SALARIÉS, OBTENEZ LE PAIEMENT DE VOTRE PRIME D’OBJECTIFS EN 2022 (2ÈME PARTIE)

Publié le 22/11/2022 Vu 968 fois 0
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Cet article prolonge le précédent article : Salariés, obtenez votre prime d’objectifs en 2022 (https://www.legavox.fr/blog/maitre-bouhana-avocat-specialiste/salaries-obtenez-paiement-votre-prime-33278.htm)

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SALARIÉS, OBTENEZ LE PAIEMENT DE VOTRE PRIME D’OBJECTIFS EN 2022 (2ÈME PARTIE)

Seront abordés les points suivants :

- La prime discrétionnaire et l’inégalité salariale ;

- L’absence de fixation des objectifs et des conditions de calcul de la prime d’objectifs et sa sanction : le paiement du bonus.

 

1. Quand un salarié victime d’inégalité salariale obtient le paiement de son bonus discrétionnaire (CA de Paris Pôle 6 Chambre 9 arrêt du 20 avril 2022 RG n°19/02264)

Un salarié Directeur Commercial France d’une société gestionnaire d’actifs faisant partie d’un groupe mondial est licencié pour insuffisance professionnelle, ce qu’il conteste devant la Cour en sollicitant le règlement de son bonus discrétionnaire en invoquant une inégalité salariale.

Effectivement non seulement tous les membres de son équipe avaient obtenu le versement d’un bonus, tout comme l’ensemble des salariés de l’entreprise coefficient 700 comme lui dont 2 Gestionnaires d’actifs avec lesquels il se compare.

La société contestait l’inégalité de traitement au regard du caractère discrétionnaire du bonus, et de la comparaison selon elle inappropriée avec les Gestionnaires d’actifs qui ne permettrait aucune comparaison en termes de compétences, fonctions et responsabilités avec le salarié.

La Cour rappelle que « le caractère discrétionnaire d’une rémunération ne permet pas à un employeur de la traiter différemment des salariés placés dans une situation comparable au regard de l’avantage considéré » (En savoir plus : Salariés, sachez contester les inégalités de votre rémunération), elle constate que le salarié a perçu régulièrement chaque année un bonus sauf pour l’année 2016 précédent son licenciement où pour la première fois il n’a fait l’objet d’aucun entretien annuel d’évaluation, puis au vu des pièces communiquées juge que « les objectifs (fixés) ont été atteints ».

Elle observe que « les différents salariés membres de l’équipe (du salarié) ont tous bénéficié d’un bonus (en 2016)… ce qui est à tout le moins de nature à permettre de retenir que les résultats et objectifs attendus de l’équipe ont été atteints au titre de l’année 2016 et que l’équipe commerciale dirigée par (le salarié) a fonctionné de manière satisfaisante », relevant que l’absence de tout entretien d’évaluation du salarié ne permet pas d’imputer au salarié les carences de management alléguées dans la lettre de licenciement.

S’agissant des salariés avec lesquels le salarié se compare, la Cour considère que la société ne démontrerait pas que les 2 Gestionnaires d’actifs au même coefficient 700 que le salarié n’auraient pas un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle… un niveau hiérarchique comparable… des responsabilités d’importance comparable… des fonctions engendrant une charge nerveuse du même ordre, (le salarié) apparaissant ainsi avoir effectué un travail de valeur égale à ceux des 2 gestionnaires d’actif concernés…. le fait que (le salarié) soit le seul à avoir la qualité de directeur commercial France alors que les (autres cadres) avaient des fonctions de gérants d’actifs… est inopérant pour dénier l’existence d’un travail de valeur égale,…alors que… la société ne bénéficie de fonds confiés à la gestion d’actifs que si (le salarié) a lui-même préalablement accompli avec succès ses fonctions de commercialisation (En savoir plus : Salariés, sachez contester les inégalités de votre rémunération).

« L’employeur a dès lors méconnu le principe d’inégalité de traitement », il est condamné à un rappel de bonus calculé à partir de la moyenne du bonus versé aux 2 Gestionnaires d’actifs avec lesquels le salarié se compare (En savoir plus : Salariés, obtenez le paiement de votre prime d’objectifs).

 

2. L’absence de fixation du bonus et les conditions de son calcul (5 arrêts)

Le principe est désormais bien connu : l’employeur doit fixer les objectifs du salarié en début d’exercice et lui communiquer les modalités de calcul de sa prime. A défaut il est condamné au paiement du bonus : 11 décisions à connaitre pour obtenir le paiement de sa prime d’objectif en 2021 et Salariés, obtenez votre prime d’objectif en 2019.

Voici une analyse des dernières décisions rendues sur ce point.

 

  • 1er arrêt (CA de Nancy Chambre sociale 15 avril 2022 RG 21/01416)

Un Directeur des Ressources Humaines en arrêt de travail prend acte de la rupture de son contrat de travail et sollicite des demandes de rappel de bonus.

Il explique n’avoir jamais eu d’entretien annuel fixant ses bonus, la société lui rétorquant qu’aucun bonus n’a été versé au salarié de l’entreprise compte tenu des résultats économiques et financiers.

Pour rappel, les difficultés financières ne sont pas suffisantes pour justifier l’absence de paiement du bonus : Obtenir votre prime d’objectif : ce qu’il faut retenir en 2021.

