Pouvez vous vous opposer au changement de votre lieu de votre travail ?
Un récent arrêt de la Cour de cassation vient de rappeler les limites du refus que peut opposer un salarié à son employeur .
Plusieurs situations peuvent se produire :
- Votre lieu de travail est mentionné à titre indicatif dans votre contrat de travail ou n'est pas mentionnée :
Lire très attentivement les termes de la clause de votre contrat de travail . En effet selon les tribunaux la mention du lieu de travail dans le contrat de travail a valeur de simple information. ( Sauf si cette clause précise que le salarié n'exécutera son travail que dans ce lieu ....)
En l’absence d’une clause précisant que vous exécuterez votre travail exclusivement dans tel ou tel lieu et dès lors que le changement de localisation intervient dans le même secteur géographique il y a simple modification de vos conditions de travail et non modification de votre contrat de travail.
Cette modification s'imposera à vous . A défaut d'exécution de votre part vous pourrez être licencié pour faute.
Mais comment apprécier si la mutation est faite dans le même secteur géographique que votre lieu de travail initial ?
Les tribunaux apprécient au cas par cas...
Les tribunaux peuvent retenir pour fonder leur décision notamment :
- la distance séparant le domicile de l'ancien lieu de travail au nouveau
- le temps que mettra le salarié pour se rendre à son nouveau lieu de travail par rapport à la situation antérieure
- l'existence ou non de transports en commun etc...
Il a été jugé par exemple que le contrat de travail a été modifié pour un salarié muté de Paris (9e arrondissement) à Roissy (Val-d’Oise) (cass. soc. 15 juin 2004, n° 01-44707 FPD).
En revanche la mutation située dans un village voisin n'a pas été jugée comme une modification du contrat de travail (En cas de mutations géographiques successives, le dernier transfert du lieu de travail doit être apprécié par rapport au lieu de travail résultant du transfert immédiatement précédent et non par rapport au lieu de travail initial mentionné dans le contrat de travail).
Le juge doit apprécier la situation de manière objective . Il ne doit pas tenir compte de la situation personnelle du salarié ( par exemple s'il a ou non un véhicule pour se déplacer sauf et c'est important pour apprécier la gravité du refus du salarié d'une modification qui s'impose à lui..)
Attention aux mutations temporaires :
Les tribunaux ont tendance à juger que les mutations temporaires en dehors du même secteur géographique tel qu'ils peuvent l'apprécier constituent des modifications des conditions de travail et s'imposent donc aux salariés. ( les circonstances de fait sont également examinées : délai de prévenance respecté par l'employeur , fonctions du salarié etc...)
Si le changement de lieu de travail ne constitue qu’un simple changement des conditions de travail, votre refus justifie votre licenciement pour faute .
Mais commettez vous une faute simple ou bien une faute grave qui va supprimer vos droits à préavis et indemnité de licenciement ?
la Cour de cassation a considéré dans un arrêt récent que le refus justifiait le licenciement du salarié pour faute grave, car il le rendait responsable de l'inexécution du préavis qu'il refusait d'exécuter aux nouvelles conditions ( Cass. soc. 21 avril 2010, n° 09-40912 D.)
- Votre lieu de travail est mentionné de manière exclusive dans votre contrat de travail et les mutations temporaires sont également " encadrées ".
Si l'employeur ne respecte pas les termes de la clause de votre contrat il y a modification du contrat de travail, et dans ce cas vous n'êtes pas obligé d’accepter le nouveau lieu de travail ou la mutation temporaire.
Votre employeur doit solliciter votre accord y compris dans les cas où la modification est prononcée à titre disciplinaire. Cet accord doit être explicite et non équivoque. Il ne saurait se déduire de la poursuite par le salarié du travail aux nouvelles conditions ou de son silence ( Une clause du contrat de travail ne peut pas réserver la possibilité à l’employeur de modifier unilatéralement le contrat de travail. Une telle clause est nulle et de nul effet ).
Votre refus ne constitue pas une faute professionnelle, mais il peut néanmoins avoir des conséquences néfastes. En effet, face à une réponse négative, l'employeur peut abandonner les modifications mais il peut également entreprendre un licenciement. Celui-ci ne sera pas motivé par le refus mais par la cause qui est à l'origine de la modification proposée. Ainsi, si la modification proposée avait pour but de faire face à des difficultés économiques, alors l'employeur pourra entreprendre un licenciement pour motif économique.
La procédure à suivre est celle du licenciement pour motif personnel, voire disciplinaire, quand la modification est prononcée à titre de sanction et que le salarié l’avait refusée sans que l’employeur ait opté pour une autre sanction.
Le licenciement prononcé suite à un refus du salarié n’est justifié que si la modification est elle-même justifiée. En effet, le seul refus d’un salarié d’accepter une modification ne constitue pas en soi une cause réelle et sérieuse de licenciement
Pendant le préavis, l’employeur ne peut pas imposer une modification du contrat de travail. Sinon, le salarié se trouve délié de son obligation d’exécuter le préavis et l’indemnité compensatrice de préavis lui est due.
Les développements ci dessus ne sont pas exhaustifs .....( notamment le cas des salariés protégés n'est pas envisagé.)
En cas de difficulté sur ce point je ne saurais trop vous conseiller de prendre conseil auprès d' un professionnel du droit qui pourra vous apporter un conseil éclairé sur vos droits .