Par deux arrêts du 9 juin dernier, la Cour de cassation réaffirme le statut protecteur dont bénéficient les salariés grévistes.
Le droit de grève est un principe à valeur constitutionnelle.
Deux dispositions du code du travail ont vocation à protéger les salariés grévistes (les articles L 2511-1 et L 1132-2).
Il en résulte que la grève ne peut donner lieu à aucune mesure discriminatoire et ne peut justifier la rupture du contrat de travail, sauf faute lourde imputable au salarié.
Tout licenciement prononcé en l'absence de faute lourde est nul de plein droit.
Le statut protecteur garanti par le Code du travail est réservé à l'exercice normal du droit de grève.
Les salariés ayant contribué à un mouvement illicite ou à un mouvement caractérisant un abus du droit de grève sont soumis au droit commun.
Dans ces situations l'employeur recouvre pleinement son pouvoir disciplinaire.
La faute lourde est définie par la jurisprudence comme une faute :
- d'une exceptionnelle gravité,
- commise avec l'intention de nuire à l'employeur.
La jurisprudence retient que le comportement du salarié, pouvant caractériser une faute lourde, a pour effet de désorganiser l'entreprise ou d'empêcher les salariés non-grévistes d'accomplir leur travail.
C'est ce que rappelle la Cour de cassation dans le premier arrêt qui nous intéresse (cass.soc, 9 mai 2012, n° 10-26497).
En l'espèce, plusieurs salariés grévistes avait été licenciés pour avoir fait barrage à des camions de l'entreprise.
Selon la haute cour, la cour d'appel devait avant toute chose rechercher si l'action des grévistes avait entravé le travail des salariés non-grévistes ou entraîné une désorganisation de l'entreprise.
A défaut, ils ne pouvaient être licenciés pour des faits se rattachant à la grève.
Dans le second arrêt (cass. Soc, 9 mai 2012, n° 10-24307), suite à un mouvement de grève, un salarié, qui avait été convoqué à un entretien préalable avant la grève, a été licencié pour faute grave pour avoir entre autres terni l'image de la société en distribuant des tracts dénonçant les conditions de travail dans l'entreprise.
Censure de la Haute cour :
"la nullité du licenciement d'un salarié n'est pas limitée au cas où le licenciement est prononcé pour avoir participé à une grève mais qu'elle s'étend à tout licenciement prononcé à raison d'un fait commis au cours de la grève et qui ne peut être qualifié de faute lourde".
Le grief tiré du fait d'avoir altéré l'image de la société en distribuant des tracts durant le mouvement étant un fait commis au cours de la grève qui ne pouvait être qualifié de faute lourde, le licenciement était donc indiscutablement nul.
En effet, en l'absence de faute lourde, le caractère illicite du motif du licenciement tiré de la participation à une grève emporte à lui seul la nullité de ce licenciement. Peu importe l'existence, dans la lettre de licenciement, de faits distincts de la participation à la grève pouvant constituer, s'ils étaient établis, une cause réelle et sérieuse de licenciement.
Houria KADDOUR, Avocat Lyon