Le Harcèlement sexuel au travail : L'élément intentionnel à l'épreuve

Publié le 22/04/2020 Vu 1 602 fois 0
Légavox

9 rue Léopold Sédar Senghor

14460 Colombelles

02.61.53.08.01

L’interprétation du droit du travail par la jurisprudence peut soit accentuer la protection du salarié, soit au contraire l’amoindrir. La Cour a favorisé cette protection dans une affaire de harcèlement sexuel. Cass. Soc. 25 mars 2020

L’interprétation du droit du travail par la jurisprudence peut soit accentuer la protection du salarié, so

Le Harcèlement sexuel au travail : L'élément intentionnel à l'épreuve

Le Harcèlement sexuel au travail – pas d’élément intentionnel pour annuler le licenciement .

 

Dans un contrat de travail, l’employeur et le salarié ne sont pas sur un rapport d’égalité. Le lien de subordination qui lie l’employeur à son salarié, place le salarié sous les ordres de son employeur.

Le code du travail tente de rééquilibrer le rapport en posant des règles visant la protection du salarié.

L’interprétation du droit du travail par la jurisprudence peut soit accentuer la protection du salarié, soit au contraire l’amoindrir.

En l’espèce, la Cour de Cassation a été favorable à cette protection dans une affaire portant sur des faits de harcèlement sexuel.

 

I-                    Définition du harcèlement sexuel :

Quant le harcèlement sexuel se rencontre dans le monde du travail, le fondement juridique de cette infraction repose sur deux codes : le code pénal et le code du travail.

a)      Du code pénal :

Le harcèlement sexuel est défini à l’article 222-33 du code pénal :

« I. - Le harcèlement sexuel est le fait d'imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.

L'infraction est également constituée :

1° Lorsque ces propos ou comportements sont imposés à une même victime par plusieurs personnes, de manière concertée ou à l'instigation de l'une d'elles, alors même que chacune de ces personnes n'a pas agi de façon répétée ;

2° Lorsque ces propos ou comportements sont imposés à une même victime, successivement, par plusieurs personnes qui, même en l'absence de concertation, savent que ces propos ou comportements caractérisent une répétition.

II. - Est assimilé au harcèlement sexuel le fait, même non répété, d'user de toute forme de pression grave dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l'auteur des faits ou au profit d'un tiers.

III. - Les faits mentionnés aux I et II sont punis de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende.

Ces peines sont portées à trois ans d'emprisonnement et 45 000 € d'amende lorsque les faits sont commis :

1° Par une personne qui abuse de l'autorité que lui confèrent ses fonctions ;

2° Sur un mineur de quinze ans ;

3° Sur une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de leur auteur ;

4° Sur une personne dont la particulière vulnérabilité ou dépendance résultant de la précarité de sa situation économique ou sociale est apparente ou connue de leur auteur ;

5° Par plusieurs personnes agissant en qualité d'auteur ou de complice ;

6° Par l'utilisation d'un service de communication au public en ligne ou par le biais d'un support numérique ou électronique ;

7° Alors qu'un mineur était présent et y a assisté ;

8° Par un ascendant ou par toute autre personne ayant sur la victime une autorité de droit ou de fait. »

b)      Du code du travail :

Le Code du travail prévoit expressément la situation de harcèlement sexuel dans son article 1153-1 en indiquant :

« Aucun salarié ne doit subir des faits :

1° Soit de harcèlement sexuel, constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ;

2° Soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l'auteur des faits ou au profit d'un tiers. »

 

II-                  L’application des textes par les juges :

La notion de harcèlement sexuel est partagée entre deux juges : le juge pénal et le juge civil.

Les règles qui s’imposent à chacun d’eux ne sont pas les mêmes et emportent une appréciation différente de la notion de harcèlement sexuel.

a)      Selon le juge pénal :

Le Juge pénal appréciera la notion de harcèlement sexuel selon les principes du droit pénal et notamment :

-          L’interprétation strict du droit pénal (article 111-4 du code pénal)

-          Le délit est une infraction intentionnelle sauf si la loi en dispose autrement (article 121-3 du code pénal)

 b)      Selon le juge civil :

Le Conseil des Prud’hommes est soumis à la procédure civile. Or, en droit civil, l’interprétation d’un texte est possible par le juge dès lors où l’interprétation qui en est faite tend à mettre en application l’esprit de la loi.

