Nous republions cet article, mis à jour après que la Cour d'Appel ait confirmé le jugement de première instance, dans des termes bien plus fermes
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Une cadre dirigeante prépare depuis plus d'une semaine une réunion de travail destinée à préparer un futur conseil d'administration. Elle s'y présente avec les nombreux dossiers qui doivent être discutés, mais son employeur, au lieu d'aborder les sujets prévus, lui remet une lettre de convocation à un entretien préalable au licenciement.
S'en suit un échange d'une heure, au cours duquel l'employeur détaille, sur un ton courtois, à une salariée stupéfaite et « sonnée » les motifs de son futur licenciement, remettant en cause ses qualités professionnelles mais aussi personnelles (« Vous ne savez pas communiquer avec les autres. Vous n'écoutez pas. Vous ne recevez pas les messages. C'est impossible de travailler avec vous »...).
Au sortir de cet entretien, la salariée s'effondre en larmes. Son médecin constate un état de détresse important. S'en suivront un long arrêt de travail et un lourd suivi médical.
La CPAM refuse de prendre en charge cet accident du travail, au motif (classique en la matière) que son enquête montre que l'entretien s'est déroulé calmement et sur un ton courtois, ce qui impliquerait l'absence de choc psychologique, et donc d'accident du travail.
Le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE va suivre notre argumentaire, et reconnaître qu'il s'agit d'un accident du travail.
Il souligne que : « Les troubles psychologiques générés par un choc émotionnel peuvent revêtir le caractère d'un accident du travail dès lors qu'il est établi un lien de causalité entre le traumatisme allégué s'étant produit à une date certaine et le fait accidentel ».
La CPAM a fait appel de ce jugement.
Par arrêt du 21 janvier 2021, la Cour d'Appel de VERSAILLES, va confirmer en totalité ce jugement, dans des termes :
« En l'espèce, le fait certain est que Mme X. a été prise dans ce qui doit être interprété comme un piège(…). Il n'est pas contestable que cet entretien « surprise », qui constitue en réalité une forme de piège, a eu des répercussions immédiates et sévères sur l'état de santé de Mme X. ».
La présomption d'imputabilité de l'article L.411-1 du Code de la Sécurité Sociale trouve à s'appliquer pour un traumatisme psychologique survenu aux temps et lieu du travail, ce qui était bien le cas en l'espèce.
C'est souvent sur la notion de « choc » émotionnel que le combat avec la CPAM est âpre. Tous les chocs de ce type n'arrivent pas lors d'une violente altercation devant témoins.
Que faire quand tout se passe au cours d'un entretien dans un bureau fermé ?
La particularité du présent dossier est la volonté de l'employeur de créer un effet de surprise, en modifiant sans prévenir l'objet d'une réunion prévue de longue date.
Il a délibérément choisi de prendre notre cliente au dépourvu, la laissant s'investir durant plusieurs jours dans un travail considérable, et lui laissant croire qu'il la conviait à une réunion de travail, alors même qu’il avait préparé une procédure de licenciement.
La souffrance de la victime a été encore aggravée par le fait que l'employeur a cru devoir prolonger leur entretien durant une heure.
Les conditions de l'existence d'un accident du travail sont donc remplies :
-
un événement soudain (qui plus est survenu aux temps et au lieu du travail) ;
-
une lésion médicalement constatée ;
-
un lien démontré entre l'accident et cette lésion.
Guillaume Cousin
Avocat à la Cour
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