Cette garantie est régie par les dispositions de l’article L. 80 B du livre des procédures fiscales.
Le recours à cette procédure est relativement peu courant en France, contrairement au « ruling » anglo-saxon qui est très fréquemment mis en œuvre.
Certains contribuables français sont en effet méfiants à l’idée d’exposer leur situation personnelle auprès de l’administration fiscale, craignant de faire l’objet par la suite d’un contrôle.
C’est pourtant une procédure très utile pour obtenir une prise de position formelle de l’administration fiscale sur le traitement applicable à telle opération ou à tel projet.
C'est une véritable source de sécurité juridique.
D’autant que, contrairement à certaines idées reçues, le rescrit fiscal n'a pas pour vocation à dégénérer en une quelconque sanction.
Cela étant, après avoir exposé ci-après les modalités pratiques de cette garantie, nous analyserons brièvement les différents types de rescrits qui existent en France.
1) Modalités de la procédure de rescrit fiscal
La garantie prévue par l’article L.80 B précité du livre des procédures fiscales s’applique à tous les impôts, droits et taxes, recouvrés selon les règles prévues par le code général des impôts.
Pour pouvoir opposer à l'administration fiscale sa prise de position en cas de contrôle ultérieur, il convient que cette prise de position soit formelle (réponse par écrit et signée), qu’elle porte sur l’appréciation d’une situation factuelle au regard d’un texte fiscal, et qu’elle émane par ailleurs d’une autorité compétente susceptible de pouvoir engager les services fiscaux.
Dans sa documentation administrative, il est mentionné que, pour être opposable à l'administration fiscale, la prise de position doit être précise, explicite et non équivoque. Elle doit de surcroît être portée officiellement à la connaissance du contribuable concerné (BOI-SJ-RES-10-20-10 n° 60, 70 et 160).
En pratique, une simple réponse écrite à une question posée via la messagerie sécurisée sur le site impôts.gouv.fr ne constitue pas un rescrit au sens des dispositions de l’article L. 80 B précité du livre des procédures fiscales.
Il est par ailleurs de jurisprudence constante qu’un contribuable ne peut invoquer une prise de position verbale, si celui-ci n’est pas en mesure d’en établir l’existence (CE 18-3-2005 n° 260353, 3e et 8e s.-s., Parise).
Cela étant, l’administration fiscale doit se prononcer sur une situation de fait.
Elle peut ainsi statuer sur la qualification d’une activité professionnelle, la catégorie d’un revenu, la localisation d’une résidence fiscale, etc.
Quoi qu’il en soit, la garantie prévue à l’article L. 80 B précité du livre des procédures fiscales s’applique uniquement si le contribuable concerné est de bonne foi.
Cela implique que la demande qui est présentée à l’administration fiscale soit précise, complète, exacte et sincère.
De surcroît, la situation du contribuable doit être strictement identique à celle ayant fait l’objet de la prise de position formelle de l’administration fiscale.
Si des conditions sont énoncées dans le rescrit, la solution retenue par l’administration fiscale ne serait opposable que si le contribuable remplit ces dernières.
2) Distinction entre le rescrit « général » et les rescrits « spécifiques »
En pratique, il existe deux types de rescrit : le rescrit « général » qui n’est pas prévu par un texte spécial, et les rescrits « spécifiques » qui font l’objet de règles particulières.
Le rescrit « général » est la prise de position formelle « par défaut » de l’administration fiscale, lorsque le contribuable l’interroge sur une situation de fait au regard d’un texte fiscal, sans faire état d'une procédure de rescrit spécifique.
Dans les deux cas, la demande doit être adressée par lettre recommandée avec accusé de réception par le contribuable concerné auprès de la direction dont dépend le service auprès duquel il doit souscrire ses obligations déclaratives (ou, le cas échéant, auprès des services centraux de la DGFIP).
Dans le cadre du rescrit général, l’administration fiscale doit se prononcer en principe dans un délai de trois mois.
Ce délai n’est toutefois pas contraignant, sachant que l’absence de réponse ne peut valoir accord implicite (BOI-SJ-RES-10-20-10 n° 350).
Autrement dit, seule une réponse expresse de l’administration fiscale peut l’engager.
Cela étant, la garantie est plus forte dans le cadre des demandes de rescrit expressément prévues par un texte spécial. Il s’agit des "rescrits spéciaux" prévus par la loi.
A titre de règle de principe, en l’absence de réponse pendant trois mois à une demande de rescrit spécial, ce défaut de réponse vaut accord implicite (article L. 80 B 2° à 7° du livre des procédures fiscales).
Dans certains cas, ce délai est porté à six mois.
Parmi les rescrits spéciaux, il y a ceux relatifs à la qualification d’un revenu (par exemple, le contribuable souhaite savoir si tel ou tel revenu perçu par son foyer fiscal relève de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ou de la catégorie des bénéfices non commerciaux).
Il y a également ceux spécifiques à une donation (rescrit dit « valeur »). A cet égard, le contribuable interroge l’administration fiscale sur la valeur de l’entreprise transmise qui est soumise aux droits de mutation à titre gratuit. En pareille hypothèse, l’administration fiscale dispose d’un délai de six mois pour répondre.
Il est par ailleurs possible d’interroger l’administration fiscale concernant un projet de montage qui pourrait tomber, le cas échéant, sous le coup de l'abus de droit. L’administration fiscale se prononce alors sur la validité ou non de ce montage. Elle dispose d’un délai impératif de six mois pour ce faire.
Cela étant, que le rescrit soit « général » ou « spécifique », si la réponse de l’administration fiscale ne correspond pas aux attentes du contribuable, celui-ci peut exercer un recours devant un organe collégial dans un délai de deux mois (sauf en cas de « rescrit abus de droit »).
Ce recours consiste à demander un second examen de la demande initiale.
L’article L. 80 CB du livre des procédures fiscales précise que ce recours est subordonné à l’absence de présentation d’éléments nouveaux à l’appui de la demande.
L’organe collégial répond de manière définitive à la demande du contribuable, selon les mêmes règles et délais que ceux applicables à la demande initiale.
Il existe par ailleurs une procédure de recours pour excès de pouvoir contre une décision de rescrit, mais celle-ci suppose que la décision entraine des conséquences autres que fiscales qui ne pourraient pas être réparées dans des conditions équivalentes via l’exercice d’un recours de plein contentieux (CE 2e sect. 2 décembre 2016 n°387613 et 387638).
Pour en savoir plus sur la procédure de rescrit, vous pouvez consulter cet article dédié rédigé par nos soins : le rescrit fiscal.
Si vous souhaitez bénéficier de notre expertise pour déposer une demande de rescrit auprès de l’administration fiscale, n’hésitez pas à nous contacter. Nous serions ravis de vous assister et/ou de vous conseiller à ce sujet.
Didier MAJEROWIEZ
Avocat au Barreau de Paris