La chambre sociale de la cour de cassation a rendu le 1 er décembre 2011, pourvoi 09-71204 un arrêt de rejet intéréssant destiné à rappeler l'importance du devoir de loyauté d'un salarié vis à vis de son employeur.
Cette obligation contractuelle découlant du contrat de travail pourra être sanctionnée.
I- La faute grave retenue est elle proportionnée au regard de la situation ?
Pour la cour de cassation: "la violation par le salarié de son obligation contractuelle de loyauté envers l'employeur était d'une importance telle qu'elle rendait impossible son maintien dans l'entreprise et constituait une faute grave".
La faute grave aura pour conséquence de priver le salarié de ses indemnités de licenciement et de préavis.
De ce point de vue, un salarié qui ne dénoncerait pas un vol dont il a été témoin et qui a oeuvré pour empêchersa révélation,commettra une faute grave rendant bien fondée son licenciement.
En l'éspèce, suite à la vol de matériels, plusieurs salariés avaient été licenciés.
L'un d'eux se voyant reprocher une faute grave pour tentative de vol avait été privé de ses indemnités et avait saisi le conseil de Prud'hommes pour défaut de preuves tangibles des faits reprochés, après sa relaxe prononcée par le tribunal correctionnel.
Or à l'appui de deux attestations, les juges du fond avaient considérés que le salarié avait sciemment omis de signaler à son supérieur les faits dont il avait été témoin.
Qu'ainsi il avait commis une faute grave en ayant couvert, par son silence, le vol.
La question soumise à la Cour a consisté à savoir si le fait de s'abstenir de dénoncer à son supérieur hiérarchique ce type de faits justifie t-il le bien fondé de la sanction ?
Cette sanction est elle proportionnée au ragard des faits accomplis ?
Pour la chambre sociale la réponse est OUI.
"...Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel a constaté que la lettre de licenciement reprochait au salarié un non-respect des consignes régulièrement rappelées par l'employeur révélé par la découverte dans son vestiaire de matériel téléphonique qui ne devait pas s'y trouver, et que ces faits n'étaient pas visés par les poursuites pénales ;
Attendu, ensuite, qu'ayant relevé que le salarié, avec et au même titre que d'autres salariés licenciés pour le même motif, avait omis de porter immédiatement à la connaissance de l'employeur des faits de vol dont il avait été témoin et oeuvré pour empêcher leur révélation, a pu décider, sans avoir à suivre les parties dans le détail de leur argumentation, que la violation par le salarié de son obligation contractuelle de loyauté envers l'employeur était d'une importance telle qu'elle rendait impossible son maintien dans l'entreprise et constituait une faute grave ;..;"
II- Présentation de Soc,1er décembre 2011, pourvoi N°09-71204
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 22 septembre 2009), que M. X..., engagé le 21 octobre 1986 par la société Alcatel business systems devenue Alcatel Lucent Enterprise, en qualité d'opérateur magasinier, a été licencié le 2 avril 2001 pour faute grave ; que, contestant son licenciement, il a saisi la juridiction prud'homale, qui, par jugement du 5 mai 2004, a sursis à statuer dans l'attente de la décision à intervenir sur l'appel d'un jugement du tribunal correctionnel du 5 février 2004, l'ayant relaxé des fins de la poursuite de vol dont il faisait l'objet à la suite de la plainte de la société ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de juger que son licenciement pour faute grave est justifié et de le débouter de ses demandes, alors, selon le moyen :
1) - Que la lettre de licenciement fixe les termes du litige et qu'il appartient à l'employeur de décider quels sont les faits qu'il considère comme constituant une cause réelle et sérieuse de licenciement ; que la cour d'appel qui a estimé que constituait une cause réelle et sérieuse de licenciement le fait pour M. X... d'avoir oublié dans une poche de sa blouse laissée dans son vestiaire un téléphone et une façade de téléphone alors que la société Alcatel avait expressément précisé dans la lettre de licenciement que le motif unique en était le vol de matériel, vol pour lequel M. X... a été relaxé, a violé l'article L1232-6 du Code du travail ;
2) - Que pour dire que le fait que M. X... ait sciemment omis de signaler à un supérieur les faits dont il avait été témoin et, au moins par son silence, approuvé les manoeuvres entreprises pour camoufler ce vol constituait une cause réelle et sérieuse de licenciement la cour d'appel s'est exclusivement fondée sur deux témoignages desquels il résulterait que c'est par peur de lui que la décision de ne pas révéler le vol aurait été prise ; que la cour d'appel qui a dénaturé ces témoignages a violé l'article 1134 du Code civil et l'article 455 du Code de procédure civile ;
3) - Que la cour d'appel ne pouvait considérer que le fait pour M. X... d'avoir approuvé les manoeuvres entreprises pour camoufler le vol constituait une cause réelle et sérieuse de licenciement et davantage encore une faute grave sans s'expliquer sur les raisons pour lesquelles il aurait inspiré une telle crainte à ses supérieurs hiérarchiques qu'il serait le principal responsable de la décision de ne pas révéler le vol à la direction de l'entreprise ; que la cour d'appel qui ne s'est pas expliquée sur ce point essentiel soulevé dans les conclusions d'appel de M. X... a privé sa décision de base légale au regard des articles L1232-1 et L1234-1 du Code du travail ;
Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel a constaté que la lettre de licenciement reprochait au salarié un non-respect des consignes régulièrement rappelées par l'employeur révélé par la découverte dans son vestiaire de matériel téléphonique qui ne devait pas s'y trouver, et que ces faits n'étaient pas visés par les poursuites pénales ;
Attendu, ensuite, qu'ayant relevé que le salarié, avec et au même titre que d'autres salariés licenciés pour le même motif, avait omis de porter immédiatement à la connaissance de l'employeur des faits de vol dont il avait été témoin et oeuvré pour empêcher leur révélation, a pu décider, sans avoir à suivre les parties dans le détail de leur argumentation, que la violation par le salarié de son obligation contractuelle de loyauté envers l'employeur était d'une importance telle qu'elle rendait impossible son maintien dans l'entreprise et constituait une faute grave ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Par ces motifs : Rejette le pourvoi ;
Demeurant à votre disposition pour toutes précisions.
Maître HADDAD Sabine
Avocate au barreau de Paris