Divers mécanismes dans la poursuite pénale ont été envisagés par le legislateur: la plainte simple, la plainte avec constitution de partie civile, la citation directe.
Cette dernière permet à une victime de saisir directement le tribunal de police ou correctionnel et d’être « partie au procès pénal ».
Autrement dit, elle déclenchera l’action publique en vue de solliciter à la fois la condamnation du prévenu de l'infraction pour trouble à l’ordre public ( délit ou contravention) et une réparation du préjudice subit par la victime. ( dommages-intérêts)
La citation directe présentera un avantage certain, pour une personne qui dispose de moyens de preuves solides, pour s'éviter malgré tout le classement sans suite d'une plainte simple; si fréquamment prononcé par les parquets...
I- La signification d'une citation directe
A) la forme
1°- Un exploit d'huissier
Il résulte de l'article 390 du Code de procédure pénale que la citation est délivrée par exploit ( acte) d’huissier et à personne dénommée et est constatée par un procès-verbal signé par le prévenu qui en reçoit copie.
2°- Les mentions légales
La partie civile, qui cite directement un prévenu devant un tribunal répressif, fait, dans l'acte de citation, élection de domicile dans le ressort du tribunal saisi, à moins qu'elle n'y soit domiciliée.
Elle informe le prévenu qu'il doit
-comparaître à l'audience en possession des justificatifs de ses revenus ainsi que de ses avis d'imposition ou de non-imposition, ou les communiquer à l'avocat qui le représente.
Elle énonce le fait poursuivi,
vise le texte de loi qui le réprime et indique le tribunal saisi, le lieu, la date et l'heure de l'audience.
Elle précise,que le prévenu peut se faire assister d'un avocat.
Elle l'informe également que le droit fixe de procédure dû en application du 3° de l'article 1018 A du code général des impôts peut être majoré s'il ne comparaît pas personnellement à l'audience ou s'il n'est pas jugé dans les conditions prévues par les premier et deuxième alinéas de l'article 411 du présent code.
Article 392-1 du Code de Procédure pénale
Lorsque l'action de la partie civile n'est pas jointe à celle du ministère public, le tribunal correctionnel fixe, en fonction des ressources de la partie civile, le montant de la consignation que celle-ci doit, si elle n'a pas obtenu l'aide juridictionnelle, déposer au greffe et le délai dans lequel elle devra être faite sous peine de non-recevabilité de la citation directe. Cette consignation garantit le paiement de l'amende civile susceptible d'être prononcée en application du second alinéa.
B) Les délais de signification
10 jours avant l'audience, qui peut être prorogé de
--1 mois en cas de résidence dans les DOM -TOM pour une audience en métropole et inversement
-- 2 mois en cas de résidence à l'étranger.
L’irrespect de ce délai, permettrait au prévenu qui se présenterait malgré tout à l'audience d’obtenir le renvoi du dossier à une audience ultérieure..
II-Les risques dans le choix de la citation directe
A) Si la citation directe permet une saisine directe, rapide et expéditive du tribunal...
1°) une saisine directe du tribunal par assignation
L’auteur de l’infraction sera cité devant la juridiction de jugement sans que le plaignant ne dépende de l’opportunité des poursuites du Procureur de la République et/ou à celle d’un juge d’instruction.
2°) une procédure rapide
La citation est délivrée sans attendre la réponse du parquet et le délai de silence de 3 mois qui signifie « classement sans suite ». dans un délai d'au moins dix jours avant l'audience dans les cas les plus classiques ( prorogé de 1 ou 2 mois selon les cas boir B))
3°- une procédure expéditive
Elle évite toute la phase de l'instruction et surtout le classement sans suite du procureur.
B) ... en revanche, elle peut être critiquée sur certains points.
1°) un formalisme sous peine de nullité
Y aller sans avocat supposerait que le plaignant soit au fait des règles de droit pénal et de la procédure .
