Convocation du salarié : par huissier, par chronopost ?
Bien que l'article L. 1232-2 alinéa 2 du code du travail énonce que la convocation à l'entretien préalable au licenciement est effectuée par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge, par deux arrêts de février et mars 2011 les juges ont validé une convocation par Chronopost et par huissier de justice.
Ces modes de convocation estiment les juges ne sont destinés qu'à prouver la date de la convocation (même attendu dans les deux décisions) :
"Mais attendu que le mode de convocation à l'entretien préalable au licenciement, par l'envoi de la lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par la remise en main propre contre décharge, visé par l'article L. 1232-2 du code du travail, n'est qu'un moyen légal de prévenir toute contestation sur la date de la convocation"
"que la cour d'appel a exactement retenu que la remise par voie d'huissier de justice ne constituait pas une irrégularité de la procédure de licenciement"
(Cour de cassation chambre sociale 30 mars 2011 n° de pourvoi: 09-71412)
"que la cour d'appel a exactement retenu que l'envoi de cette convocation par le système de transport rapide de courrier dit "Chronopost", qui permet de justifier des dates d'expédition et de réception de la lettre, ne pouvait constituer une irrégularité de la procédure de licenciement" (Cour de cassation chambre sociale arrêt du 8 février 2011 n°09-40027)
Déroulement de l'entretien : pas de détournement de procédure !
Les juges veillent à faire respecter un certain équilibre durant l'entretien préalable.
Ils condamnent ce qu'ils appellent "un détournement par l'employeur de l'objet de cet entretien".
Ce "détournement" est caractérisé selon les juges par :
La présence d'un salarié de l'entreprise en différend avec le salarié convoqué à l'entretien préalable :
"la participation d'un délégué du personnel aux côtés de l'employeur durant l'entretien préalable au licenciement alors qu'il existait un différend important entre cette personne et le salarié avait empêché ce dernier de s'exprimer librement" (Cour de cassation chambre sociale arrêt du 21 juin 2011 n°10-11690)
La présence de deux responsables hiérarchiques en sus de la DRH :
"Vu l'article L. 1232-3 du code du travail ;
...la présence du chef d'agence et de la responsable des ressources humaines aux côtés du directeur régional de centre avait transformé l'entretien préalable au licenciement en enquête, et ainsi détourné la procédure de son objet" (Cour de cassation chambre sociale arrêt du 25 mars 2010 n°07-43384).
La présence non indispensable d'une salariée (hôtesse d'accueil) privant l'entretien de toute confidentialité :
"Mais attendu qu'appréciant souverainement les faits, la cour d'appel a retenu que la participation d'une hôtesse d'accueil à l'entretien préalable n'était destinée qu'à donner une publicité au conflit opposant l'employeur au salarié ; qu'elle a ainsi caractérisé un détournement par l'employeur de l'objet de cet entretien" (Cour de cassation chambre sociale arrêt du 17 juin 2009 n°: 08-15780
Enfin, sur le formalisme de la convocation à l'entretien préalable les juges n'acceptent aucun compromis :
- ni à l'égard du salarié qui demande un report de l'entretien préalable à son employeur.
Les juges considèrent que si l'article L. 1232-2 du code du travail prévoit un délai de 5 jours entre la date de la convocation à l'entretien et la date de l'entretien ce délai ne court, en cas de report demandé par le salarié "qu'à compter de la présentation de la lettre recommandée ou de la remise en main propre de la lettre initiale de convocation" (Cour de cassation chambre sociale arrêt du 9 novembre 2010 n° 09-41578
- ni à l'égard de l'employeur qui ne précise pas l'adresse de la mairie où la liste des conseillers peut être consultée condamné pour procédure irrégulière car :
"il résulte de la combinaison des articles L. 1232-4 et D. 1232-5 du code du travail que la lettre de convocation à l'entretien préalable au licenciement doit mentionner la faculté pour le salarié, lorsqu'il n'y a pas d'institutions représentatives du personnel dans l'entreprise, de se faire assister par un conseiller de son choix, inscrit sur une liste dressée par le représentant de l'Etat dans le département, et préciser l'adresse de l'Inspection du travail et de la mairie où cette liste est tenue à la disposition du salarié ; que l'omission d'une de ces adresses constitue une irrégularité de procédure ;
et ce même si la lettre de convocation "indique que cette liste est consultable à la mairie de Fort-de-France, ou à la direction départementale du travail, ce qui constitue une indication suffisante s'agissant de services dont l'adresse est connue de tous ;
La lettre de convocation doit ne mentionner l'adresse des services où la liste des conseillers peut être consultée" (Cour de cassation chambre sociale arrêt du 19 septembre 2007 n° 05-45605)
- ni en ce qui concerne "la computation des délais" clarifiée par les juges c'est à dire la méthode de décompte des fameux 5 jours ouvrables :
"La computation du délai légal de cinq jours obéit aux règles fixées par les articles 641 et 642 du code de procédure civile.
Le jour de la présentation de la lettre recommandée, qui fait courir le délai, ne compte pas.
Le dimanche, qui n'est pas un jour ouvrable, ne compte pas non plus.
Le délai expire le dernier jour, à minuit.
Le décompte doit donc débuter le 28 janvier 2009, qui était un mercredi et, ne peut être retenu dans ce décompte le 1er février 2009, qui était un dimanche." (Cour d'appel d'Angers chambre sociale arrêt du 5 juillet 2011 n° de RG: 10/01264)