L'action civile de la victime: Juge pénal ou juge civil? (1ère partie)

Publié le 30/09/2008 Vu 32 514 fois 0
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A la suite d’une infraction pénale, différentes voies du droit sont offertes à la victime afin que cette dernière obtienne réparation du préjudice qu’elle a subie. En effet, en vertu de l’article 3 du CPP, la victime d’une infraction dispose d’une action civile qu’elle peut exercer selon son choix, soit devant le juge civil, soit devant le juge pénal. A cette dualité de voie prévue par l’article 3, il convient d’en rajouter une troisième d’origine prétorienne , l’action devant le juge administratif. Chacune de ces voies obéit d’ailleurs à des règles qui leurs sont propres, il est alors opportun de les étudier distinctement.

A la suite d’une infraction pénale, différentes voies du droit sont offertes à la victime afin que cette

L'action civile de la victime: Juge pénal ou juge civil? (1ère partie)

Les règles encadrant la possibilité d'un choix pour la victime

Les règles restreignant l'existence d'une option

On le sait on l'a vu, aux termes des articles 3 et 4 du code de procédure pénale, la victime d'une infraction pénale dispose d'un choix. Titulaire d'une action civile, elle peut décider de l'exercer soit devant le juge civil ou administratif, soit devant le juge pénal.

Toutefois, ce choix n'est pas toujours possible puisque des règles de procédure vont parfois avoir pour effet de priver la victime de cette option. En termes de règles, on en dénombre trois; il s'agit des règles relatives à la prescription d'une part, des règles relatives à la compétence autonome du juge administratif d'autre part et enfin des règles relatives à l'existence d'une cause subjective d'irresponsabilité pénale.

S'agissant de la prescription, l'article 10 du code de procédure pénale dispose que «l'action [civile] ne peut plus être engagée devant la juridiction répressive après l'expiration du délai de prescription de l'action publique.» Autrement dit, si une infraction pénale est prescrite, alors la seule possibilité pour la victime afin d'obtenir réparation sera d'engager une action devant le juge civil. La prescription aura donc pour effet de priver la victime de son droit d'option.

En ce qui concerne la compétence propre du juge administratif, l'absence de choix pour la victime révèle d'un autre postulat. En effet, le juge administratif bénéficie d'une compétence exclusive pour indemniser le préjudice éprouvé par la victime d'une infraction pénale lorsque cette infraction a été commise par un agent public et que cette faute n'est pas détachable de sa fonction; on parle alors de «faute de service». Cette compétence exclusive du juge administratif n'a pas pour effet de priver la victime de sont droit à se constituer partie civile devant le juge pénal. Toutefois, cette action civile ne lui permettra pas d'obtenir une quelconque indemnisation de la part du juge pénal. On parle alors d'une action vindicative puisque cette action sera dépourvue de toute demande en réparation.

Enfin, pour les infractions intentionnelles, lorsque ces dernières sont commises par une personne bénéficiant d'une cause subjective d'irresponsabilité pénale, la victime ne pourra obtenir réparation que devant le juge civil.

Le régime juridique du choix opéré par la victime

Si les conditions de l'action civile sont remplies et qu'aucune règle procédurale n'est venue restreindre les voies de recours ouvertes à la victime, alors cette dernière dispose d'un choix. Elle est libre d'exercer son action civile devant le juge civil ou devant le juge pénal. Ceci étant dit, une fois que la victime aura choisi la juridiction devant laquelle elle entend porter son action, elle ne pourra plus revenir sur son choix.

Il s'agit du principe selon lequel, electa una via non datur recursus ad alteram.

Sans vouloir rentrer dans tous les détails procéduraux de ce principe, il semble plus intéressant d'attirer notre attention sur le renforcement dont ce principe a fait l'objet dans l'arrêt de la deuxième chambre civile du 25 octobre 2007. Il s'agissait d'un médecin généraliste qui a pratiqué une liposuccion dans des conditions d'asepsie douteuses qui ont entraîné une gangrène gazeuse ayant nécessité sept interventions chirurgicales et laissé des séquelles gravement invalidantes; après dix années d'instruction et trois expertises, le tribunal correctionnel a relaxé le médecin et débouté la partie civile de sa demande fondée sur l'article 1382 du Code civil. Qu'à cela ne tienne, Madame Y. saisit alors la juridiction civile d'une action en responsabilité contractuelle fondée sur l'article 1147 du Code civil. Saisie d'un pourvoi, la deuxième chambre civile, dans un attendu de principe, rejette la demande au motif qu'il incombait à Madame Y. de soulever l'ensemble des moyens qu'elle estimait de nature à fonder la responsabilité du docteur X. devant le juge pénal, puisque l'article 470-1 du Code de procédure pénale donne compétence au juge pénal qui relaxe pour une infraction non intentionnelle pour connaître des demandes fondées sur des règles de pur droit civil, à savoir la responsabilité contractuelle, la responsabilité du fait des choses et les règles spéciales applicables aux accidents de la circulation. Cette solution peut paraitre extrêmement critiquable du point de vue de la victime. Au pénal, l'assistance par un avocat n'étant pas obligatoire, quel que soit le montant du litige, la victime qui sera tenté de se présenter sans avocat prend un risque considérable, à savoir le risque d'absence d'indemnisation de son préjudice, fût-il une invalidité à vie.


SEIGNALET Gabriel
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