Lorsqu’une personne comparaît devant ses juges, en cas d'infraction pénale, elle s’expose à diverses sanctions, à savoir: une peine principale liée à l'infraction contraventionnelle, délictuelle ou criminelle, (ex amende, prison.) une ou des peine(s) complémentaire(s) associée(s ( ex interdiction d'exercer des droits civiques, une activité économique) et à une peine accessoire automatiquement et implicitement applicable.
En France, la peine maximale étant la réclusion criminelle à perpétuité, assortie d'une mesure "de sûreté", (l'impossibilité pour le condamné de bénéficier d'une remise de peine ou d'une libération conditionnelle avant la fin de la période de sûreté incompressible, qui peut être aller jusqu’à 22 ans.
En principe, en cas de commission de plusieurs infractions, notre droit pénal, en vertu de l'article 132-3 du Code Pénal pose un principe : celui de non-cumul des peines de même nature (avec pour corollaire : le principe de cumul des peines de nature différente). De ce fait l’auteur d’infractions multiples n’exécutera, sauf exceptions, qu’une seule peine,la plus forte,laquelle absorbera les peines les moins élevées.
Prenons un exemple concret. Une même personne est condamnée
pour crime punit de réclusion criminelle à 15 ans ,puis dans le cadre d'une autre poursuite à 5 ans de prison + à une amende pour un délit.
Le code pénal autorise la punition à la réclusion criminelle, peine la plus forte d'enfermement et à la peine d'amende délictuelle, car l'enfermement et la sanction pécuniaire ne seront pas de même nature. Elle se cumuleront.
Ce principe subit des applications différentes selon qu’il y aura poursuite unique ou pluralité de poursuites.
Dans ce dernier cas,lorsqu’une personne aura fait l’objet de plusieurs condamnations,il n’est pas rare de voir parler de « confusion » de la peine (absorption des peines les moins graves par la peine la plus grave ), perçue comme une faveur du Tribunal, sauf lorsqu’elle est de droit. De quoi s’agit-il ?
I- Rappels des principes liés au concours d'infractions qualifiées crime ou délit.
A) Notions de cumul réel ou idéal d'infraction.
Les concours d’infractions sont prévus par les articles 132-2 et suivants du Code pénal.
Cette notion recouvre les situations dans lesquelles un prévenu commet plusieurs infractions avant d’avoir été définitivement condamné pour l’une d’elles.
On peut distinguer au sein des concours: le concours réel de qualification et le concours idéal d'infractions.
1°- Le concours réel
L'auteur commet plusieurs faits matériels successifs, dont chacun constitue à lui seul une infraction) ex violation de domicile + violences.
Article 132-2 du code pénal
Il y a concours réel d’infraction lorsqu’une infraction est commise par une personne, avant que celle-ci ait été définitivement condamnée pour une autre infraction, ou que plusieurs infractions distinctes ne sont séparées les unes des autres par une condamnation définitive.
2°- Le concours idéal
L'auteur commet un fait unique, susceptible de plusieurs qualifications pénales, dont il faudra choisir l'une d'entre elles.
ex : des violences ayant entraîné la mort pourront être qualifiées : d’assassinat, de meurtre, de violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner, ou d'homicide involontaire.
ex un vol avec effraction constitutif à la fois de vol simple, de violation de domicile et de vol aggravé.
Ce fait unique ne donnera en principe lieu qu’à une qualification et donc à une seule peine.
Se posera la question de la meilleure qualification à retenir: la plus sévère pouvant être relevée.
B) Le principe du non cumul des peines de même nature.
1°- La règle générale : en cas de poursuite unique
Si plusieurs peines privatives de libertés sont encourues, lors de la poursuite, le juge pourra prononcer chacune des peines encourues, principales et complémentaires.
Cependant dans le cas où plusieurs peines de même nature sont encourues, il ne pourra prononcer qu’une seule peine de cette nature dans la limite du maximum légal de la peine la plus élevé prévu pour l’une des infractions en concours.(article 132.3 du Code pénal)
2°- Les exceptions: les possibilités de cumul des peines
- pour les peines de même nature, dans la limite du maximum légal le plus élevé en cas de poursuites séparées.
