I-Une question d’autorité parentale conjointe
L’article 371-1 du code civil définit l'autorité parentale comme un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l'intérêt de l'enfant.
Elle appartient aux père et mère jusqu'à la majorité ou l'émancipation de l'enfant pour le protéger dans sa sécurité, sa santé et sa moralité, pour assurer son éducation et permettre son développement, dans le respect dû à sa personne.
En vertu de l’article 372 du code civil.
Les père et mère exercent en commun l'autorité parentale.
Toutefois, lorsque la filiation est établie à l'égard de l'un d'entre eux plus d'un an après la naissance d'un enfant dont la filiation est déjà établie à l'égard de l'autre, celui-ci reste seul investi de l'exercice de l'autorité parentale.
Il en est de même lorsque la filiation est judiciairement déclarée à l'égard du second parent de l'enfant. L'autorité parentale pourra néanmoins être exercée en commun en cas de déclaration conjointe des père et mère devant le greffier en chef du tribunal de grande instance ou sur décision du juge aux affaires familiales.
La question des actes usuels et des actes importants qui nécessitent l’accord des deux se pose en cette matière
L’article 372-2 du code civil, fait une distinction entre actes usuels et non usuels, et prévoit une présomption d’accord entre les parents pour les actes usuels ou actes habituels, peu importants de la vie courante de l'enfant
A) Le déménagement comme mise à néant des règles de la résidence alternée
Le déménagement pourra souvent mettre à néant les règles de la résidence alternée, puisque l’éloignement important supposera un changement d’école, et empêchera dans l’intérêt même de l’enfant une alternance, épuisante.
La question de la stabilité et de l’équilibre dans la vie de l’enfant est ainsi posée.
B) Le déménagement comme objet de discorde au sein des couples séparés
1°- le déménagement en France sans l'accord de l'autre comme "acte usuel"
L'exercice de l'autorité parentale conjointe suppose que les parents séparés s'informent mutuellement en cas de déménagement.
Le parent qui a la résidence de l’enfant avec lui ( par une décision de justice) n’a qu’une obligation : notifier son changement d’adresse dans le mois du déménagement..
En effet le fait pour le parent dont les enfants résident chez lui de déménager sans notifier à l'autre parent son changement de domicile dans le délai d'un mois à compter de ce changement est un délit. Il peut être puni de 6 mois d'emprisonnement et de 7 500 € d'amende.
Si la résidence a été fixée de manière alternée, il aura intérêt à informer l’autre parent avant le déménagement pour la mise en place de l’alternance ou si par impossible de saisir le juge aux affaires familiales pour faire statuer sur la résidence de l’enfant.
Par contre si le parent déménage avant toute décision, c’est dans ce contexte que le conflit né ; déménagement, changement d’école sans autorisation, frais de trajets, modalités de remises de l’enfant etc…
L'autre parent aura tendance à saisir le juge aux affaires familiales en référé suite à ce déménagement intempestif.
2°-le déménagement dans un pays étranger comme" acte important"
Une fois encore en vertu des règles qui régissent l’autorité parentale conjointe entre parents, lorsque l’enfant commun réside à titre habituel dans un pays, aucun des parents ne pourra unilatéralement décider de transférer la résidence de l’enfant dans un autre pays.
Il ne pourra aussi le retenir à l’issue de vacances, sous peine de commettre un enlèvement parental et d’être poursuivi pénalement et civilement, au risque de perdre ses droits sur l’enfant ( autorité parentale ou résidence ).
Rappelons que cette attitude de soustraction de l’enfant à son cadre familial peut entraîner de graves conséquences psychologiques sur l’enfant privé de son autre parent pour se construire.A la fois "rapté" et pris en otage, il subit parfois un lavage de cerveau destiné à tenter la destruction de l’image de l’autre parent qui peut constituer une atteinte agressive dans sa personnalité et mettre à néant son propre intérêt ..
C) Les moyens legislatifs de droit pénal pour pallier le déménagement
1°) en cas de non représentation d'enfant
article 227-5 du code pénal
Le fait de refuser indûment de représenter un enfant mineur à la personne qui a le droit de le réclamer est puni d'un an d'emprisonnement et de 15000 euros d'amende."
2°) en cas d'enlèvement international
Les articles 227-5 à 227-7 du code pénal
punissent de un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende, celui qui a refusé indûment de représenter un enfant mineur à la personne qui a le droit de la réclamer ou l’a soustrait des mains de celui en droit de le réclamer.
L’article 227-9 du code pénal aggrave les peines au regard de la situation dispose :
Les faits définis par les articles 227-5 et 227-7 sont punis de trois ans d'emprisonnement et de 45000 euros d'amende :
a° Si l'enfant mineur est retenu au-delà de cinq jours sans que ceux qui ont le droit de réclamer qu'il leur soit représenté sachent où il se trouve ;
b° Si l'enfant mineur est retenu indûment hors du territoire de la République.
