Au décès du donateur, (usufruitier) l’usufruit s’éteint si bien que le donataire sera investi de la pleine propriété de l’immeuble si l'usufruit est viager.
I- La question de savoir si la donation a été faite en avance sur part successorale .
En effet cette question est cruviale car dans la positive au décès du donateur, l’avance sera rapportée lors du partage successoral.
Il faut rappeler que toutes les donations sont réputées être faites en avancement de part successorale, sauf disposition contraire mentionnée dans l’acte de donation..
A) en cas de donation faite hors part
Celle-ci sera un moyen d'avantager un héritier par rapport à un autre, si bien que la donation s'ajoutera à la part de l’héritier sans pouvoir excéder le montant de la quotité disponible.
Cette donation ne sera pas rapportable à la succession, mais pourra être réduite si elle est excessive.
Ainsi, en tant que donation destinée à avantager le donataire, elle sera dispensée de rapport lors de l’ouverture de la succession.
En revanche, elle ne devra pas porter atteinte à la réserve des éventuels autres héritiers.
La quotité disponible correspond à:
- 1/2 des biens du donateur en présence d’un seul enfant,
- 1/3 en présence de deux enfants
- 1/4 quart en présence de trois enfants et plus.
En l’absence d’enfants et en présence d’un conjoint survivant, elle est de 3/4 des biens figurant à l’inventaire patrimonial global du foyer fiscal. La situation du conjoint survivant présente un caractère spécifique.
B) en cas de donation en avancement sur sa part successorale
Sa valeur est rapportable fictivement à la succession. Il s’agira de voir si la réserve a été atteinte.
Elle a donc pour but de faire à un héritier une avance sur sa part d’héritage sans pour cela porter atteinte à l’égalité entre tous les héritiers.
II- Quelle valeur prendre en compte lors du partage successoral ?
1ère Civ, 28 septembre 2011, pourvoi N° 10-203.54 répond à cette question.
A) La valeur de la pleine propriété sera prise en compte
En principe la valeur que devrait rapporter à la succession le donataire,bénéficiaire du démembrement devrait être celle de la nue-propriété, portant sur le don obtenu.
Cependant 1ère Civ,28 septembre 2011,pourvoi N° 10-203.54 en a jugé autrement.
Lors du partage successoral, la valeur à prendre en compte pour une donation en nue-propriété, avec réserve d'usufruit au profit du donateur, est celle de la pleine propriété du bien objet de ladite donation.
En l’espèce, un donateur était décédé en laissant pour lui succéder deux enfants, un fils et une fille ayant pris soin de doner la nu propriété de sa maison avec réserve d'usufruit à son fils.
L'évaluation de l'usufruit du père avait été portée à 3/10èmes de la valeur du bien en propriété.
C'est dans ce contexte que la fille a assigné son frère en liquidation successorale.
Pour la cour d'Appel de Douai, par arrêt du 29 mars 2010, le fils doit rapporter à la succession la valeur de la nue-propriété de l’immeuble reçue de son père au jour de l’acte notarié.
Cassation car dans le "cas de donation en nue-propriété avec réserve d’usufruit au profit du donateur, la valeur à prendre en compte est celle de la pleine propriété du bien ".
B) ... pour le rapport du bien à l’époque du partage et d’après l'état du bien à l’époque de la donation
Rappel des textes en matière.
article 843, alinéa 1er, du code civil
« Tout héritier, même ayant accepté à concurrence de l'actif, venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu'il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement ; il ne peut retenir les dons à lui faits par le défunt, à moins qu'ils ne lui aient été faits expressément hors part successorale.
article 860 du Code civil
« Le rapport est dû de la valeur du bien donné à l’époque du partage, d’après son état à l’époque de la donation »
article 922 du code civil
La réduction se détermine en formant une masse de tous les biens existant au décès du donateur ou testateur.
Les biens dont il a été disposé par donation entre vifs sont fictivement réunis à cette masse, d'après leur état à l'époque de la donation et leur valeur à l'ouverture de la succession, après qu'en ont été déduites les dettes ou les charges les grevant. Si les biens ont été aliénés, il est tenu compte de leur valeur à l'époque de l'aliénation. S'il y a eu subrogation, il est tenu compte de la valeur des nouveaux biens au jour de l'ouverture de la succession, d'après leur état à l'époque de l'acquisition. Toutefois, si la dépréciation des nouveaux biens était, en raison de leur nature, inéluctable au jour de leur acquisition, il n'est pas tenu compte de la subrogation.
On calcule sur tous ces biens, eu égard à la qualité des héritiers qu'il laisse, quelle est la quotité dont le défunt a pu disposer.
Demeurant à votre disposition.
Maître HADDAD Sabine