Au plus tard le 10 janvier 2020, les États membres vont devoir rendre les informations (à tout le moins le nom, la date de naissance et le pays de résidence) sur les bénéficiaires effectifs accessibles au grand public.
La transposition en droit interne de la directive précédente répondait à l’obligation pour les Etat membres de prévoir pour toutes les sociétés non cotées le dépôt au greffe du tribunal de commerce d’un document relatif à leurs bénéficiaires effectifs et prévoyait à la charge de toutes les sociétés (commerciales et civiles), des groupements d'intérêt économique et de toutes entités tenues de s'immatriculer au registre du commerce et des sociétés l'obligation de communiquer le nom, l'adresse, la date de naissance, le pays de résidence ainsi que le type et les modalités de contrôle exercés sur la société par les associés/actionnaires détenant plus de 25 % du capital social.
Applicable depuis le 1er aout 2017 pour les nouvelles sociétés et depuis le 1er avril 2018 pour les sociétés déjà immatriculées, ce dispositif vise en pratique les personnes déterminant les décisions dans les assemblées générales de la société et les associés/actionnaires disposant du pouvoir de nommer ou de révoquer la majorité des dirigeants.
A ce jour, ces informations n'ont pas vocation à être connues du public et ne peuvent être consultées que par un nombre limité d’entités, parmi lesquelles figurent l’administration fiscale et les autorités judiciaires (art. R. 561-57 et R. 561-58 du Code monétaire et financier). Il est toutefois possible, pour toute personne justifiant d’un intérêt légitime, d’accéder à certaines de ces informations, sous réserve d’obtenir l’autorisation du juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés (art. R. 561-59 du Code monétaire et financier).
L’accès aux données relatives aux bénéficiaires effectifs des sociétés par « tout membre du grand public » supprime ainsi la condition de la justification par le demandeur d’informations d’un intérêt particulier. Toute personne pourra, accéder au nom, au mois, à l’année de naissance, au pays de résidence et à la nationalité du bénéficiaire effectif, ainsi qu’à la nature et à l’étendue des intérêts effectifs détenus. Reste pour le législateur à déterminer les modalités d’exercice de ce droit et les éventuels coûts à la charge des personnes souhaitant accéder auxdites informations.
La directive autorise en outre les États membres à aller encore plus loin en donnant accès au grand public à des informations supplémentaires permettant l’identification du bénéficiaire effectif (date de naissance précise, coordonnées). Bien entendu, les Etats devront veiller à articuler la transposition de ces règles avec les obligations en matière de protection des données, récemment renforcées.
La transposition de la directive UE 2018/843 du 30 mai 2018 pose notamment la question du droit au respect de la vie privée des bénéficiaires effectifs (notamment quant à la publication de leur adresse personnelle). Le législateur devrait très prochainement se prononcer à cet égard.
Pour mémoire, le fait de ne pas déposer au registre du commerce et des sociétés le document relatif au bénéficiaire effectif ou de déposer un document comportant des informations inexactes ou incomplètes est puni de six mois d’emprisonnement et de 7 500 € d’amende. Les personnes physiques peuvent en outre être condamnées aux peines d’interdiction de gérer des entreprises et à des privations civiques, outre les sanctions supplémentaires.
L’importance des sanctions prévues en cas de non dépôt du document relatif aux bénéficiaires effectifs révèle l’importance du respect de ce dispositif.
En conséquence, nous vous conseillons de vérifier sans délai si votre société a bien rempli cette obligation et notre cabinet se tient naturellement à votre disposition pour réaliser en urgence toute éventuelle régularisation qui s’avèrerait nécessaire.
Si la levée de l’anonymat des bénéficiaires effectifs permettra d’obtenir des informations sur les différents partenaires commerciaux, préalablement à la conclusion de tout accord, et d’effacer les doutes quant aux personnes détenant effectivement le pouvoir de décision dans les sociétés partenaires, il nous semble néanmoins primordial de rester vigilants sur le périmètre de la transposition qui sera adopté par le législateur et sa nécessaire appréciation au regard du droit au respect de la vie privée de chacune, qu’il soit ou non bénéficiaire effectif d’une société.