Protection de la vie privée : certaines atteintes sont légitimes, d’autres pas

Publié le 29/12/2013 Vu 2 354 fois 0
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La notoriété d'un individu, notamment sur le plan politique, lui fait perdre un peu de son droit à la vie privée.

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Protection de la vie privée : certaines atteintes sont légitimes, d’autres pas

Une maison d’édition devait faire paraitre le 12 décembre 2013 un ouvrage intitulé « Le Front National des villes et le Front National des champs » dont un chapitre traitait de l’homosexualité et de la vie de couple de deux cadres du FN. Les intéressés, M. X et M. Z, ont assigné l’éditeur en référé devant le Tribunal de Grande Instance de Paris pour obtenir l’interdiction de la diffusion de l’ouvrage et sa saisie sous contrôle d’huissier.

Le juge des référés, dans une ordonnance du 12 décembre 2013, avait ordonné la suppression de tous les passages faisant référence à l’homosexualité de M. X et de M. Z. Par un arrêt du 19 décembre 2013, la Cour d’appel de Paris infirme partiellement la décision.

La juridiction juge en effet que que la publication de l’ouvrage « Le Front National des villes et le Front National des champs » constitue bien une atteinte à la vie privée de M. X et M. Z  et que l’éditeur ne peut publier l’ouvrage contenant les passages relatifs à l’homosexualité de M. Z et la vie de couple de ces deux personnes.

En revanche, selon la Cour, l’atteinte à la vie privée de M. X, par l’évocation de son homosexualité est justifiée. Les passages en cause, ne traitant que de l’homosexualité de ce dernier, peuvent donc demeurer au sein du livre.  La Cour d’appel opère donc une distinction entre les passages devant être supprimés et ceux pouvant subsister au sein de l’ouvrage.

Mais dans un Etat où « la loi doit être la même pour tous » (article 6 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen), pourquoi l’atteinte à la vie privée de M. X est-elle tolérable tandis que celle portée à la vie privée de M. Z ne l’est pas ?

Si le droit au respect de la vie privée est protégé par l’article 9 du Code civil (« Chacun a droit au respect de sa vie privée ») et par l’article 8 de la Convention Européenne de Sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance »), cette protection doit composer avec le droit à l’information du public et le droit à la liberté d’expression protégés par l’article 10 de la même Convention.

La Cour rappelle que « dans un tel cas, il revient au juge de dégager un équilibre entre ces droits antagonistes qui ne sont ni absolus, ni hiérarchisés entre eux, étant d’égale valeur dans une société démocratique ».

En l’espèce, il est jugé que M. X, étant une personnalité politique de premier plan et notamment candidat du FN aux prochaines élections municipales, l’évocation de son homosexualité et de « la supposée influence de cette orientation sexuelle sur la politique du Front National est de nature à apporter une contribution à un débat d’intérêt général puisque, dans un contexte de fort clivage entre la gauche et la droite parlementaire à l’occasion de l’adoption de la loi relative au mariage des personnes de même sexe, le Front National a montré des signes d’ouverture à l’égard des homosexuels (…) ».

Ainsi, le droit à l’information du public prime sur le droit à la vie privée de M. X, alors qu’il n’en va pas de même pour M. Z, « dont la notoriété ne dépasse pas le cadre régional ».

Alexandre BLONDIEAU

Avocat à la Cour

www.blondieau-avocats.com

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