Le fait de porter atteinte à la dignité ou de porter atteinte à la fonction d’une personne atteinte peut constituer un délit d'outrage, délit d’irrespect souvent utilisé par les policiers, et difficilement prouvable, puisqu’il oppose parole contre parole. Qui a commencé ? Qu’a répliqué l’autre ? contentieux du bas de gamme et de l’insulte, de la colère, du mépris et de l’invective….
Il est aussi concevable pour les magistrats, les politiciens etc.
Ce délit, reste proche du délit d'injure, mais à la différence de ce qu’il ne bénéficie pas de la protection applicable à la liberté d’expression des délits de presse issue du XIXème siècle !
Du ressort du tribunal correctionnel, le délit est envisagé dans textes du code pénal.
Il s'analyse en une atteinte à l'honneur d'un supérieur hiérarchique (familial ou social) souvent perpétré en sa présence, ce qui démontre le mépris affiché envers sa fonction. Une sorte de défiance au respect et à l’obéissance de la fonction.
Si l'injure relève ordinairement du droit pénal civil, l'outrage appartient plutôt au droit pénal public.
Une question : quelle différence entre un outrage et une injure et quelles sanctions ?
I- Définition de l’outrage
A) Un élément matériel apprécié souverainement par les juges du fond
Contenue dans l’article 433-5 du code pénal
les paroles, gestes ou menaces, les écrits ou images de toute nature non rendus publics ou l'envoi d'objets quelconques adressés à une personne chargée d'une mission de service public, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de sa mission, et de nature à porter atteinte à sa dignité ou au respect dû à la fonction dont elle est investie.
Criminelle 30 juin 1965, pourvoi n°64-92.773 sur l’outrage à magistrat par un avocat
Caractérise l'existence de l'élément matériel de l'outrage à magistrat l'arrêt qui constate que les termes d'une lettre adressée par un avocat au procureur général atteignent personnellement ce magistrat, au-delà des critiques adressées à la juridiction elle-même Le juge du fond est souverain pour apprécier l'existence de l'élément intentionnel de l'infraction d'outrage, à la condition que cette existence ne soit contredite, ni par les termes des propos incriminés, ni par les motifs mêmes de l'arrêt attaqué.
Cass.crim. 19 avril 2000 (Gaz.Pal. 2000 J 2489) : Toute expression injurieuse ou diffamatoire, lorsqu’elle s’adresse à un magistrat de l’ordre administratif ou judiciaire, dans l’exercice de ses fonctions ou à l’occasion de cet exercice, est qualifiée d’outrage par l’ancien article 434-24 C.pén visant l’outrage à magistrat
-- Il importe peu qu’une personne soit en exercice.
Cour d’Appel de Paris 19 mai 2000 a considéré que :
« le fait d’interpeller une personne fonctionnaire de police regagnant son domicile et de lui tenir des propos outrageants tout en ayant une attitude menaçante, constitue des faits d’outrage. Le fait que la victime n’était pas en service au moment des faits est indifférent, dès lors que propos et attitude ont été tenus en considération des fonctions de la victime et en raison d’une enquête de police diligentée par elle »
-- Peu importe la nature et le nombre de grossièreté
Crim. 27 septembre 2000 ,Gaz. Pal. 2001 J 67
Une lettre adressée au garde des Sceaux et au procureur général, accusant de forfaiture, de faux en écritures publiques et authentiques et de coalition de fonctionnaire, ….et traitant ce magistrat de «fasciste». En cet état, les juges l’ont, à bon droit, déclaré coupable d’outrage à magistrat
Cour d’Appel de Paris 3 avril 2001
a condamné pour outrage à personne dépositaire de l'autorité publique un prévenu qui lors d’une interpellation pour infraction à la circulation routière a utilisé l’expression “mon pote” envers un policier, et fait une réflexion sur le fait que les policiers feraient mieux de courir après les voleurs .
Pour la cour cette attitude porte atteinte au respect dû au fonctionnaire et à sa fonction en le rabaissant, en niant son autorité et en critiquant la pertinence de ses choix, même si, par son appartenance aux métiers du bâtiment, le prévenu est habitué à l’emploi d’un langage direct, vigoureux et familier.
