La loi sur le mariage pour tous publiée au JO le 18 mai 2013 ne cesse de faire couler l’encre. Pour rappel, cette loi ouvre le mariage aux personnes du même sexe ainsi que la voie de l’adoption.
Dès la publication de la loi, les maires ont fait falloir leur droit à l’objection de conscience pour refuser de célébrer les mariages de personnes du même sexe. L’objection de conscience est un acte de refus d’accomplir un acte personnel qui serait en contradiction avec des impératifs religieux ou moraux. Il s’agit d’un droit qui découle de la liberté de religion, d’opinion et de croyance garantie par l’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme mais aussi par l’article 10 de la Déclaration universelle des droits de l’homme et du citoyen intégrée au bloc de constitutionnalité. Or la loi sur le mariage pour tous ne prévoit aucune application de l’objection de conscience des maires, obligeant ces derniers sans exception à faire appliquer la loi. C’est ainsi que le collectif des maires et adjoints opposés à cette réforme avait saisi le Conseil constitutionnel le 8 octobre dernier par le biais d’une QPC. Celle-ci avait été jugée recevable eu égard à son caractère sérieux et à la question nouvelle qu’elle soulevait.
C’est ainsi que le Conseil des sages devait alors déterminer si la loi sur le mariage pour tous, en ne prévoyant pas la possibilité pour les maires d’exercer leur objection de conscience était conforme ou pas à l’article 10 de la DDHC et donc à la Constitution. Il vient tout juste de se prononcer dans une décision du 18 octobre 2013 : Il déclare expressément la loi conforme à la Constitution et vient rejeter ainsi toute possibilité pour les maires d’invoquer leur objection de conscience. Il vient juger que si le législateur n’a pas prévu cette faculté pour les maires c’est à juste titre pour « assurer l’application de la loi par ses agents et garantir ainsi le bon fonctionnement et la neutralité du service public de l’état civil ».
Le collectif des maires a annoncé tout de suite qu’il n’allait pas en rester là et saisir la Cour européenne des droits de l’homme sur la question. Mais on peut s’interroger sur le fondement et l’opportunité d’une telle action. Or la décision du Conseil constitutionnel est tout à fait justifiée d’un point de vue juridique. L’Etat ainsi que tous les agents exerçant une mission de service public sont tenus d’une obligation de neutralité. Une telle obligation se définie négativement comme le fait de ne jamais influencer le public sur une croyance ou une opinion. Or, les maires qui sont des agents de l’Etat investis d’une mission de service public sont donc parfaitement soumis à cette obligation de neutralité. Cette position est tout à fait conforme avec celle de la Cour européenne des droits de l’homme. En effet celle- ci a déjà eu à se prononcer sur la question de l’objection de conscience notamment à travers l’arrêt Ladele. Dans cette affaire il s’agissait d’une greffière qui avait refusé d’unir un couple homosexuel invoquant son objection de conscience et sa liberté d’exercer sa religion. Or la Cour n’a pas suivi ce raisonnement, elle a jugé que la politique d’égalité des chances instaurée par l’employeur poursuivait un but légitime permettant une restriction à la liberté religieuse. D’autre part, il faut rappeler que la Cour reste très peu tolérante envers les discriminations fondées sur l’orientation sexuelle et ce d’autant plus qu’elle doit faire respecter l’article 14 de la Convention qui interdit toutes discriminations fondées sur la religion, l’ethnie ou le sexe.
Il faut donc en conclure qu’il est fort probable que l’action des maires soit peine perdue.
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