Pour la détermination du maximum légal, il sera tenu compte de l’état de récidive.(articles 132.4 et 132.5 du code pénal)
- en matière contraventionnelle,
- en matière de fixation de dommages et intérêts qui constituent des réparations,ou
- d’amende fiscale, ou
- de peines complémentaires.
Ainsi, les peines de natures différentes (pécuniaire, privative de droit, etc.) peuvent se cumuler entre elles, mais toujours dans la limite du maximum le plus élevé prévu par une infraction pour chacune des catégories.
II- Le régime d’application des peines en cas de concours d’infractions selon qu'il y ait une poursuite unique ou des poursuites séparées.
Examinons de plus près les principes posés liés au non cumul des peine posés au I-B)
A) En cas de poursuite unique
Nous avons exposé que si le condamné est reconnu coupable de plusieurs infractions en concours, le juge pénal, au regard de plusieurs infractions relevées pourra prononcer chacune des peines encourues, principales et complémentaires.
Cependant Lorsque plusieurs peines de même nature sont encourues, une seule peine de chaque nature peut être prononcée, dans la limite du maximum légal. (article 132.3 du code pénal).
Exemple : concours entre un vol simple (3 ans) et une escroquerie (5 ans). S'agissant de peines de mêmes nature, que se passera-t-il ?
En cas de poursuites uniques le cumul ne peut être supérieur au maximum légal soit 5 ans de prison.( maximum possible de prison et de l'amende).
B) En cas de poursuites séparées : possibilité de cumuler les peines de même nature,mais dans la limite du maximum légal le plus élevé.
1°- Le juge veillera au respect du principe "non bis in idem"
Le juge veillera avant tout, au respect du principe "non bis in idem" qui interdit de sanctionner plusieurs fois un même fait et ce ,même sous une autre qualification, (sauf lorsque la loi le prévoit comme par exemple dans la mise en œuvre de la récidive ou pour établir l’existence d’une infraction d’habitude).
2°- Le cumul des peines de même nature limité
Les peines prononcées s’exécuteront ici, cumulativement, mais toujours dans la limite du maximum légal le plus élevé.
En cas de concours idéal la plus haute qualification sera retenue.
C'est ce que bous rappelle le code pénal.
Article 132-4 du code pénal
Lorsqu'à l'occasion de procédures séparées, la personne poursuivie a été reconnue coupable de plusieurs infractions en concours, les peines prononcées s'exécutent cumulativement dans la limite du maximum légal le plus élevé. Toutefois, la confusion totale ou partielle des peines de même nature peut être ordonnée soit par la dernière juridiction appelée à statuer, soit dans les conditions prévues par le code de procédure pénale.
C) Confusion automatique ou facultative ?
1°- La confusion automatique
Si la peine résultant d’un cumul est supérieure au maximum de la peine encourue pour l’infraction sanctionnée le plus sévèrement, elle devra être obligatoirement réduite jusqu’à concurrence de ce maximum.
Ainsi, la confusion s’opérera de plein droit entre les peines de même nature,à hauteur du maximum le plus élevé encouru pour l’une des infractions.
Ainsi les peines seront confondues automatiquement dans ce cas , lorsque le cumul des peines de même nature prononcées pour plusieurs infractions en concours est supérieur à la peine encourue par l'infraction la plus sévèrement réprimée.
Ainsi, deux ou plusieurs peines de même nature sont exécutées simultanément dans la limite de la peine la plus forte.
Reprenons notre exemple précédent.
Un concours entre un vol simple (3 ans) et une escroquerie (5 ans).
En cas de poursuites séparées si la première décision prononce 3 ans pour le vol et la seconde 5 ans pour l’escroquerie.
Le cumul est donc de 5 + 3 = 8 ans, soit un cumul supérieur à la peine la plus sévère maximale de 5 ans.