Face à une situation d’enlèvement par l’un des parents, une plainte près le commissariat de police ou la gendarmerie, mais aussi près le procureur de la république par lettre RAR peut s’envisager pour non représentation de l’enfant.
Cette plainte permettra d’aboutir à :
--la diffusion d’un mandat d’arrêt international ;
--faire intervenir interpol pour rechercher le parent
L’article 227-10 du code pénal dispose:
Si la personne coupable des faits définis par les articles 227-5 et 227-7 a été déchue de l'autorité parentale, ces faits sont punis de trois ans d'emprisonnement et de 45000 euros d'amende.
Une mise en œuvre protection internationale est organisée autour de l’enlèvement par la Convention de la Haye du 25 Octobre 1980 pour obtenir le retour de l’enfant.
Cette convention prévoit entre les 84 pays signataires un système de retour des enfants âgés de moins de 16 ans, laissant le problème de fixation de la résidence à la justice du lieu de résidence.
Elle pose un système de coopération entre les autorités centrales de chaque Etat signataire, pour assurer le retour immédiat de l’enfant illicitement déplacé ou retenu, au lieu de sa résidence habituelle
Le règlement européen 2201/2003 du 27 novembre 2003 améliore le fonctionnement de la Convention de la Haye de 1980 et accélère le processus dans les 27 pays membres de l’Union Européenne.
En France, il conviendra de saisir le bureau de l’entraide civile et commerciale internationale , (BECI) près la Direction des Affaires Civiles et du Sceau du Ministère de la Justice, lequel est désigné en qualité d’autorité centrale.
Ce bureau peut proposer également une aide à la médiation familiale internationale.
Le Ministère des Affares Etrangères peut être aussi contacté...
II- L’évolution legislative proposée touche au déménagement et a fortiori au changement de l’école
A) Le déménagement serait un acte « important » qui supposera l’accord des deux parents sauf crime ou délit commis envers le parent qui voudrait déménager
On le considèrerait comme un acte non usuel, grave, inhabituel qui rompt avec le passé ou qui engage l’avenir de l’enfant.
Je ne rentrerai pas dans le débat lié aux considérations sur le bien fondé de l'alternance entretenu par les parents et les pedopsychiatres. (âge,équilibre de l'enfant, stabilité, milieu..)
Si pour cet acte important, un parent prend seul la décision, sans l’accord de l’autre, alors sa responsabilité et celle des tiers qui l’ont suivi pourra être engagée.
Il pourra se voir retirer la résidence avec lui, et prendrait un risque énorme en agissant sans l’accord préalable du juge en cas de conflit.
Sans "l'accord exprès" de l'autre parent pour changer d'adresse, ou d'école,pas de modification, sauf crime ou de délit commis envers le parent souhaitant déménager.
B) La notion de double résidence et la suppression notions de résidence alternée et de droit de visite et d’hébergement
L’enfant habiterait au domicile de chacun de ses parents.
Cela ne changera rien à la réalité de la situation, car cela existe déjà en fait.
Fréquence et durée de la résidence devront être fixées entre les parents et à défaut d’entente par le JAF qui par exception pourra fixer la résidence au domicile de l'un des parents.
De ce fait le droit de visite sera réduit.
Les atteintes aux règles de l'exercice conjoint de l'autorité parentale pourront être sanctionnées par une amende civile de 10 000 euros. dès la première infraction sans passage devant un tribunal, d’une amende de 135 ou 375 euros.
Si les faits se reproduisent dans un délai de deux ans, le délit sera , passible d’un an de prison et de 15.000 euros d’amende.
C) La parole de l’enfant mieux valorisée, même s'il faudra rester vigilant sur la manipulation de cet enfant
Le projet de loi souhaite que l’enfant soit interrogé en fonction de son degré de maturité, au lieu de juger la capacité de discernement du mineur à être auditionné en fonction de son âge.
En théorie on pourrait dire que cela ne change pas grand-chose, puisque déjà les textes envisageaient cela.
Sauf à indiquer que la notion de «capacité de discernement», était sujette à interprétation et subjectivité du juge dans les débats
Cependant le recueil de la parole de l’enfant, même si petit est encouragé puisque la loi supprimerait cette notion de discernement.
L’audition d’un mineur par un juge sera donc de droit dès que l’enfant en fera la demande «de manière adaptée selon son degré de maturité».
Demeurant à votre entière disposition pour toutes précisions en cliquant sur http://www.conseil-juridique.net/sabine-haddad/avocat-1372.htm
Sabine HADDAD
Avocate au barreau de Paris