Comme nous allons le voir le contrat de capitalisation vise des épargnants qui souhaitent se constituer un patrimoine progressif et qui sont assujettis à l'ISF.
En effet ce contrat n'est pas plafonné, ni limité dans le temps.
De plus, il ne fait pas rentrer les intérêts capitalisés dans le calcul de cet ISF.
I- Différence de fonctionnement entre assurance-vie et contrat de capitalisation
A) Une différence dans la prise en compte du risque
La vie du souscripteur n’est pas de l’essence du contrat de capitalisation, contrairement à l'assurance-vie qui bénéficie à une tierce personne si le souscripteur venait à mourir.
Le contrat de capitalisation est une sorte de compte d'épargne nominatif ou anonyme alimenté librement qui fonctionne comme un contrat d’assurance-vie mais sans considération du risque lié à la vie de celui qui le souscrit.
Il permet de capitaliser la somme ou les sommes versées pendant la durée du contrat, et donc de rentabiliser ses fonds investis dans divers supports ( fonds en euros sécuritaire ou fonds investis en bourse).
C'est un instrument de donation utile en présence de patrimoines importants.
B) Une différence dans la souscription
- Le contrat d’assurance vie est souscrit au profit d'autrui, d'un bénéficaire.
- Le contrat de capitalisation, souscrit par une personne physique ou morale (sociétés civiles, SARL de famille, associations…) n'est pas une assurance au profit d’autrui.
Il ne porte pas de clause bénéficiaire.
Ainsi il s'envisagera pour :
°gérer son patrimoine par le biais d'une société civile,
°placer un capital détenu par le biais d'une société,
°réinvestir un capital dont la propriété est démembrée
°lorsqu'une personne est trop âgée pour souscrire une assurance-vie, alors qu'au delà de 85 ans les compagnies d'assurance refusent de souscrire à une assurance vie.
- Le contrat d’assurance-vie présente un caractère aléatoire lié à la durée de vie sous peine de risquer d’être requalifié comme une simple opération de capitalisation.
La Cour de cassation jusqu'à une certaine période recherchait s'il existait un aléa dans le contrat souscrit relatif à la durée de vie su souscripteur,au sens du code civil et du code des assurances, à défaut de quoi elle le requalifiait en contrat de capitalisation à réintégrer dans la succession, en tant que contrat différent de l'assurance-vie stricto sensu (1ère Civ,18 juillet 2000, pourvoi N°97-21535 LEROUX ).
Or la Chambre Mixte, 23 novembre 2004, pourvoi N°: 02-17507 a mis fin à cette jurisprudence pour réintégrer les contrats qui font varier le moment de la prestation et l'identité du bénéficiaire en fonction de la date de décès du souscripteur en ces termes:
"Le contrat d’assurance dont les effets dépendent de la durée de la vie humaine comporte un aléa au sens de l’article 1964 du Code civil et des articles L 310-1,1° et R 321-1,20° du Code des assurances et constitue un contrat d’assurance sur la vie. ».
La question de droit était de savoir si l’article L. 132-12 du Code des assurances qui vise le décès de l'assuré et sa succession s'appliquait aux assurances-vie et aux opérations de capitalisation, alors que dans ce dernier cas, il n’y a pas d’assuré.
La réponse est NON.
Ce texte dispose: "Le capital ou la rente stipulés payables lors du décès de l'assuré à un bénéficiaire déterminé ou à ses héritiers ne font pas partie de la succession de l'assuré. Le bénéficiaire, quelles que soient la forme et la date de sa désignation, est réputé y avoir eu seul droit à partir du jour du contrat, même si son acceptation est postérieure à la mort de l'assuré."
La vie et la mort seront deux choses différentes à considérer.
II Différence de fiscalité dans la déclaration liée à l'ISF
A) Le contrat de capitalisation doit être déclaré à l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) à sa valeur nominale exclusivement.
C'est-à-dire sur le capital versé à l'entrée net de frais et non à la valeur de rachat du contrat, correspondant au capital et ses intérêts.
Il s'agit d'un avantage non négligeable sur la durée, d'autant que ce placement n'est pas plafonné en montant.
Ainsi, ici, l'ISF ou Impôt sur la Fortune est prélevé sur les seules sommes versées au moment de la souscription du contrat.
Ex si le versement à l’ouverture a été de 200 000 euros , le prélèvement se fera sur 200.000 euros.
Les gains seront ainsi exonérés ce qui n’est pas le cas pour le contrat d’assurance vie.
B) Dans le contrat d’assurance vie, l’ISF est calculé sur la valeur nominale du contrat et des plus-values générées
Il faut entendre ici sa valeur de rachat.
Autrement dit l’impôt est prélevé en totalité tant sur les sommes versées que sur les profits acquis.
Plusieurs bons de capitalisation peuvent permettre de bénéficier de la réduction de l’assiette de calcul de l’ISF, tout en continuant à valoriser son patrimoine et à générer des revenus.
III Différence dans la transmission du contrat au décès
A) Le contrat de capitalisation rentre dans l’actif successoral contrairement à l'assurance-vie
Le régime de droit commun s’applique aux droits de succession contrairement à l’assurance-vie,qui est hors succession.
Le contrat n'est pas dénoué par le décès de son titulaire: il conserve donc une antériorité fiscale intéressante au plan de l'impôt sur le revenu.
Pour l'assurance vie
-les primes versées par le défunt avant l'âge de 70 ans
Seule la fraction supérieure à 152.500 euros est soumise à l'impôt pour les décès survenus depuis le 1er juillet 2014 et à un prélèvement de :
- 20 % pour la fraction de la part taxable de chaque bénéficiaire inférieure ou égale à 852 500 euros
- 31,25 % pour la fraction de la part taxable de chaque bénéficiaire excédant cette limite
Les conjoints et partenaires de PACS sont totalement exonérés d’imposition
-les primes versées après l'âge de 70 ans, restent soumises aux droits de succession après un abattement de 30 500 euros.
selon le degré de parenté existant entre le bénéficiaire et l'assuré.
B) Contrairement à l’assurance-vie rachetée ou transmise par décès, le contrat de capitalisation peut faire l’objet d’une donation en démembrement, à tout moment.
Ainsi une donation de ce contrat en nu-propriété tout en se gardant l’usufruit, permettra au souscripteur de prélever les revenus jusqu’au décès, ensuite de quoi, le nu-propriétaire deviendra le propriétaire.
Celui-ci n’aura alors pas de droits de succession à payer et bénéficiera de l’antériorité fiscale…
C) Les abattements prévus par la loi lui seront donc applicables et n’entraînent pas de dénouement du contrat , lequel se poursuivra jusqu’au rachat total
Le contrat de capitalisation est ainsi un instrument de donation et s’avère être incontournable en présence de patrimoines importants.
En conclusion:
Le contrat de capitalisation peut être un complément avantageux de l’assurance vie pour TROIS raisons :
D’abord parce que le calcul de l'ISF porte sur la valeur de souscription du contrat, ensuite parce qu'en cas de donation ou après décès, l’ayant droit bénéficiera de l’antériorité fiscale du contrat et pourra effectuer des retraits avec une fiscalité réduite, enfin parce que le démembrement du contrat de capitalisation, présentera divers avantages.
Ainsi lorsque les abattements envisageables pour une succession sont atteints, et que i la taxation fiscale jouera, il pourra compléter un contrat d’assurance vie surtout si le souscripteur a plus de 70 ans.
En plus de l’assurance vie, un contrat de capitalisation démembré sera parfois utile.
Maître HADDAD Sabine
Avocate au barreau de Paris