L’organisation de la visite médicale d’embauche : Une application concrète de l’obligation de sécurité de l’employeur
1°-L’employeur débiteur d’une obligation de sécurité de résultat
Dans le cadre de la relation de travail, l’employeur outre son obligation de fournir du travail et une rémunération au salarié, est débiteur à l’égard de ce dernier d’une obligation de sécurité.
Il appartient en effet à l’employeur, de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs (Article L.4121-1 du Code du travail).
Par ailleurs, eu égard à cette obligation de sécurité, on remarquera qu’elle s’est vue conférer par la jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation une portée particulière, puisqu’il s’agit d’une obligation de résultat.
Il convient donc d’inviter l’employeur à faire preuve d’une grande vigilance en ce qui concerne la protection de la santé physique et mentale de ses collaborateurs.
La jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation met d’ailleurs régulièrement en exergue ce principe. En atteste notamment un arrêt rendu par la Chambre sociale de la Cour de cassation en date du 30 novembre 2010 (Chambre sociale de la Cour de cassation, 30 novembre 2010 n°08.70.390)
La chambre sociale met en l’espèce en évidence le fait qu’il pèse sur l’employeur seul, ou dans l’hypothèse d’une mise à disposition, conjointement sur l’entreprise de travail temporaire et l’entreprise utilisatrice, une obligation de sécurité, dont l’effectivité doit être assurée.
En l’espèce, une entreprise de travail temporaire, avait mis en date du 29 mars 2004, un travailleur intérimaire exerçant les fonctions de soudeur Inox, à la disposition d’une entreprise utilisatrice. Le 18 juin 2004, le travailleur intérimaire a été déclaré inapte à son poste par le médecin du travail, à la suite d'une contamination par le chrome. Ce travailleur intérimaire a alors saisi la juridiction prud’homale, considérant que l’employeur avait manqué à son obligation de sécurité.
Dans cet arrêt la chambre sociale de la Cour de cassation considère que la non délivrance d’un masque à adduction d’air au travailleur intérimaire par l’entreprise utilisatrice, dès le commencement de sa mission, soit le 29 mars 2004, mais seulement en date du 09 avril 2004, alors que le risque d’exposition aux fumées de soudage avait été identifié par l’entreprise utilisatrice, est constitutive d’un manquement à l’obligation de sécurité de résultat causant nécessairement un préjudice au salarié.
En l’espèce, la chambre sociale écarte les arguments retenus par la Cour d’appel pour débouter le salarié de sa demande :
-La mise en place immédiate d’un suivi médical par l’employeur, traduisant l’intérêt de ce dernier, eu égard à la santé physique et mentale de ses collaborateurs.
-La probable contamination de l’échantillon d’urine, au moment du prélèvement, empêchant de mesurer avec précision le taux de chrome présent dans l’organisme du salarié.
-L’absence de signe d’intoxication au chrome.
La chambre sociale de la Cour de cassation se fonde simplement sur la définition de l’obligation de sécurité de résultat, et considère que le retard de l’employeur, eu égard à son obligation de sécurité suffit pour engager sa responsabilité.
En ce qui concerne cette obligation de sécurité de résultat, on observera que le seul constat d’un échec de l’employeur est en effet suffisant à engager sa responsabilité.
L’employeur ne saurait donc s’exonérer de sa responsabilité en démontrant, qu’en dépit de sa bonne volonté, il n’est pas parvenu à s’acquitter de son obligation de sécurité à l’égard des salariés.
En effet, les efforts consentis par l’employeur ainsi que les moyens mis en œuvre par ce dernier pour s’acquitter de son obligation importent peu, il doit simplement assurer la sécurité physique et mentale de ses collaborateurs.
Dans le cadre de cette obligation de sécurité, il incombe notamment à l’employeur d’organiser la visite médicale d’embauche à laquelle doit être soumise le salarié récemment recruté.
2°-L’organisation de la visite médicale d’embauche : une manifestation concrète de l’obligation de sécurité de l’employeur
La visite médicale ou examen médical d’embauche doit impérativement être pratiqué par le médecin du travail, avant l’expiration de la période d’essai (Article R.4624-10 du Code du travail).
Pour ce faire, il appartient à l’employeur soit en amont, soit immédiatement après la conclusion du contrat de travail d’entrer en contact avec les services de santé au travail, afin d’organiser l’examen médical d’embauche, dans les délais les plus brefs.
Cet examen médical auquel doit être obligatoirement soumis le collaborateur, a pour dessein principal, de s’assurer que le salarié est médicalement apte au poste de travail, auquel l'employeur envisage de l'affecter (Article R.4624-11 du Code du travail).
La visite médicale d’embauche doit par ailleurs être pratiquée sur la personne du salarié, quel que soit le type de contrat de travail, qui le lie à l’employeur. En effet, un salarié embauché qu’il soit recruté dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée ou dans le cadre d’un contrat à durée déterminée, doit être soumis à une visite médicale d’embauche (Chambre sociale de la Cour de cassation, 11 juillet 2012, n°11-11.709).
Si l’employeur omet de procéder à l’organisation de l’examen médical d’embauche ou s’il soumet tardivement son salarié à la visite médicale d’embauche, soit postérieurement à l’expiration de la période d’essai, il engage non seulement sa responsabilité pénale, mais également sa responsabilité civile.
-D’une part l’employeur engage sa responsabilité pénale en vertu de l’article R 4745-1 du Code du travail et encourt une amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe, soit une amende d’un montant de 1500 euros.
-D’autre part l’employeur qui a omis d’organiser la visite médicale d’embauche ou qui a fait tardivement pratiquer celle-ci sur la personne de son salarié, engage sa responsabilité civile et peut être condamné au paiement de dommages et intérêts.
En atteste notamment un arrêt rendu par la Chambre sociale de la Cour de cassation en date du 11 juillet 2012 (Chambre sociale de la Cour de cassation, 11 juillet 2012 n°11-11.709).
En l’espèce, un salarié avait été recruté, dans le cadre de plusieurs contrats à durée déterminée, afin d’organiser ponctuellement des animations commerciales, au cours du mois de décembre 2008. L’employeur ayant notamment omis d’organiser la visite médicale d’embauche, le salarié a saisi la juridiction prud’homale, afin d’obtenir des dommages et intérêts pour absence d’examen médical d’embauche.
Dans cet arrêt, la chambre sociale de la Cour de cassation insiste tout d’abord sur le fait que l’employeur est tenu d’une obligation de sécurité de résultat, à l’égard de son salarié.
L’arrêt met également en évidence le fait, que le fait pour l’employeur de ne pas avoir pris les dispositions requises pour faire pratiquer une visite médicale d’embauche sur la personne du salarié cause nécessairement un préjudice à ce dernier.
Enfin cet arrêt fondé sur l’obligation de sécurité de résultat, est particulièrement important, car il fait disparaître l’obligation pour le salarié d’apporter la preuve d’un lien de causalité entre l’absence de visite médicale d’embauche et l’atteinte portée à son état de santé.
La seule absence d’examen médical d’embauche est donc constitutive d’un préjudice subi par le salarié, qui est dès lors en droit de prétendre à l’obtention de dommages et intérêts.
Cette étude relative à l’organisation de la visite médicale d’embauche par l’employeur dans le cadre de son obligation de sécurité de résultat, ne saurait être considérée comme étant exhaustive.
Pour toute question relative à la visite médicale d’embauche, il vous appartient d’entrer en contact avec un avocat, en droit du travail, qui vous assistera et répondra à vos interrogations.
H. PORTIER
Elève Avocat
Eda Sud-EST
13004 Marseille