De ce fait, on considèrera que le détenu a été condamné à 5 ans; soit au maximum encouru.
La confusion peut s'appliquer aussi à des peines complémentaires
2°- La confusion facultative
C’est lorsque le maximum n’aura pas été atteint, que se posera la confusion facultative des peines de même nature pour obtenir que la peine la plus forte prononcée englober une ou des peines plus légères.(II)
Une personne condamnée pourra saisir le juge d’une demande de confusion, facultative, dans l’espoir de n’exécuter qu’une peine inférieure au maximum légal le plus élevé.
Imaginons une décision qui prononce 2 ans pour un vol et 2 ans pour l'escroquerie. Total 2+2=4 ans (inférieur au maximum légal encouru de 5 ans)
Dans la mesure où le système des poursuites séparées peut défavoriser un prévenu jugé dans ce par rapport à l'individu jugé au cours d'une même procédure, la possibilité de demander, lors du prononcé des peines, ou ultérieurement la confusion des peines a été envisagée.
III- Les conditions de recevabilité de la requête en confusion :
A) Les conditions légales
1°- Les deux peines doivent être de même nature prononcées par des juridictions, exécutables ou exécutées en partie (ex: deux peines privatives de liberté, (emprisonnement…) ou deux peines d'amende...
Il doit d’agit d’un crime ou d’un délit
2°-Les infractions ne doivent pas être commises en état de réitération ou de récidive.
La réitération suppose que la personne déjà condamnée définitivement pour un crime ou un délit commette une nouvelle infraction, qui ne répond pas aux conditions de la récidive légale.
Les peines prononcées dans ce cas se cumulent sans limitation de quantum et sans possibilité de confusion avec les peines définitivement prononcées lors de la condamnation précédente.
La récidive légale suppose par exemple qu’une personne condamnée à une peine de vol aura dans les cinq ans qui suivront la date à laquelle cette condamnation sera devenue définitive, commis un nouveau délit du même type…
3°- Les infractions doivent avoir été commises en concours.
Elles ne doivent pas être définitives dans leur rapport entre elles.
Ainsi, les faits de la poursuite visant la seconde (ou 3ème…) condamnation doivent être commis avant que la première (ou seconde ) condamnation ait acquis un caractère définitif.
Dès que la condamnation devient définitive, il n’existe plus de confusion possible.
Rappel deux ou plusieurs peines de même nature seront exécutées simultanément dans la limite de la peine la plus forte encourue.
De ce fait, un prévenu ou un accusé condamné pour plusieurs crimes ou délits non séparés par un jugement définitif (en concours) et en l'absence de condamnation pour un autre crime ou délit antérieur aux infractions en concours n'exécutera que la peine la plus lourde.
B) La nécessité de déposer une requête auprès de la juridiction qui a rendu la dernière décision comportant des peines devant être confondues avec les précédentes
1°- La demande peut se faire en cours d'audience.
2°- La demande peut se faire par une requête séparée.
Ce qui à mon sens est plus prudent, en cas de refus de la première décision, dans le cadre d'un appel.
Le prévenu ou le condamné devra saisir la dernière juridiction, appelée à statuer laquelle ordonnera la confusion ians les conditions de l’article 710 du C.P.P.
seront ainsi compétentes :
° La juridiction saisie de la dernière infraction ;
° La chambre de l’instruction en matière criminelle de la cour d'appel.
Si en dernier lieu la cour d'assises a statué.
Une copie de la requête sera adressée au parquet (Procureur de la République) pour avis.
C) Une faveur accordée par le Tribunal
La confusion n'est pas automatique, elle est à la discrétion du juge qui peut également la rejeter totalement ou l'accorder partiellement ou en totalité.
La juridiction saisie de la requête en confusion a un large pouvoir d'appréciation de l'opportunité de celle-ci.
Il s’agit d’une faveur.
Demeurant à votre entière disposition pour toutes précisions.
Sabine HADDAD
Avocate au Barreau de Paris