C'est un peu l'éloge du noeud papillon, d'une certaine idée de la France.
J'ai été profondément affecté par la nouvelle de la disparition du professeur de droit public Jacques BOURDON, ancien directeur de l'Institut d'études politiques d'Aix-en-Provence.
Cet homme élégant et exigeant m'avait fait l'honneur de diriger mes recherches en quatrième année de droit, me transmettant le goût de la discipline intellectuelle, de la sobriété dans la rédaction et enfin l'exigence de la clarté du raisonnement.
Davantage que par des matières, l'on est charmé, séduit par la brillance de l'esprit d'un enseignant. Celui-là portait quotidiennement le noeud papillon et déclamait debout, sans microphone, son cours de droit des collectivités territoriales avec tant de charisme et de facilité que nous buvions tous ses paroles. Ceci dans un amphithéâtre bondé mais ordonné, au sein duquel les retards n'étaient pas tolérés et qui donnait à ressentir l'ambiance d'une vieille France aux accents de quatrième République... Jacques BOURDON professait et délivrait sa vérité universitaire et même parfois politique.
Prônant la nécessité de "siffler la fin de la récréation" en matière de décentralisation, celui-ci était l'auteur de l'ouvrage de référence dans le domaine, avec les professeurs PONTIER et RICCI, qui incarnent toujours l'excellence et l'expertise de la faculté de droit et de science politique d'Aix.
Tous ne comprenaient pas forcément mon admiration pour celui-ci mais je n'en étais que plus heureux car j'avais l'occasion de l'accaparer au sommet d'une carrière de juriste reconnu comme l'un des plus grands de l'époque contemporaine en droit administratif. Au-delà de l'enseignant agrégé en droit public, je tenais à honorer la mémoire d'un incroyable être humain, peu accessible mais toujours disponible tant il aimait les étudiants, sans aucun doute.
Je suis, je l'ai dit, profondément troublé par sa disparition. Avec elle, une partie de ma propre vie s'en va.