Procédure collective et cession des contrats commerciaux – Un guide pratique pour les dirigeants de PME et PMI
Lorsqu’une entreprise traverse une procédure collective (redressement ou liquidation judiciaire), la cession des contrats commerciaux devient un levier stratégique. Cette mesure permet de maintenir l’activité tout en apurant le passif, mais elle introduit des dérogations aux règles habituelles du droit des contrats, ce qui peut surprendre les entrepreneurs. Voici ce que vous devez savoir pour en comprendre les enjeux et anticiper ses effets.
A. Pourquoi la cession des contrats commerciaux est-elle cruciale ?
Dans un contexte de difficultés financières, les contrats commerciaux représentent bien souvent une ressource clé pour l’entreprise. Ces contrats sont non seulement une source de revenus, mais aussi un socle pour la poursuite des activités. Lors d’un plan de cession, les tribunaux peuvent décider de transférer tout ou partie de ces contrats à un repreneur. Cela peut concerner :
- une branche d’activité spécifique,
- l’ensemble de l’entreprise,
- ou même des contrats isolés jugés essentiels.
Dans certains cas, un prépack cession, préparé en amont lors d’une procédure préventive (conciliation ou mandat ad hoc), peut faciliter une transition rapide et sécurisée en cas d’ouverture d’une procédure collective.
B. Quels contrats peuvent être cédés ?
En principe, tous les contrats commerciaux peuvent être cédés, mais il existe des exceptions et des nuances à connaître :
1. Les contrats intuitu personae
S’ils ont été conclus en fonction de la personne même du débiteur (comme des contrats de partenariat ou de prestation hautement personnalisés), leur transfert est complexe. Les tribunaux évaluent si la personnalité du débiteur est réellement essentielle au contrat.
2. Les contrats attachés à un fonds de commerce
La cession d’un fonds de commerce entraîne automatiquement le transfert de certains contrats comme les contrats de travail, d’assurance ou d’édition.
3. Les contrats nécessaires à l’activité
En cas de liquidation judiciaire, seuls les contrats indispensables à la continuité de l’activité (ex. : contrats de location ou de fourniture de biens) peuvent être transférés, conformément à l’article L.642-1 du Code de commerce.
C. Quels sont les effets concrets de la cession ?
La cession des contrats commerciaux bouleverse les règles habituelles.
1. Le consentement n’est pas requis
Contrairement au principe fondamental du droit des contrats, le tribunal peut imposer la cession sans demander l’accord du cocontractant.
- Pour le cocontractant, cela signifie accepter un nouveau partenaire (le repreneur) sans possibilité de s’y opposer.
- Pour le repreneur, il devra exécuter les obligations contractuelles dans les mêmes conditions que le débiteur initial.
2. Impact sur les tiers
Si une caution garantit les engagements du débiteur initial, elle reste liée pour les dettes contractées avant la cession mais est libérée des obligations postérieures à celle-ci.
D. Points de vigilance pour les dirigeants
Pour les chefs d’entreprise concernés par une procédure collective ou pour ceux envisageant de reprendre une activité, il est essentiel de :
- Identifier les contrats stratégiques pour l’activité et comprendre leur statut en cas de cession.
- Anticiper les négociations avec les cocontractants susceptibles d’être impactés par un transfert.
- S’assurer de la faisabilité financière et juridique de la reprise des contrats pour éviter tout risque de contentieux postérieur à la cession.
En conclusion, la cession judiciaire des contrats commerciaux est un outil puissant pour préserver l’activité des entreprises en difficulté. Toutefois, elle exige une préparation rigoureuse et une bonne compréhension des mécanismes juridiques impliqués.