer ces droits auprès du délégué à la protection des données de LÉGAVOX qui exerce au siège social de LÉGAVOX et est joignable à l’adresse mail suivante : donneespersonnelles@legavox.fr. Le responsable de traitement est la société LÉGAVOX, sis 9 rue Léopold Sédar Senghor, joignable à l’adresse mail : responsabledetraitement@legavox.fr. Vous avez également le droit d’introduire une réclamation auprès d’une autorité de contrôle.

A propos de l'auteur
Blog de Camille CIMENTA

M.Camille CIMENTA, élève avocat au barreau de Bordeaux, spécialisé en droit du travail, droit civil, droit pénal et droit des sociétés. 

Retrouvez-nous sur les réseaux sociaux et sur nos applications mobiles