Le développement de la médiation en entreprise

Publié le 31/08/2013 Vu 3 665 fois 0
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Bien que Balzac ait écrit en 1843 dans les Illusions perdues qu'"un mauvais arrangement vaut mieux qu'un bon procès", on peut considérer qu'un bon arrangement vaut mieux qu'un mauvais procès

Bien que Balzac ait écrit en 1843 dans les Illusions perdues qu'"un mauvais arrangement vaut mieux qu'un bon

Le développement de la médiation en entreprise

Une certaine tradition millénaire peut faire apparaître la médiation comme l'autre plus vieux métier du monde, en s'affirmant comme une approche fortement ancrée dans la tradition chinoise, arabe ou africaine, la palabre.

Dans les autres parties du monde, cette démarche est considérablement plus récente.

En effet, c'est au cours de la deuxième guerre mondiale que de nombreux gouvernements, par exemple ceux des Etats-Unis et du Canada, encouragent, puis imposent, l'intervention d'un médiateur dans les conflits du travail, afin d'éviter l'instabilité sociale et de faire face à l'effort de guerre.

La paix revenue, la médiation en entreprise continue de se développer dans les différents pays, en fonction des cultures, des mentalités, mais également en tenant compte des possibilités données par les différentes législations du travail.

 En effet, la médiation n'est pas une procédure, mais un processus de communication éthique s'affirmant comme un mode alternatif de règlement des conflits.

Tiers indépendant, neutre, loyal, impartial et sans pouvoir,

le médiateur apparaît comme une autorité acceptée, strictement tenue à la confidentialité et au secret professionnel.

Tenant sa légitimité de la démarche volontaire des médiés (les parties à la médiation), selon les cas, son rôle sera de créer ou de recréer le lien social, de prévenir le conflit ou de participer à son règlement.

En aucun cas, le médiateur n'est un juge.

Il n'est pas là pour dire qui a tort et qui a raison. Il donne la parole à chacun, à tour de rôle, pour exprimer son point du vue sur le différend.

Les objectifs de la médiation ne se définissent pas de manière abstraite, mais ils dépendent du contexte de l'intervention et du point de vue des personnes impliquées.

En entreprise, selon les situations, elle va participer au besoin d'éviter les perturbations ou à la volonté de recherche de la cohésion sociale.

La médiation permet ainsi d'éviter les pertes de temps et les conséquences financières d'une solution imposée par la Justice, en favorisant le dialogue plutôt que l'affrontement, et en s'affirmant par :

  • la confidentialité absolue
    • du médiateur vis à vis de chacun des médiés pris séparément
    • du médiateur et aussi des médiés vis à vis des personnes extérieures (hiérarchie, juge, etc ...)
    • de la médiation vis du monde extérieur (concurrence, clientèle, opinion publique, image de marque)
  • la rapidité
  • la proximité
  • la satisfaction d'un accord durable et personnalisé
  • la souplesse et la clarté de son processus

En conséquence, la médiation s'impose régulièrement, par exemple, dans les cas de :

  • licenciement collectif ou individuel
  • harcèlement moral ou dérapage verbal
  • litige entre client et fournisseur
  • conflit entre salariés
  • tension entre encadrement et collaborateur
  • introduction de nouvelles technologies
  • mise en place d'une nouvelle organisation
  • différend entre associés

Afin d'approcher les raisons du développement de la médiation en entreprise, nous la comparerons tout d'abord avec certains autres modes alternatifs de règlement des conflits, avant d'aborder pourquoi et quand y recourir, afin d'anticiper ou résoudre un conflit.

Comparaison entre la médiation et certains autres modes alternatifs de règlement des conflits

Le caractère spécifique de la médiation n'étant pas toujours aisé à saisir, il convient, en premier lieu, de le distinguer d'autres postures ou processus voisins.

L'arbitrage, d'une part, comme forme de justice privée, s'impose de plus en plus fréquemment dans la résolution des litiges commerciaux.
Comme la médiation, l'arbitrage est une démarche volontaire de la part des parties.
Comme le médiateur, l'arbitre est une tierce partie, mais il lui est confié le pouvoir de trancher. Il peut décider en droit et en équité.
Figurant de plus en plus souvent parmi les clauses des contrats commerciaux, la décision d'arbitrage peut-être, selon les cas, impérative ou posséder seulement une valeur morale, voire simplement indicative.

D'autre part, la négociation et la transaction sont également de plus en plus communément admises et utilisées par des entreprises en situation de litige.

La médiation peut en être l'origine ou le prolongement, mais le médiateur ne saurait être partie prenante dans la négociation puisque, par définition, il est neutre et indépendant.
L'issue positive de la négociation pourra être une transaction.
Cependant, si transaction et médiation possèdent certains points communs, elles révèlent une différence fondamentale : la transaction n'implique pas un tiers neutre.
C'est la raison pour laquelle, souvent, ce sont les avocats qui vont discuter ensemble sur la manière de protéger les droits et les intérêts de leurs clients.
En l'espèce, le négociateur représente une partie, n'est donc pas neutre, à la différence du médiateur, qui doit l'être obligatoirement, ainsi qu'impartial.

A l'intérieur de l'entreprise, la distinction s'avère plus difficile à établir entre conciliation et médiation, d'autant que leur socle commun s'affirme comme le « vivre ensemble ».

