L'homicide involontaire est l'une des notions complexes du droit pénal.
Sous cette qualification juridique se cachent la plupart des morts causées de manière involontaire. Le prévenu n'a pas voulu donner la mort et n'a pas non plus voulu effectuer le geste qui est à l'origine de celle-ci.
Elle se distingue donc du meurtre (donner la mort à autrui avec la volonté de le faire) et des blessures ayant entraîné la mort sans intention de la donner (le prévenu veut effectuer un acte de violences mais ne souhaite pas donner la mort).
La concrétisation de cet homicide involontaire, dans les médias et dans le grand public, est ce qui est appelé "accident". Le prévenu n'a pas fait exprès de donner la mort.
Le droit pénal appelle la démonstration d'une culpabilité. C'est au Ministère Public de rapporter la preuve d'une faute.
En la matière, cette faute peut prendre diverses formes, tel que l'article 221-6 du Code pénal l'exige: une imprudence, une négligence, une inattention, une maladresse la violation d'une obligation de sécurité ou de prudence prévue par la loi ou le règlement.
Autant dire que le législateur a prévu large pour recouvrir toutes les situations, ce qui semble manifestement défavorable aux prévenus.
Toutefois, être poursuivi pour homicides ou blessures involontaires (le raisonnement est similaire) ne revient pas à être condamné à l'avance.
En effet, le Ministère Public doit démontrer une faute, comme rappelé plus haut. Mais cette faute doit être appréciée in concreto, c'est à dire en étudiant précisément quelles étaient les circonstances.
L'article 121-3 du Code pénal reprend cette exigence. Pour caractériser une faute, il faut pouvoir prouver qu'une même personne, placée dans les mêmes conditions, et ayant eu les mêmes pouvoir et les mêmes compétences, aurait fait mieux.
Autrement dit, ce n'est pas car le prévenu aurait échoué là où d'autres auraient réussi que la faute est constituée.
Exemple: Prenons l'hypothèse d'un accident de la circulation dans lequel le prévenu aurait renversé un cycliste. Les conditions climatiques sont épouvantables. Pluie. Vent. Obscurité totale. Pour démontrer la faute, le Ministère Public prétend que le prévenu aurait dû éviter le cycliste puisque, 200 mètres avant, un autre automobiliste avait réussi cette manoeuvre.
L'argument est bon. Il est juridique et semble applicable à l'espèce.
Cependant, l'automobiliste qui évitait le cycliste étaient entendu et disait qu'à l'endroit où il était, la visibilité avait été meilleure. Pourquoi? Car il conduisait un camion qui avait des phares plus puissants que ceux du prévenu, qui lui avaient permis de voir ce que le second n'avait pas vu apercevoir. Il ajoutait que la route était plate.
Or, le prévenu ne conduisait qu'une simple voiture, avec des phares moins puissants, à un endroit où la route n'était pas plate mais descendait avant de remonter.
Aussi, les conditions de visibilité n'étaient-elles pas les mêmes. Aussi, le premier avait-il eu plus de moyens matériels que le second pour éviter l'accident.
C'est à ce titre que la défense plaidait la relaxe en s'appuyant sur le fait que les conditions, les moyens et les compétences n'étaient pas les mêmes.
On ne pouvait fonder une condamnation sur le fait qu'un autre ait réussi à éviter le drame.
Cet exemple est l’illustration parfaite de la manière dont une défense de qualité peut retourner une situation pourtant très mal embarquée.
C'est également la preuve que la culpabilité n'est jamais acquise et que le droit pénal, aussi factuel soit-il, nécessite une grande rigueur et une bonne défense.
La défense a obtenu la relaxe.
Par Maître Antoine Regley
Avocat au Barreau de Lille, partenaire du Cabinet d'AVocats Renaissance