Dans cet arrêt de cassation partielle rendu par la Chambre sociale le 6 juin 2022, la Cour de cassation vient préciser la portée de l'article L.1226-12 du code du travail, et notamment le cas où le médecin du travail mentionne de manière expresse le fait que tout reclassement dans l'emploi peut être préjudiciable pour la santé du salarié(e).
En l'espèce, une salariée, suite à un accident du travail survenu le 6 novembre 2017, est déclarée inapte à son poste par le médecin du travail. Ce dernier précise dans l'avis que "l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi". Dès lors, l'employeur est contraint de la licencier pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
La salariée conteste ainsi la décision de l'employeur, et la Cour d'appel de Chambéry fait droit à ses demandes en condamnant l'employeur à un ensemble de sommes résultant notamment du défaut de consultation des délégués du personnel. L'employeur forme dès lors un pourvoi en cassation, axé autour de trois moyens, dont le premier étant écarté par la Cour de cassation.
- Premièrement, l'employeur fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à verser à la salariée une somme résultant de l'absence de consultation des délégués du personnel. en effet, ni l'article L.1226-10 ni l'article L.1226-12 du code du travail impose à l'employeur de consulter les délégués du personnel lorsque le licenciement d'un salarié est provoqué par l'impossibilité de reclassement dans l'emploi.
- Deuxièmement, le demandeur conteste la somme qu'il doit verser au titre des congés payés rattachés à l'indemnité compensatrice de préavis. Selon lui, l'indemnité compensatrice prévue par l'article L.1226-14 du code du travail n'est pas égale à l'indemnité de préavis prévue par le régime du licenciement.
La leçon principale de cet arrêt porte ainsi sur le premier moyen. En effet, sur le second moyen, la Cour de cassation casse l'arrêt de la cour d'appel au motif que "l'indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis n'a pas la nature d'une indemnité de préavis et n'ouvre pas droit à congés payés". Ainsi, la chambre sociale devait principalement répondre à la question suivante :
L'employeur est-il tenu de consulter les délégués du personnel, ici le comité social et économique, même lorsque l'avis du médecin du travail indique expressément que le reclassement dans l'emploi peut porter préjudice à la santé du salarié(e) ?
Dans sa solution, les juges suprêmes rappellent d'abord que la proposition de reclassement faite par l'employeur doit se conformer à l'avis des délégués du personnel et celui du médecin du travail si ce dernier estime que l'état de santé du salarié(e) est compatible avec le nouvel emploi. L'apport nouveau de cet arrêt est donc lorsque le médecin du travail mentionne que l'état de santé du salarié(e) fait obstacle à tout reclassement dans l'emploi. Dans ce cas, l'employeur n'a pas l'obligation de consulter les délégués du personnel.
En résumé :
- Reclassement dans l'emploi possible : Obligation pour l'employeur de consulter les délégués du personnel.
- Reclassement dans l'emploi impossible en raison de l'état de santé du salarié(e) : Pas d'obligation pour l'employeur de consulter les délégués du personnel.