Lorsque l’on prend en considération les atteintes qu’elle est susceptible de subir (acte déloyaux, concurrence déloyale, parasitisme ou encore contrefaçon), une société devra nécessairement collecter une quantité significative de preuves visant à étayer le dossier de l’avocat.
Cette étape préalable est indispensable pour permettre à l’avocat de la société victime d’agissements déloyaux de solliciter, par la voie d’une ordonnance sur requête, le magistrat compétent. En effet et afin que le juge accorde la désignation d’un huissier et/ou d’un expert pour recueillir les éléments de preuve qui permettront la manifestation de la vérité, la demande de l’avocat devra être suffisamment motivée / motivante.
Considération prise de ce que la demande de l’avocat visant à obtenir une ordonnance sur requête nécessite un faisceau d’indices pour motiver le magistrat, le recours aux services d’un détective privé prend alors tout son sens.
Présentation de la profession de détective privé :
C’est la loi du 18 mars 2003 qui vient modifier la réglementation jusque-là en vigueur. En effet, les nouvelles dispositions législatives vont permettre d’encadrer et de donner un véritable statut aux détectives privés ou enquêteurs de droit privé
La définition officielle de la profession de détective privé est la suivante : « Profession libérale qui consiste, pour une personne à recueillir, même sans faire état de sa qualité, ni révéler l’objet de sa mission, des informations ou renseignements destinés à des tiers en vue de la défense de leurs intérêts ».
Que faut il retenir de cette définition ? Le détective privé est autorisé à collecter des informations, des preuves ou tout autres éléments qui permettrait la manifestation de la vérité sans avoir à divulguer sa qualité ou l’origine de sa démarche. Il s’agit là d’une différence de taille avec la profession d’huissier de justice qui, lui, doit nécessairement se présenter lorsqu’il intervient. Cette prérogative permet ainsi au détective privé d’agir en toute discrétion et ainsi recueillir des informations et/ou éléments dissimulés.
La loi de 2003 a également vocation à fournir un cadre et imposer des garanties à la profession de détective privé. En effet, dans le but d’offrir des garanties concernant la professionnalisation et l’honorabilité d’un détective privé le législateur a souhaité mettre en place un certain nombre de pré requis pour exercer la profession de détective privé. Il est notamment nécessaire de justifier d’une qualification ou d’une expérience professionnelle pour créer une agence de détective privé. En outre, l’exercice de la profession de détective privé est aujourd’hui soumis à l’obtention d’une autorisation d’exercer délivrée par le C.N.A.P.S. qui dépend du ministère de l’intérieur.
En outre, il est maintenant admis que le détective privé est soumis au secret professionnel et doit respecter un code de déontologie.
Concernant les rapports de détectives privés produits devant les juridictions françaises :
L’article 1353 du code civil dispose « Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver … ». Il est ainsi admis que le magistrat, en droit civil, ne dispose pas d’un pouvoir d’instruction comme c’est le cas en matière pénale.
Il convient donc, pour la personne physique ou morale qui entend engager une action en justice, de fournir au magistrat les preuves nécessaires au succès de sa prétention. La question se pose de savoir de quels outils dispose alors le justiciable pour collecter des preuves ?
L’huissier de justice ne dispose pas, à proprement parlé, d’un pouvoir d’enquête même s’il a sa disposition un certain nombre de bases de données qu’il peut consulter pour ses clients. Cet auxiliaire de justice pourra procéder à toutes constatations utiles qui lui seront demandées. Il lui sera en revanche difficile d’intervenir pour dresser un constat s’il ne dispose pas des éléments qui permettront d’orienter ses constatations ou qui détermineront les lieux et heures auxquelles il devra procéder à ces dernières.
L’expert judiciaire a, quant à lui, vocation à intervenir en sa qualité de « sachant » afin de mettre en évidence les différentes responsabilités et donner une évaluation du préjudice subi. Il pourra en outre procéder à des « actes d’enquêtes » dans le cadre d’expertises informatiques qui nécessiteraient l’intervention d’un technicien pour révéler des traces numériques ou récupérer des fichiers effacés.
Le détective privé est, en France, le seul professionnel, dans le domaine privé, qui pourra réaliser les recherches qui permettront de faciliter ultérieurement les interventions des huissiers de justice et/ ou des experts judiciaires dans le cadre des ordonnances sur requête. Il pourra notamment fournir un rapport d’enquête ayant vocation à étayer le dossier de l’avocat à l’appui duquel ce dernier sollicitera l’obtention de ce type d’ordonnance.
En outre, la jurisprudence en matière d’admissibilité des rapports de détective privé comme moyen de preuve est constante. Ainsi un arrêt de la cour d’appel de Caen (4 avril 2002 – 01/01952) rappel clairement la validité de ce moyen de preuve en précisant que « … les éléments recueillis dès avant l'introduction de la présente instance par les constatations effectuées par un détective privé -qui sont admissibles en justice, selon les mêmes modalités et sous les seules mêmes réserves que tout autre mode de preuve … ».
Il n’en reste pas moins que le magistrat auprès duquel est présenté un rapport de détective privé appréciera de manière souveraine la valeur juridique de ce dernier.
Pour conclure, il apparait que les prestations d’enquêtes réalisées par un détective privé dans le cadre des agissements déloyaux par un concurrent pourront s’avérer indispensables afin d’obtenir une ordonnance sur requête et faciliter les interventions des huissiers de justices et experts a postériori.
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