Superflue, négligeable, accessoire : les détracteurs de l’épargne salariale ne manquent pas d’adjectifs pour la dénigrer. On lui reproche, pour l’essentiel, de porter sur de trop faibles montants pour être significative. C’est pourtant faux, sauf à réduire l’ensemble des outils qui constituent l’épargne salariale à sa plus simple expression.
Nous vous proposons ci-dessous deux exemples, pour lesquels nous nous sommes placés uniquement du point de vue des bénéficiaires des dispositifs d’épargne salariale.
1er exemple
Peut-on se construire un patrimoine avec 200€ par an ? C’est la question un peu désespérée que se posent de nombreux salariés, dont le budget ne laisse guère de place pour l’épargne.
En épargnant cette somme sur un Livret A rémunéré à 1,25% nets, ils auront, au bout de 20 ans, 4044 euros, c'est-à-dire bien peu de choses, rapportés au coût de la vie en 2033.
Imaginons maintenant un cabinet dentaire, avec un praticien qui débute son activité, et son assistante dentaire.
Le cabinet met en place un plan d’épargne entreprise (PEE) avec un abondement de 300%, c’est-à-dire que, dans la limite du plafond de versements, à chaque fois qu’un bénéficiaire du plan verse 100€, le cabinet complète le versement à hauteur de 300€.
Sa salariée, en épargnant 200€ par an dans son plan d’épargne, bénéficiera donc d’un abondement de 600€ par an, soit, une fois la CSG de 8% déduite, un versement net sur PEE de 752€ par an.
De profil plutôt défensif, ses capitaux sont investis sur des supports prudents, qui rapportent en moyenne 3% par an. Au terme de 20 ans, son plan d’épargne affichera donc 20 206€ au compteur, ce qui correspond à un rendement annuel de près de 15% (brut de prélèvements sociaux). Voilà une épargne « négligeable » qu’on ferait bien au contraire de ne pas négliger !
Prenons la situation du chirurgien dentiste. Econome, il fait le choix d’épargner de manière à profiter au maximum des plafonds légaux d’abondement, soit 8% du PASS (plafond annuel de la sécurité sociale) pour le Plan d’épargne entreprise et 16% du PASS pour le plan d’épargne retraite collective. Il verse donc en 2013 2963€ répartis sur les deux enveloppes, qui lui permettent d’épargner au total 11 852€ en 2013 (2963€ d’épargne volontaire, et 8889€ d’abondement).
Pour conserver des paramètres identiques, admettons qu’il ait un profil aussi défensif que sa salariée, et que son PEI-PERCO affiche un rendement de 3% annuel. Au bout de 20 ans, ses deux enveloppes confondues totaliseront 318 460€, ce qui porte leur rendement annuel (brut de prélèvements sociaux) à 15,40%.
Quand on sait que de plus en plus de praticiens ne parviennent même plus à céder leur patientèle avant de partir à la retraite, on comprend combien un capital de cette ampleur peut représenter pour eux…
2ème exemple
On vient de voir que l’épargne salariale, prise sur une longue période, pouvait représenter à terme des sommes considérables. On pourrait donc en conclure que, sur une année, les sommes en jeu sont assez faibles, méritant ainsi le qualificatif d’accessoire.
Ce serait méconnaître la richesse de l’épargne salariale, qui se décline en plusieurs outils. Outre les enveloppes PEI-PERCO et l’abondement sur épargne volontaire que nous venons d’étudier, elle comprend aussi les dispositifs d’intéressement et de participation.
Un accord d’intéressement, c’est une prime à la performance pour l’atteinte d’un objectif défini. Il est toujours facultatif, à la différence de la participation, obligatoire pour les entreprises de plus de 50 salariés, mais qui peut être mise en place volontairement pour les entreprises qui en comptent moins.
La participation se définit comme une prime au résultat.
Imaginons maintenant une SARL de prestation de services, comprenant une gérante majoritaire (travailleuse non salariée) ainsi qu’un salarié. On cherche à exploiter au maximum tous les outils d’épargne salariale.
L’entreprise définit un accord d’intéressement lié à l’amélioration d’un résultat de l’entreprise. Par exemple, la progression du chiffre d’affaires annuel.
Elle met ensuite en place un accord volontaire de participation aux bénéfices, l’ensemble des primes de participation ne pouvant dépasser 50% du résultat de l’entreprise.
La gérante, comme son salarié, décident de verser l’intégralité de ces primes (intéressement et participation) dans le PEI-PERCO de l’entreprise, abondé à 300% dans la limite de 2963€ pour le PEE et 5926€ pour le PERCO.
En substituant des chiffres aux lettres, voici ce que cela donne :
Après une année fructueuse, nos deux travailleurs reçoivent une prime d’intéressement maximal de 18 516€ chacun, au titre de l’intéressement, ainsi qu’une prime de 27 774€ chacun, au titre de la participation. En acceptant de ne pas percevoir immédiatement ces primes, versées dans leurs plans, ils économisent tout l’impôt sur le revenu qu’ils auraient dû acquitter le cas échéant.
Au total, sur une seule année, entre les deux primes et l’abondement, ils ont donc pu épargner chacun 55 178€ ! Lorsqu’ils retireront leurs capitaux, ils bénéficieront en sus d’une exonération d’impôt sur la plus-value (à l’exception des prélèvements sociaux). Imaginons un peu sur 5 ans ce qu’une telle épargne peut représenter…Ou quand l’accessoire devient l’essentiel. CQFD.