Ainsi, le conciliateur cherche à se faire une opinion pour trouver une solution à la situation qu'il va proposer aux parties, alors que le médiateur va aider les médiés à trouver par eux-même une solution pour résoudre le différend qui les oppose.

De ce fait, l'action du médiateur apparaît alors souvent comme un mélange entre la médiation pure et la conciliation, afin d'arriver à un accord amiable, potentiellement dans toute situation où il y a dialogue en vue de faire aboutir un projet, dépasser un conflit, créer de la coopération, etc ...

Face à la complexité des situations, c'est par le strict respect de certains principes fondamentaux que le médiateur peut préserver le sens de son intervention.

Son indépendance la plus totale étant l'élément majeur et indispensable, la liberté complète des médiés en est le pendant.

Pourtant, il existe de nombreuses situations où une certaine pression sera exercée pour mettre en place un processus de médiation, par exemple quand celle-ci est ordonnée par le Juge ou imposée par la clause d'un contrat.
Dans ce cas, le médiateur doit faire de la médiation un espace dans lequel celui qui à elle a été imposée, verra ses préoccupations prises en compte, car l'acceptation ne doit pas être confondue avec l'adhésion.
Cette dernière doit être authentique, c'est à dire que les médiés souhaitent réellement sortir de leur situation de conflit et parvenir à un accord ou, au moins, en parler.

Ainsi, le médiateur doit veiller à ce que son intervention ne soit pas utilisée de manière stratégique ou manipulatrice par l'un ou les deux médiés, par exemple à des fins dilatoires pour faire perdre du temps, voire attendre une prescription.

Les éléments qui précèdent montrent que le médiateur s'affirme comme le responsable de la forme, c'est à dire le processus, et laisse aux médiés celle du fond, c'est à dire la recherche commune de la solution à leur conflit.

Raisons et pertinence du recours à la médiation pour anticiper ou résoudre un conflit

Recourir à la médiation implique un changement de cadre qui suppose des motivations particulières.

D'une manière générale, les médiés acceptent la médiation soit :

  • parce qu'ils y voient un intérêt spécifique à un niveau matériel (obtenir quelque chose) ou relationnel,psychologique, moral, éthique , etc ...
  •  parce que le processus proposé leur semble meilleur que ceux qui s'offrent à eux par ailleurs, c'est à dire tribunal, classement sans suite, continuation du trouble, etc

Cependant, parfois, les médiés pensent à recourir à la médiation pour de mauvaises raisons comme un malentendu sur ce processus ou une utilisation manipulatrice de ce dernier.

Pour éviter ces situations, le médiateur doit savoir se préoccuper des jeux de pouvoir au sein de l'entreprise, par exemple, lorsqu'il est appelé à intervenir sur un conflit entre deux cadres de niveau équivalent, comme un directeur commercial et un directeur technique.

De même, le médiateur doit apprécier le rapport de force entre les médiés, par exemple, en cas de rupture conflictuelle des relations entre une petite entreprise qui veut être payé d'une prestation effectuée et la filiale d'un groupe multinational qui refuse en contestant la qualité du travail fourni.

Evidemment, les motivations du recours à la médiation diffèrent selon que l'on se place du point de vue des médiés ou de celui du prescripteur, ou demandeur initial, qui peut être l'un des médiés.

Dans le cadre de l'entreprise, le prescripteur est celui, généralement un supérieur hiérarchique, qui, pour ses propres projets, a besoin ou intérêt que d'autres personnes s'entendent ou règlent leur différend.

Ne souhaitant pas risquer son autorité, il préfère ainsi :

  • préserver l'autonomie des médiés, en évitant de se substituer à eux ;
  • préserver la motivation des médiés, en évitant de trancher dans un sens qui pourrait engendrer des frustrations ;
  • préserver sa neutralité car trancher conduit à donner raison à l'un plus qu'à l'autre, du moins en apparence ;
  • permettre à un projet plus important de ne pas être ralenti, voire bloqué, par un différend.

Cette approche permet d'apprécier les avantages que les entreprises, qu'elles soient petites, moyennes ou grandes, peuvent gagner par la médiation, et l'aide considérable que peut en retirer les partenaires sociaux pour faire avancer leur projet.

Le médiateur est celui, comme tiers neutre, loyal et indépendant, qui va travailler à comprendre les contradictions pour éviter les conflits ou participer à leur résolution.

Tournée vers l'extérieur, la médiation s'affirme comme une forme de diplomatie d'entreprise, seule stratégie capable de répondre, en même temps, aux deux impératifs que sont l'anticipation et la négociation.

Tournée vers l'intérieur, processus dynamique d'écoute et de restitution, la médiation permet à la Direction d'enrichir sa réflexion stratégique et de relever les défis autour de l'emploi, du transfert de compétence, de la mobilité fonctionnelle, de la recherche de productivité, de la démarche qualité, etc ...

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A propos de l'auteur
Blog de Jacques SERNA

 Avocat au barreau de Saint-Etienne

Master de droit des contentieux, maîtrise de droit des affaires, diplômé de médiation, diplômé d'études supérieures de gestion. Après plusieurs années d'encadrement et de direction, je conseille, assiste et représente les professionnels et les particuliers.

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