On a tendance à assimiler la contrainte ou l’obligation alimentaire au devoir de secours.
Il s’agit d’apporter à un membre de sa famille, dans le besoin, une assistance matérielle (ascendant, descendant).
On parlera de devoir de secours, car cela suppose que le membre ne puisse pas subvenir seul à ses besoins et nécessite une aide indispensable, ce qui suppose aussi qu’en cas de meilleure fortune l’obligation pourra cesser.
L’aide alimentaire, s’entendra aux besoins fondamentaux de la personne, à savoir nourriture, habillement, soins, logement, etc. Si dans 95% des cas, la pension est versée en espèces, rien n’empêcherait de proposer un versement en nature ( hébergement)
Article 208 du code civil : Les aliments ne sont accordés que dans la proportion du besoin de celui qui les réclame, et de la fortune de celui qui les doit. Le juge peut, même d'office, et selon les circonstances de l'espèce, assortir la pension alimentaire d'une clause de variation permise par les lois en vigueur.
Article 209 du code civil : Lorsque celui qui fournit ou celui qui reçoit des aliments est replacé dans un état tel, que l'un ne puisse plus en donner, ou que l'autre n'en ait plus besoin en tout ou partie, la décharge ou réduction peut en être demandée.
Cette contrainte, à défaut d’être spontanée, nécessitera une intervention, et une décision du juge aux affaires familiales du Tribunal de Grande Instance dont relèvera le créancier de l'aide alimentaire, autrement dit, le membre de la famille qui aura besoin d’aide…
Je ne traiterai pas dans cet article de la prestation compensatoire, laquelle revêt un caractère non pas alimentaire, mais indemnitaire dans le jugement de divorce, en vue de compenser les disparités dans les conditions de vies respectives des époux, ( perte de qualité de vie après le divorce ) et qui s’apprécie en fonction de divers critères définis par l’article 271 du code civil.
I- Qui sont les « débiteurs » de la contrainte alimentaire ?
Ceux-ci sont principalement exposés sous les articles 203 et suivants du code civil au Chapitre V : Des obligations qui naissent du mariage.
A) les parents envers les enfants.
Article 203 du code civil
Les époux contractent ensemble, par le fait seul du mariage, l'obligation de nourrir, entretenir et élever leurs enfants.
B) Les enfants envers leurs parents ou ascendants dans le besoin et réciproquement
Article 205 du code civil
Les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin.
L’obligation alimentaire entre ascendants et descendants est réciproque.
Ainsi, en l'absence des parents ou si ces derniers n’ont pas de moyens suffisants, les grands parents seront tenus envers leurs petits-enfants
C) Les gendres et brus envers leurs beaux-parents et inversement, à moins que le conjoint ou les enfants issus de l'union soient décédés.
Article 206 du code civil
Les gendres et belles-filles doivent également, et dans les mêmes circonstances, des aliments à leur beau-père et belle-mère, mais cette obligation cesse lorsque celui des époux qui produisait l'affinité et les enfants issus de son union avec l'autre époux sont décédés.
Article 207 du code civil
Les obligations résultant de ces dispositions sont réciproques.
D) Les conjoints entre eux
1°-Durant l’union
chaque conjoint doit contribuer aux charges du ménage en proportion de ses ressources
2°-Durant l’instance en divorce
Article 255-6° du code civil
Le juge peut notamment : 6° Fixer la pension alimentaire et la provision pour frais d'instance que l'un des époux devra verser à son conjoint, désigner celui ou ceux des époux qui devront assurer le règlement provisoire de tout ou partie des dettes
Le devoir de secours pourra prendre aussi la forme d’une attribution à l'un d'eux de la jouissance du logement et du mobilier du ménage à titre gratuit (article 255-5° du code civil)
A la pension de l’époux, s’ajoutera la pension pour l’enfant
3°- Durant et au-delà de la décision de la séparation de corps, puisque les conjoints restent mariés
E) Le partenaire Pacsé
L’article 515-4 du Code Civil dispose que « les partenaires liés par un pacte civil de solidarité s’engagent …à une aide matérielle et une assistance réciproque. ».
Cette aide sera proportionnelle aux facultés respectives des partenaires, sauf convention contraire.Elle sera due durant le contrat.
F) L’adoptant envers l’adopté et inversement
Article 367 du code civil
L'adopté doit des aliments à l'adoptant s'il est dans le besoin et, réciproquement, l'adoptant doit des aliments à l'adopté. Les père et mère de l'adopté ne sont tenus de lui fournir des aliments que s'il ne peut les obtenir de l'adoptant. L'obligation de fournir des aliments à ses père et mère cesse pour l'adopté dès lors qu'il a été admis en qualité de pupille de l'Etat ou pris en charge dans les délais prescrits à l'article L 132-6 du code de l'action sociale et des familles
Son montant varie en fonction des besoins des ressources de celui qui la verse et des besoins du demandeur.
II- Quelles formes prendra « la contrainte » alimentaire ?
A) Une pension alimentaire pour l’entretien et l’éducation de l’enfant versée par le parent qui n’a pas la résidence de l’enfant sous forme de numéraire
D’emblée, j’ajouterai, que ce versement n’est pas à exclure en cas de résidence alternée, au regard des ressources des parents et des besoins de l’enfant, il n’est pas exclu que l’un des parents en soit débiteur
L’article 373-2-2 du code civil dispose:
" en cas de séparation entre les parents, ou entre ceux-ci et l'enfant, la contribution à son entretien et à son éducation prend la forme d'une pension alimentaire versée, selon le cas, par l'un des parents à l'autre, ou à la personne à laquelle l'enfant a été confié.
Les modalités et les garanties de cette pension alimentaire sont fixées par la convention homologuée visée à l'article 373-2-7 ou, à défaut, par le juge.
Cette pension peut en tout ou partie prendre la forme d'une prise en charge directe de frais exposés au profit de l'enfant.
Elle peut être en tout ou partie servie sous forme d'un droit d'usage et d'habitation."
B) La contrainte alimentaire envisageable en nature dans certaines situations: la nourriture ou/et l’hébergement du créancier d’aliment
Une jouissance gratuite du logement durant l’instance en divorce, est assimilable à un avantage en nature, qui est pris en compte au titre de la pension alimentaire, de même que l’assistance ou l'hébergment du créancier d’aliment.
Ainsi par le paiement de la maison de retraite d’un ascendant, et ce quelque soit la nature de la filiation, le paiement de frais médicaux
C) Une contrainte qui cesse en cas de grave manquement à ses devoirs par le débiteur d’aliment
Article 207 alinéa 2 du code civil
Néanmoins, quand le créancier aura lui-même manqué gravement à ses obligations envers le débiteur, le juge (JAF) pourra décharger celui-ci de tout ou partie de la dette alimentaire
D) Les modalités de fixation et de versement fixées par le juge aux affaires familiales
Le juge aux affaires familiales (J.A.F) fixe le montant de la pension alimentaire en tenant compte des contributions respectives des parties.
Ces éléments seront pris en compte, pour fixer, réviser, voir supprimer la contrainte alimentaire, en cas de fait nouveau par le juge aux affaires familiales.
Ce juge en cas de séparation ou après divorce, peut être saisi sans l’assistance d’un avocat, par lettre RAR ou par dépôt d’une demande au greffe du tribunal de grande instance compétent.
Dans un prochain article à paraître, je m'interrogerai sur le fait de savoir ce qu'il faut retenir de la contrainte alimentaire.
Demeurant à votre disposition.
Maître HADDAD sabine
Avocate au Barreau de Paris