L'avocat sera donc nécessaire, même s'il n'est pas obligatoire.
Une mention omise ou un délai non respecté et c'est la nullité encourue.
2°) des frais à avancer
-- de citation d’huissier
-- de consignation sous peine d’irrecevabilité qui vise à couvrir les frais de justice et l’amende civile éventuelle en cas de citation abusive et vexatoire.
Son montant est fixé par le tribunal, en fonction des ressources du plaignant et doit être déposé au greffe sous un délai fixé par le tribunal.
Rappel : Article 392-1 du CPP
Lorsque l'action de la partie civile n'est pas jointe à celle du ministère public, le tribunal correctionnel fixe, en fonction des ressources de la partie civile, le montant de la consignation que celle-ci doit, si elle n'a pas obtenu l'aide juridictionnelle, déposer au greffe et le délai dans lequel elle devra être faite sous peine de non-recevabilité de la citation directe. Cette consignation garantit le paiement de l'amende civile …
3°) des règles de preuve complexes pour le plaignant
Ici le demandeur ou plaignant ne bénéficie pas du résultat d’une enquête judiciaire et des moyens d’investigation de l’instruction, mis en œuvre ( commissions rogatoires .)
ll faut prouver des faits caractérisés (infraction) la preuve de l’infraction,mais aussi la réalité du préjudice subi.
Dans le cadre de l’audience et des débats il conviendra de prouver la réalité des faits délictueux invoqués et celle de son préjudice.
Autrement dit, sans preuves réunies par la victime, pas de condamnation et le risque d’une relaxe.
4°) une procédure impossible en cas d'incertitude de l’identité du "prévenu"
Cette procédure ne peut se concevoir que si l'identité du prévenu est connue. C"est une procédure à personne dénommée.
5°- un ralentissement du dossier possible au regard des audiences
Plusieurs audiences seront utiles avant que l’affaire soit en état d’être plaidée.
La première et incontournable, est l’audience de fixation du montant de la consignation. Ensuite, dans le cas où le prévenu décide de prendre un avocat pour préparer sa défense, quelques mois supplémentaires peuvent être gagnés ( renvoi, jusqu’à ce que la date des plaidoiries soit fixée)
6°) des conséquences financières en cas de relaxe et de renvoi des fins de la poursuite à l'encontre du plaignant: dommages et intérêts et/ou amende civile
-- le paiement des frais de procès et des dommages et intérêts éventuellement dus à la victime pour le préjudice causé
-- le risque d’une amende civile dont le montant peut atteindre 15000 €.
Article 392-1 alinéa 2 du CPP
« …Lorsque le tribunal correctionnel, saisi par une citation directe de la partie civile, prononce une relaxe, il peut, par ce même jugement, sur réquisitions du procureur de la République, condamner la partie civile au paiement d'une amende civile dont le montant ne saurait excéder 15 000 euros s'il estime que la citation directe était abusive ou dilatoire. Les réquisitions du procureur de la République doivent intervenir avant la clôture des débats, après les plaidoiries de la défense, et la partie civile ou son avocat doivent avoir été mis en mesure d'y répliquer. Les dispositions du présent alinéa sont également applicables devant la cour d'appel, lorsque le tribunal correctionnel a, en premier ressort, relaxé la personne poursuivie et statué sur des réquisitions du procureur de la République tendant à la condamnation de la partie civile en application des dispositions du présent alinéa. »
7°) un risque de poursuites du plaignant pour dénonciation calomnieuse en cas de relaxe
L'article 226-10 du code pénal dispose désormais :
« la fausseté du fait dénoncé résulte nécessairement de la décision, devenue définitive, d'acquittement, de relaxe ou de non-lieu, déclarant que le fait n'a pas été commis ou que celui-ci n'est pas imputable à la personne dénoncée ».
Demeurant à votre disposition pour toutes précisions.
Maître HADDAD Sabine
Avocate au barreau de Paris