Crim 7 décembre 2004, pourvoi n° 04-81162 sur un tract apposé sur un panneau réservé à l’information syndicale.(rejet)
Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que Christian X..., directeur d'établissement pénitentiaire, a fait citer Patrick Y..., secrétaire d'un syndicat, du chef d'outrage à personne dépositaire de l'autorité publique, en raison des propos contenus dans un tract apposé sur un panneau réservé à l'information syndicale ; que le tribunal correctionnel a déclaré le prévenu coupable de ce chef ;
Attendu que, pour infirmer le jugement, relaxer Patrick Y... et débouter la partie civile de ses demandes, l'arrêt relève que le tract litigieux était affiché dans le hall d'entrée de la maison d'arrêt, lieu accessible au passage de personnes autorisées, étrangères à l'administration pénitentiaire ;
Attendu qu'en l'état de ces constatations et de ces énonciations procédant de son appréciation souveraine des faits et circonstances de la cause contradictoirement débattus, la cour d'appel a déduit, à bon droit, que l'écrit doit être considéré comme un écrit rendu public et qu'il échappe aux prévisions de l'article 433-5 du Code pénal, qui n'incrimine que l'outrage par écrit non rendu public ;
Rejet contre un arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 7ème chambre, en date du 20 octobre 2003, qui, l'a débouté de ses demandes après relaxe de Patrick Y... du chef d'outrage à personne dépositaire de l'autorité publique
--Qu’il s’agisse d’un outrage commis “dans l’exercice des fonctions” de l’outragé ou “à l’occasion” de ses fonctions, la sanction est la même.
B) Un élément intentionnel
Au-delà du manque de respect à l’égard d’une personne de l’autorité publique, il faut une volonté d’offenser la puissance publique.
Il faut rappeler que l’auteur de l’outrage aux membres d’une formation juridictionnelle bénéficie d’un fait justificatif spécial qui est l’immunité attachée à l’exercice des droits de la défense ; cette cause d’exonération est prévue par l’article 41 de la loi du 29 juillet 1881. Mais le plaideur n’en
II Une sanction à la carte
A) le tarif de base: 7500 euros d'amende
7500 euros d'amende ( art 433-5 du code pénal), même peine si commis lors d'une manifestation organisée ou réglementée par les autorités publiques, d'outrager publiquement l'hymne national ou le drapeau tricolore ( article 433-5-1 du code pénal)
B) La sanction majorée au regard des circonstances
1°- 6 mois d’emprisonnement et 7500 euros d’amende lorsqu’il est adressé à une personne dépositaire de l'autorité publique, ou chargée d'une mission de service public et que les faits ont été commis à l'intérieur d'un établissement scolaire ou éducatif, ou, à l'occasion des entrées ou sorties des élèves, aux abords d'un tel établissement, l'outrage est puni de six mois d'emprisonnement et de 7500 euros d'amende.
2°- Lorsqu'il est commis en réunion, il pourra être puni de six mois d'emprisonnement et de 7500 euros d'amende, et d'un an d'emprisonnement et de 15000 euros d'amende dans le b)( art 433-5-1) ce nouvel outrage est issu d’une Loi n°2003-239 du 18 mars 2003 JORF 19 mars 2003.sur la sécurité intérieure.
On a tous en tête un certain match de football France Algérie, lorsque la marseillaise avait été sifflée par des « supporters »
En conclusion, rappelons qu'il n'est pas rare de voir des poursuites pour outrages cumulées à la rébellion, prévue et réprimée par l'article 433-6 du code pénal et qui se définit comme une:
résistance violente opposée à une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public agissant, dans l'exercice de ses fonctions, pour l'exécution des lois, des ordres de l'autorité publique, des décisions ou mandats de justice.
Ce délit est puni d'un an d'emprisonnement et de 15000 euros d'amende ou de de deux ans d'emprisonnement et de 30000 euros d'amende lorsque commise en réunion, étant précisé que la rébellion armée est punie de cinq ans d'emprisonnement et de 75000 euros d'amende et de dix ans d'emprisonnement et de 150000 euros d'amende lorsque commise en réunion.
Lorsque l'auteur de la rébellion est détenu, les peines prononcées pour le délit de rébellion se cumulent, par dérogation aux articles 132-2 à 132-5, sans possibilité de confusion, avec celles que l'intéressé subissait ou celles prononcées pour l'infraction à raison de laquelle il était détenu.
Dans un prochain article, je me pencherai sur la notion d'injure.
L’injure : une infraction moins sévèrement sanctionnée au regard de la liberté de la presse .
demeurant à votre disposition pour toutes précisions.
Maître HADDAD Sabine
Avocate au barreau de Paris