Pour rappel, la prise d'acte consiste pour le salarié à rompre son contrat de travail en reprochant à l'employeur d'avoir commis des manquements législatifs, conventionnels ou contractuels. Une fois le contrat rompu, le salarié peut alors saisir le conseil des prud'hommes. Ce dernier, s'il reconnait l'existence des griefs requalifiera la démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse ce qui permettra au salarié de toucher une indemnité dans la plus part des cas égales à 6 mois de salaires.
En l'espèce, il s'agissait d'un VRP qui avait notifié à l'employeur son départ à la retraite par une lettre qui énonçait des griefs envers ce dernier. Le salarié reprochait notamment à l'employeur d'avoir modifié unilatéralement les taux de commissions des trois dernières années. A la suite de son départ, le salarié a donc saisie la juridiction prud'homale aux fins de requalification de la démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il obtient gain de cause devant les juges du fond. L'employeur décide alors de se pourvoir en cassation. Ce dernier invoquait notamment le fait que la démission du salarié pour départ à la retraite était non équivoque et indépendante des griefs allégués contre lui. Il invoquait le fait que le salarié avait notamment rempli un formulaire concernant ses droits à la retraite.
La Cour de cassation devait donc déterminer d'une part si la démission avait été non équivoque et indépendante des griefs allégués contre l'employeur et d'autre part si la modification unilatérale du taux des commissions était suffisamment grave pour justifier une prise d'acte aux torts de l'employeur.
La chambre sociale répond positivement et approuve les juges du fond. Elle énonce que " attendu que le départ à la retraite du salarié est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail ; que lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l’annulation de son départ à la retraite, remet en cause celui-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s’il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de son départ qu’à la date à laquelle il a été décidé, celui-ci était équivoque, l’analyser en une prise d’acte de la rupture qui produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d’un départ volontaire à la retraite "
Or en l'espèce, elle juge que la modification unilatérale des taux de commission par l'employeur caractérisait bien "une modification unilatérale du contrat qui était de nature à faire obstacle à l'exécution de la mission du salarié".
La solution est tout à fait logique et cohérente avec la jurisprudence antérieure. On le sait la rémunération étant un élément essentiel du contrat de travail, elle ne peut être modifiée sans l'accord du salarié. Or en l'espèce, la modification des taux de commission était bien une modification de la rémunération.