La loi n° 2014-56 du 27 janvier 2014 visant à harmoniser les délais de prescription des infractions prévues par la loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881, commises en raison du sexe, de l'orientation ou de l'identité sexuelle ou du handicap a été promulguée le 27 janvier 2014.
Cette loi modifie l’article L'article 65-3 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse et rallonge à 1 an la prescription des trois infractions :
- de provocation à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes en raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou de leur handicap (article 24 de la loi de 1881).
- de diffamation envers une personne ou un groupe de personnes en raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou de leur handicap (article 32 de la loi de 1881).
- d’injure envers une personne ou un groupe de personnes en raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou de leur handicap (article 33 de la loi de 1881).
Elles possèdent maintenant le même délai de prescription que lorsque ces infractions étaient commises pour des motifs liés à la race, la nation et la religion, évitant qu’une différence de traitement de ces infractions ne crée un déséquilibre et une hiérarchie de gravité entre elles.
L’allongement des délais de prescription pour les infractions à caractère homophobe où visant les handicapés résulte de leur accroissement sur internet ces dernières années, qui par sa nature rend difficile la poursuite des infractions. C’est la même raison qui avait poussé le législateur en 2004 à allonger à un an le délai de prescription pour les infractions liées à la race, la nation et la religion, comme l’appelait de ses vœux le garde des sceaux[1] :
« Si j’ai introduit cette disposition dans le projet, c’est en effet parce que les règles de prescription rendent difficile la poursuite des infractions liées à Internet, la jurisprudence de la Cour de cassation précisant que le délai de prescription est calculé à partir de la date de mise en ligne. Le temps qu’il y ait une réaction – en général, de la part d’une association antiraciste –, le délai de trois mois est dépassé sans qu’une décision interruptive de la prescription ait pu intervenir. (…) Nous devons nous donner les moyens de combattre un phénomène qui, malheureusement, ressurgit – et nous en sommes tous inquiets – dans notre pays, et tenir compte de quelque chose qui, bien sûr, n’existait pas lorsque la loi de 1881 a été votée, il y a plus d’un siècle, je veux parler d’Internet, ce réseau électronique qu’il est très difficile, pour la magistrature et pour les services d’enquête, de contrôler et de surveiller en vue de réprimer les infractions qui s’y commettent ».
Si cette nouvelle loi endigue certaines difficultés relatives à la poursuite d’infractions dont on ne peut ignorer la gravité, notamment lorsqu’elles sont commises sur internet, c’est plus régulièrement le délai de prescription de 3 mois à compter de la première mise en ligne sur le réseau pour la majorité des autres infractions qui est pointé du doigt.
Cette exception de procédure qui constitue le fleuron de la défense pénale en matière d’infraction de presse pourrait bien disparaître à l’avenir lorsqu’elles sont commises par un moyen de télécommunication.
C’est le dessein de la proposition de loi sénatoriale en sommeil sur le bureau de l’assemblée nationale[2] depuis juillet 2012, la commission des lois estimant que « ce délai est trop bref pour les infractions commises sur Internet, lequel assure une très large audience, pour une durée potentiellement illimitée, aux messages mis en ligne librement par tout un chacun ».
Et que « l'allongement du délai de prescription à un an pour les infractions commises sur Internet permettrait un traitement proportionné à la prise en compte des différences d'accessibilité d'un message dans le temps, selon qu'il est publié sur support papier ou disponible sur un support informatique (…) ».
La nécessité d’enlever tout degré de hiérarchie entre les infractions de presse considérées comme graves a néanmoins pris le pas sur la difficulté de la poursuite des infractions sur internet.
L.B.V