Cass. 3e civ. 11 octobre 2011 n° 10-17.257 (n° 1203 F-D), Arne c/ Sté Punta Lago
Une cour d'appel ne peut pas à la fois constater que le bailleur a manqué à son obligation de délivrance et refuser de prononcer la résiliation judiciaire du bail.
Au cours d'un bail saisonnier portant sur des locaux à usage de restaurant, les services vétérinaires avaient constaté que la structure de l'établissement ne répondait pas aux exigences réglementaires. Après l'expiration du bail, le locataire, qui n'avait pas réglé la totalité des loyers, avait demandé la résiliation du contrat à compter de sa date d'effet en raison de l'inexécution de son obligation de délivrance par le bailleur.
Une cour d'appel avait rejeté cette demande et condamné le locataire au paiement des loyers restant dus : selon elle, il n'était pas démontré que la non-conformité des locaux avait empêché l'exercice de l'activité, le restaurant ayant été exploité dans la même configuration par le précédent locataire.
La Cour de cassation a censuré cette décision, reprochant aux juges du fond d'avoir statué ainsi alors qu'ils avaient constaté que le bailleur avait manqué à son obligation de délivrance en louant des locaux non conformes à l'usage de restauration.
REMARQUE
Le bailleur est tenu de mettre à la disposition du locataire un bien conforme à sa destination contractuelle (C. civ. art. 1719, 1°). Cette obligation suppose que le bailleur s'est assuré que le locataire pourra y exercer son activité. En l'espèce, le bailleur avait manqué à son obligation de délivrance de sorte que la cour d'appel aurait dû prononcer la résiliation judiciaire du bail. Rappelons que celle-ci prend effet à la date à laquelle les parties ont cessé d'exécuter leurs obligations (Cass. 3e civ. 30-4-2003 n° 01-14.890 : RJDA 7/03 n° 694). Si le contrat n'a jamais été exécuté ou si l'une des obligations contractuelles n'a été remplie qu'imparfaitement dès l'origine, la résiliation emporte anéantissement rétroactif du bail. Tel est nécessairement le cas du manquement à l'obligation de délivrance (même arrêt). Le bailleur doit alors rembourser au locataire la totalité des loyers perçus, étant précisé qu'en cas d'occupation du local par ce dernier, les tribunaux mettent à sa charge le paiement d'une indemnité d'occupation.
Source: Editions Francis Lefebvre