 

Ainsi, selon le juge saisi, l’appréciation de cette notion de harcèlement sexuel sera différente.

 

III-                La position de la Cour de cassation :

La Cour de Cassation, dans son arrêt en date du 25 mars 2020, illustre cette différence entre le juge pénal et le juge civil.

a)      Les faits de l’espèce :

Dans l’affaire qui a été soumise à la Cour de cassation, il s’agissait d’une salariée engagée en qualité d’assistante dentaire le 12 juillet 2012 aux termes d’un contrat de professionnalisation.

Le 25 octobre 2013, la salariée a été licenciée pour faute grave.

Invoquant un harcèlement sexuel de la part de son employeur, elle conteste son licenciement devant le Conseil des Prud’hommes.

Parallèlement, une procédure pénale avait été engagée et l’employeur était poursuivi pour les faits de harcèlement sexuel. Mais le Tribunal Correctionnel a relaxé l’employeur des faits de harcèlement sexuel, considérant que l’élément intentionnel du délit n’était pas caractérisé.

Sur le plan prud’homal, le juge a annulé le licenciement de la salariée retenant qu’elle avait été victime de faits de harcèlement sexuel.

b)      La décision de la Cour de Cassation

L’employeur a intenté un pourvoi en cassation.

La Cour de Cassation a rendu l’arrêt du 25 mars 2020, publié au bulletin et dans lequel elle retient «  c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que la décision du juge pénal, qui s'est borné à constater l'absence d'élément intentionnel, ne privait pas le juge civil de la possibilité de caractériser des faits de harcèlement sexuel de la part de l'employeur »

 

IV-                Deux définitions différentes du harcèlement moral

Ainsi, la Cour de cassation retient deux définitions différentes du harcèlement moral en fonction de la juridiction saisie :

-          En droit pénal, le harcèlement sexuel est un délit et le juge pénal doit caractériser l’existence de l’élément intentionnel de son auteur.

 

-          En droit du travail, la Cour de cassation considère en revanche que le juge prud’homal n’a pas à caractériser l’élément intentionnel du délit pour annuler le licenciement.

En cela, la Cour rejoint l’interprétation qu’elle avait donné également du harcèlement moral issu de l’article 1152-1 du code du travail pour lequel elle considère qu’il n’est pas utile de relever l’existence d’une intention de nuire.

 

Si vous pensez subir des faits de harcèlement que ce soit moral ou sexuel, vous pouvez prendre contact avec le Cabinet d’Avocat de Maître Delphine ROBINE qui vous accompagnera dans toutes les démarches judiciaires.  

 

Vous avez une question ?

Posez gratuitement toutes vos questions sur notre forum juridique. Nos bénévoles vous répondent directement en ligne.

Publier un commentaire
Votre commentaire :
Inscription express :

Le présent formulaire d’inscription vous permet de vous inscrire sur le site. La base légale de ce traitement est l’exécution d’une relation contractuelle (article 6.1.b du RGPD). Les destinataires des données sont le responsable de traitement, le service client et le service technique en charge de l’administration du service, le sous-traitant Scalingo gérant le serveur web, ainsi que toute personne légalement autorisée. Le formulaire d’inscription est hébergé sur un serveur hébergé par Scalingo, basé en France et offrant des clauses de protection conformes au RGPD. Les données collectées sont conservées jusqu’à ce que l’Internaute en sollicite la suppression, étant entendu que vous pouvez demander la suppression de vos données et retirer votre consentement à tout moment. Vous disposez également d’un droit d’accès, de rectification ou de limitation du traitement relatif à vos données à caractère personnel, ainsi que d’un droit à la portabilité de vos données. Vous pouvez exercer ces droits auprès du délégué à la protection des données de LÉGAVOX qui exerce au siège social de LÉGAVOX et est joignable à l’adresse mail suivante : donneespersonnelles@legavox.fr. Le responsable de traitement est la société LÉGAVOX, sis 9 rue Léopold Sédar Senghor, joignable à l’adresse mail : responsabledetraitement@legavox.fr. Vous avez également le droit d’introduire une réclamation auprès d’une autorité de contrôle.

Retrouvez-nous sur les réseaux sociaux et sur nos applications mobiles