Ces débats touchent à des éléments juridiques assez complexes. Aussi faut-il d'abord s'intéresser à la notion de faute en elle-même (I). C'est ensuite l'idée de faute de jeu qui doit être explicitée (II), puisque sa nature particulière entraîne de la part du droit civil un traitement original. Depuis quelques années, la jurisprudence s'est d'ailleurs faite plus rigoureuse à l'égard des associations sportives (III). Enfin, quelques questions annexes restent en suspens (IV).
Qu'est ce qu'une faute ? C'est un comportement anormal, par rapport au standard du « bon père de famille ». Un juge va donc considérer comme une faute le comportement d'un individu qui s'écartera de celui qu'aurait eu un « bon père de famille » placé dans la même situation.
La responsabilité du fait personnel est le plus ancien fondement de reconnaissance des fautes. L'article 1382 du Code civil indique ainsi que « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ». Ainsi donc, l'auteur d'une faute doit la réparer : il est responsable de son propre fait.
Au fur et à mesure que la jurisprudence, et les différentes hypothèses, se sont multipliées, il a fallu inventer de nouvelles formes de responsabilité. Notamment, en 1930, l'arrêt Jean d'Heur découvre la responsabilité des choses dont on a la garde. Pour faire simple, les choses que l'on possède peuvent causer des dommages, dont on est responsable. Le fondement est l'article 1384 du Code civil : « On est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l'on a sous sa garde ».
Quand se déroule une compétition sportive, il peut toujours arriver des accidents. La question est de savoir ce qu'il se passe si l'un de ces accidents entraîne la blessure d'un joueur.
Le problème ici est qu'un joueur, lorsqu'il est sur le terrain, doit se conformer à deux exigences parfois contradictoires. En effet, il doit à la fois respecter le règlement de sa fédération (les règles du jeu), mais aussi la loi commune, qui peut parfois être opposée.
L'équation est tout de même assez simple : une faute du joueur n'entraîne la responsabilité de l'association que si c'est une violation des règles de jeu. Si c'est un contact qui entraîne une blessure, mais que cela ne constitue pas une faute au sens des règles du jeu, l'association n'est pas responsable.
Pourquoi retenir la responsabilité de l'association ? Tout simplement pour des questions d'assurance. Si l'on considére que c'est le joueur qui doive indemniser la victime, il y a de grandes chances, en cas de dommages grave par exemple, que son assurance ne couvre pas ce type de dommages, et donc, que la victime ne puisse être indemnisée. Au contraire, l'association a, pour sa part, une assurance qui peut prendre en charge l'indemnisation.
La Cour de cassation a cela dit fortement étendu la responsabilité des associations. Sur quel fondement ? Nous l'avons vu, l'article 1384 alinéa 1 parle des « personnes dont on doit répondre ». Mais elle a considérablement modifié son interprétation de la formule. Le 29 mars 1991, l'arrêt Blieck concernait des dommages causés par des personnes appartenant à un centre d'aide par le travail. N'arrivant pas à trouver un fondement classique pour reconnaître une faute et indemniser (faute personnelle, article 1382) le juge a créé un principe général de la responsabilité d'autrui : l'organisation est responsable si elle a « la possibilité de contrôler à titre permanent le mode de vie des personnes dont elles ont la garde ».
Ce n'est pas véritablement la situation d'une association sportive, qui ne fait qu'encadrer et non « contrôler à titre permanent » l'activité de ses joueurs. Le 22 mai 1995, dans un arrêt important, la Cour reconnaît la responsabilité générale des associations du fait de leurs joueurs. La rédaction, désormais un peu remaniée, du principe de responsabilité est la suivante : « Les associations sportives ayant pour mission d'organiser, de diriger et de contrôler l'activité de leurs membres sont responsables des dommages qu'ils causent à cette occasion, dès lors qu'une faute caractérisée par une violation des règles du jeu est imputable à un ou plusieurs de leurs membres, même non identifiés ».
La Cour a même étendu cette idée, de la compétition sportive à un simple entraînement, ou même, à un défilé de majorettes (13 décembre 2002). Dans un arrêt du 3 septembre 2009, la Cour d'appel de Toulouse a même considéré qu'un comportement qui ne constituait pas réellement une faute de jeu (l'effondrement d'une mêlée dans un match de rugby) pouvait entraîner la responsabilité de l'association (en l'espèce, la victime est paralysée à vie).
C'est toujours à la victime de prouver la faute de jeu et donc la responsabilité de l'association. Ceci est toujours très délicat. Souvent, la possibilité de l'indemnisation est subordonnée à l'intervention de l'arbitre. Si celui-ci n'a pas vu la faute, il est extrêmement complexe pour la victime de prouver le fait dommageable. Elle peut à la rigueur s'appuyer sur des témoignages. Dans les grandes compétitions, la vidéo peut être très utile. Il est peu dire donc que le rôle, la formation et le niveau des arbitres sont primordiaux.
L'exonération est toujours possible. C'est-à-dire que l'association peut donner des arguments diminuant, ou supprimant sa responsabilité, alors même que son joueur a commis la faute. Par exemple, si la victime a, par sa conduite, aggravé, ou même, provoqué la faute adverse, il y aura partage ou exonération de la responsabilité. De même, si la faute est imputable à une force majeure (évènement imprévisible, extérieur et irrésistible), il y aura exonération partielle ou complète.
Antoine FAYE
Pour www.footdenbas.com
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