Aucune des pièces produites par l’employeur ne justifie « d’une évaluation chiffrée du pourcentage à appliquer pour le calcul du bonus… la société X ne produit aucun document justifiant de cette évaluation chiffrée… (elle) présente un tableau indiquant les bases de calcul du bonus 2019… (mais) aucune pièce ne justifie les chiffres présentés dans ce tableau ».

La cour relève une bonne appréciation du travail du salarié, une variation du bonus entre 0 et 20% de la rémunération annuelle brute du salarié avec un coefficient individuel appliqué au salarié de « 1 » qui n’est pas cohérent avec la bonne appréciation de son travail.

L’employeur est condamné au rappel du bonus dont il n’a pas justifié des conditions de calcul pour 2018.

Pour le bonus 2019, la société arguait de déficit n’ayant pas permis de verser au bonus aux Cadres de l’entreprise avec une perte de 6 millions d’euros, la DRH de l’entreprise attestant « qu’aucune part variable n’a été versée en 2020 au titre de l’exercice 2019 aux cadres ».

La cour juge néanmoins que « cette unique pièce ne justifie pas des motifs d’absence de versement de bonus », alors que l’évaluation individuelle du salarié pourtant nécessaire au calcul du bonus n’est pas communiquée, la société ne justifiant pas de manière suffisante de l’absence de versement du bonus 2019.

 

  • 2ème arrêt (CAppel de Versailles 13 avril 2022 RG n°19/03432)

Un Directeur de recherche groupe est licencié pour faute grave et sollicite sa rémunération variable qu’il a toujours perçu depuis son embauche.

La Cour relève que « l’employeur n’apporte aucune information précise sur la fixation des objectifs fixés pour partie collective et partie individuelle pour 2017 sauf à indiquer qu’elle a été arrêtée pour tous les salariés à 95% de la prime pouvant être atteinte.

Dès lors il sera fait droit à la demande du salarié pour la somme réclamée, qui reste dans la limite celle-fixée contractuellement et non sur la base de 80% réclamé par l’employeur non justifié au dossier ».

 

  • 3ème arrêt (CA de Paris 6 avril 2022 RG n°19/03256)

Un Cadre commercial refuse de signer un avenant modifiant sa rémunération variable.

Licencié pour cause réelle et sérieuse il sollicite un rappel de commissions qu’il obtient « faute pour (l’employeur) de produire son chiffre d’affaires effectif pour l’année 2017 ».

 

  • 4ème arrêt (CA de Reims 23 février 2022 RG n°20/01222)

Un Ingénieur commercial et marketing saisit le Conseil de Prud’hommes en résiliation judiciaire et sollicite un rappel de prime sur exercice clos. L’employeur prétendait que le salarié avait atteint 79,6% des objectifs fixés au lieu du seuil de 80% exigé.

La Cour observe que l’employeur ne justifiait pas que les objectifs avaient bien été notifiés au salarié et que celui-ci n’aurait pas atteint les objectifs fixés pas plus que le montant qu’elle avait retenu au titre de la prime qui différenciait de celui demandé par le salarié.

Relevant « qu’aucune pièce n’établit le montant de la prime » la Cour rappelle qu’il appartient à la cour de le déterminer en fonction des données de la cause, elle le condamne à une somme égale à la moyenne des 3 derniers bonus perçus par le salarié.

 

  • 5ème arrêt (CA de Versailles 3 février 2022 RG n°19/02020)

Un Directeur juridique risque en maladie non professionnelle est déclaré apte à reprendre son travail par le Médecin du travail sous réserve de déplacements réduits. Un an et demi plus tard le salarié est convoqué à un entretien préalable puis est licencié décision qu’il conteste en réclamant son bonus.

L’employeur contestait toute somme due à ce titre arguant que le salarié absent ne contribuait pas au résultat du groupe et ne pouvait pas prétendre au versement d’un bonus pendant sa période d’absence. Mais suivant la convention collective le salarié bénéficiait d’un maintien total puis partiel de sa rémunération, le contrat de travail du salarié n’exigeant pas la présence effective du salarié en contre partie du versement de la prime variable.

La Cour relève l’obligation par l’employeur de communiquer au salarié « chaque année… au salarié (sa rémunération fixe et le montant de son bonus cible), des objectifs étant fixés en début d’exercice… », le salarié ayant perçu chaque année des bonus substantiels de 180 000 à 100 000 euros jusqu’à son arrêt maladie date à laquelle il n’a plus perçu de prime variable.

Cette prime variable comprenait une partie liée au résultat financier du groupe à hauteur de 60%, la société affirmant n’avoir atteint que 39,40% des objectifs fixés sans communiquer néanmoins les données chiffrées fondant ce montant.

La Cour fixe donc la prime due « en fonction des critère visés au contrat… (et) des engagements de la société se déduisant de l’article 16 de la convention collective ».

Pour la prime 2017, la Cour observe que la société n’a pas précisé les objectifs à atteindre au salarié et évalue l’objectif du au salarié « en tenant compte de son travail effectif ». Pour 2018, la Cour fixe la prime d’objectif due au prorata du temps de présence du salarié absent une partie de l’année en arrêt.

 

Ces 5 arrêts rendus confortent l’obligation pour l’employeur de préciser les objectifs au salarié en début d’exercice ainsi que les modalités de calcul de sa prime d’objectifs.

Les Juges du fond analysent précisément les documents contractuels et les accords d’entreprise La sanction radicale du paiement de la prime d’objectifs au salarié constitue une remarquable protection au droit du salarié à sa rémunération variable.

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