Les faits: Un article de l'excellent site bioetics.net fait référence à un sondage effectué par Science, montrant que le devenir des embryons créés pour une insémination artificielle mais non utilisés étaient une source non négligeable de lignées de cellules souches que l'on pourrait utiliser pour la recherche (en omettant toutefois que le président Bush vient une fois de plus de poser son veto à une loi permettant le financement fédéral des recherches dans ce domaine). Une occasion de revenir sur la situation de ces embryons en France. L'impact: Si le recours a une assistance médicale à la procréation mène souvent à la naissance d'un enfant, la biologie tâtonne encore trop dans ce domaine pour pouvoir qualifier l'opération de routine. Ainsi, comme le mentionne l'article L. 2141-3 du Code de la santé publique, "compte tenu de l'état des techniques médicales, les membres du couple peuvent consentir par écrit à ce que soit tentée la fécondation d'un nombre d'ovocytes pouvant rendre nécessaire la conservation d'embryons, dans l'intention de réaliser ultérieurement leur projet parental".
Les embryons implantés ensuite bénéficient du même statut qu’un embryon conçu par des moyens naturels. En ce qui concerne les autres, les parents sont seuls maîtres de leur devenir, sur lequel ils sont interrogés tous les ans, selon l’article L.2141-4. S'ils maintiennent leur projet parental, l'embryon continue à être conservé dans l'azote liquide. Si les parents sont en désaccord, en l'absence de réponse ou en cas de décès, il est mis fin à la conservation. Enfin, les parents peuvent donner leur accord au don de l'embryon à un autre couple (qu'ils ne connaîtront pas, l'anonymat étant la règle) ou à ce que des recherches soient menées sur l'embryon.
L’avenir : La législation, bien qu’encore jeune, souffre déjà de critiques. D’une part, si elle prévoit que les parents conservant un projet parental doivent voir leurs embryons conservés, elle ne prend pas en compte les cas où ce projet parental est manifestement voué à l’échec. En particulier, ne peuvent recourir à une procréation médicalement assistée que les couples en âge de procréer. Quid si un couple dont la femme atteint l’âge de 65 ans prétend conserver un projet parental ? L’organisme qui conserve les embryons peut-il prendre la responsabilité de détruire -le terme est celui du législateur- les embryons contre l’accord des parents alors qu’il est manifeste que le projet parental ne pourra jamais aboutir ?
Ensuite, les liens juridiques qui unissent les parents et l’embryon ne sont pas clairement définis par la loi. Nul n’ignore aujourd’hui la solution affirmée par la Cour de cassation selon laquelle l’atteinte involontaire à la vie de l’embryon in utero n’est pas une infraction pénale. A fortiori, la solution s’applique pour les embryons in vitro. Moins connue peut-être est la solution dégagée par la Cour administrative d’appel de Douai qui avait à juger de la responsabilité d’un hôpital dans la perte accidentelle des embryons d’un couple suite à une fuite d’azote liquide dans la cuve. Les parents se sont vu refuser toute indemnisation au motif que les embryons n’étant pas une chose, aucune perte patrimoniale n’était à remplacer. D’autre part, l’embryon n’étant pas encore des « êtres humains ou des produits humains ayant le caractère de chose sacrée », la Cour dénie toute indemnisation fondée sur la perte affective.
Curieuse relation que celle qui donne aux parents pouvoir de vie ou de mort sur l’embryon, sans sanctionner celui qui ne respecterait pas leur volonté. Pas encore parents, jamais propriétaires, les liens existants entre les adultes et l'embryon méritent une clarification.
On notera, enfin, qu’aucun salut n’est à attendre de l’Europe : l’Union Européenne n’a pour le moment pas compétence pour intervenir dans ce domaine, et la Cour européenne de protection des droits de l’homme a jugé que l’article 2§1 de la convention ( le droit de toute personne à la vie est protégée par la Loi) ne s’appliquait qu’aux personnes nées : les embryons in vitro, a fortiori, ne bénéficient donc pas d’une protection supra-nationale.
OLQ