LE MARIAGE EST UN DROIT FONDAMENTAL
Le droit au mariage est garanti par la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH, art. 12).
Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (CEDH, art. 8).
Chacun a droit au respect de sa vie privée (C. civ. art. 9).
La loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci (C. civ. art. 16).
Ces dispositions sont d'ordre public (C. civ. art. 16-9) et nul ne peut y déroger.
APPRÉCIATION SOUVERAINE DE LA VOLONTÉ DE SE MARIER
Comment les juges apprécient-ils l’intention matrimoniale ?
Pour apprécier la réalité du consentement dans le mariage in extremis, les juges ont le pouvoir d’interpréter la manifestation de la volonté émise au moment de la célébration du mariage, comme exprimant un consentement au mariage.
- Si, lors de la célébration du mariage, l'un des époux, mourant, ne peut plus parler, les juges du fond peuvent admettre que la réalité de son consentement lucide et réfléchi au mariage résulte de son attitude lors de la cérémonie[1].
La validité du consentement au moment de la célébration peut s'apprécier à la lumière des comportements et événements précédents[2].
- Ainsi jurisprudence admet la validité du mariage in extremis d’un malade semi-conscient[3].
- Dans un mariage in extrémis célébré 2 jours avant le décès, les juges ont souverainement interprété le râle émis par le mari devant l’officier d’état civil comme une volonté d’épouser sa femme, conformément au souhait déjà exprimé à plusieurs reprises devant le personnel soignant lors de sa sortie de l’hôpital en phase terminale de sa maladie [4].
- L'intention matrimoniale des époux doit s'apprécier au vu des circonstances qui ont précédé le mariage mais aussi de leur attitude après la célébration.
Force est de constater que l'union est intervenue après une relation ininterrompue pendant plus de 5 années, traduisant une entente véritable des époux.
L'absence de cohabitation permanente des époux ne peut équivaloir à un défaut de communauté de vie, alors que des époux peuvent avoir des domiciles distincts.
Il apparaît à l'inverse que l'épouse s'est rendue au chevet de son mari lors de son hospitalisation dans le cadre de son devoir d'assistance.
L'ensemble de ces éléments ne démontre ni l'absence d'intention matrimoniale, ni que l'épouse poursuivait en se mariant un intérêt exclusivement patrimonial. [5].
- Pour la Cour de cassation, le seul défaut de cohabitation ne permet pas de déduire le non-respect des règles relatives à la communauté de vie et le fait que le mariage avait pour seul but de bénéficier d'un contrat de mariage très avantageux [6].
- Pour la cour d'appel de Lyon il ne peut être tiré argument de la brièveté de la vie commune après le mariage pour en déduire de façon rétroactive l'existence au jour de la célébration du mariage d'un défaut de consentement[7].
LA SANCTION DE L’ABUS DU DROIT D’AGIR EN NULLITÉ
Réparation de l’atteinte à l’honneur et à la dignité du conjoint survivant
Le droit de contester la réalité du consentement à mariage, n’implique pas le droit de dénigrer outrageusement le conjoint survivant.
La faute intentionnelle du demandeur, consistant à accuser l’épouse de son fils décédé de vénalité, a été jugée comme portant atteinte à son honneur et à sa réputation.[8]
Appréciant souverainement les attestations et témoignages produits, les juges ont considéré que la volonté du père était de discréditer l’épouse en qualifiant sa motivation principale de « vénale ».
Le comportement du père ayant été jugé fautif, celui-ci a été condamné au paiement de dommages et intérêts.
Je suis à votre disposition votre disposition pour vous conseiller.
Claudia CANINI
Avocat à la Cour
[1] Cass. 1ère civ., 22 janv. 1968
[2] Cour d’appel, Paris, 10 sept. 1996
[3] Cour d’appel, Bourges Ch. Civ. 10 janvier 2013
[4] Cass. 1ère civ., 31 janv. 2006
[5] Cour d'appel, Toulouse, 1ère ch., 2e sect., 11 Juin 2013
[6] Cour de cassation, 1ère chambre civile, 12 oct. 2011
[7] Cour d'appel, Lyon, 2e chambre, 17 Octobre 2011 - n° 10/04754
[8] Arrêt précité, Cass. 1ère civ., 31 janv. 2006