I- L'atteinte à la présomption d'innocence sanctionnée par la loi pénale
A) La dénonciation calomnieuse
L’article 434-26 du code pénal dispose :
Le fait de dénoncer mensongèrement à l'autorité judiciaire ou administrative des faits constitutifs d'un crime ou d'un délit qui ont exposé les autorités judiciaires à d'inutiles recherches est puni de six mois d'emprisonnement et de 7500 euros d'amende.
B) La dénonciation calomnieuse
L'article 226-10 du code pénal :
« la fausseté du fait dénoncé résulte nécessairement de la décision, devenue définitive, d'acquittement, de relaxe ou de non-lieu, déclarant que le fait n'a pas été commis ou que celui-ci n'est pas imputable à la personne dénoncée ».
Il faudra une décision de justice d'acquittement, de relaxe ou de non-lieu établissant que l'infraction dénoncée n'a jamais existée.
Cass. Crim., 25 mars 2003, N° de pourvoi: 02-80569
a jugé qu' « en cas de décision définitive d'acquittement, de relaxe ou de non-lieu déclarant que la réalité du fait n'est pas établie ou que celui-ci n'est pas imputable à la personne dénoncée, les juges ne peuvent pas apprécier la pertinence des accusations portées ».
La CEDH considère qu'en présence d'un non-lieu prononcé pour insuffisance de charges, au bénéfice du doute, les juridictions répressives auraient dû écarter la présomption de fausseté.
C) L’atteinte à la présomption d’innocence dans l’instruction
L'article 11, alinéa 1er du code de procédure pénale dispose que :
« Sauf dans les cas où la loi en dispose autrement et sans préjudice des droits de la défense, la procédure au cours de l'enquête et de l'instruction est secrète ».
L’article 434-7-2 du Code pénal dispose que :
« Sans préjudice des droits de la défense, le fait, pour toute personne qui, du fait de ses fonctions, a connaissance, en application des dispositions du Code de procédure pénale, d'informations issues d'une enquête ou d'une instruction en cours concernant un crime ou un délit, de révéler sciemment ces informations à des personnes qu'elle sait susceptibles d'être impliquées comme auteurs, coauteurs, complices ou receleurs, dans la commission de ces infractions, lorsque cette révélation est réalisée dans le dessein d'entraver le déroulement des investigations ou la manifestation de la vérité, est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende.
Lorsque l'enquête ou l'instruction concerne un crime ou un délit puni de dix ans d'emprisonnement relevant des dispositions de l'article 706-73 du Code de procédure pénale (c'est-à-dire dans le cadre de la procédure applicable à la criminalité et à la délinquance organisées), les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 75 000 € d'amende
L’atteinte au secret professionnel est donc sanctionnable ( articles 226-13 et 226-14 du code pénal)
D) La diffamation article 29 loi 29 juillet 1881
L'action judiciaire devra respecter le régime et le formalisme lié au délai de la diffamation en particulier.Il appartient au parquet ( ministère public ) de faire la preuve de l’atteinte
II-L’action en responsabilité civile sous l’angle de l'article 9-1 du code civil et/ou de la diffamation
La victime pourra citer son adversaire devant le tribunal et devra prouver les faits à l’appui de sa demande de réparation.
Une sanction au civile sur la violation de l'article 9-1 du Code civil permet de demander outre des dommages-intérêts mais aussi d'obtenir des mesures de communiqué ou/et de retrait.
A) la prescription en cas d'action combinée
La loi envisage deux situations
Celle prévue en matière de diffamation est visée dans l’article 65 de la loi du 29 juillet 1881
L'action publique et l'action civile résultant des crimes, délits et contraventions prévus par la présente loi se prescriront après trois mois révolus, à compter du jour où ils auront été commis ou du jour du dernier acte d'instruction ou de poursuite s'il en a été fait.
Toutefois, avant l'engagement des poursuites, seules les réquisitions aux fins d'enquête seront interruptives de prescription. Ces réquisitions devront, à peine de nullité, articuler et qualifier les provocations, outrages, diffamations et injures à raison desquels l'enquête est ordonnée.
Les prescriptions commencées à l'époque de la publication de la présente loi, et pour lesquelles il faudrait encore, suivant les lois existantes, plus de trois mois à compter de la même époque, seront, par ce laps de trois mois, définitivement accomplies.
Celle visant l’atteinte à la présomption d’innocence
est prévue par l’article 65-1 de la loi du 29 juillet 1881, qui envisage que
Les actions fondées sur une atteinte au respect de la présomption d'innocence commise par l'un des moyens visés à l'article 23 se prescriront après trois mois révolus à compter du jour de l'acte de publicité
Il en découle aujourd’hui que les actions fondées sur une atteinte au respect de la présomption d’innocence sont soumises à un délai de prescription particulier imposant au demandeur d’introduire l’instance dans les trois mois de la publication incriminée, mais aussi de réitérer, dans le même délai, un acte de procédure manifestant à l’adversaire son intention de la poursuivre ».
2ème Civ, 8 juillet 2004, Pourvoi n° 01-10.426.
a admis la validité d’un acte introductif d'instance comportant, de manière cumulative, à raison des mêmes faits, une action en diffamation et une action en réparation d'atteinte au respect de la présomption d'innocence.
Cette coexistence suppose que le régime de prescription de l'atteinte à la présomption d'innocence soit aligné sur celui des délits de presse : trois mois révolus à compter du jour de l'acte de publicité.
L’Assemblée Plénière, 21 décembre 2006, pourvoi n° 00-20.493. a aussi tranché sur la question de savoir si les règles de prescription prévues à l'article 65-1 de la loi du 29 juillet 1881 relatives au respect de la présomption d'innocence étaient ou non similaires à celles prévues à l'article 65 concernant la diffamation.
Elle avait jugé qu’on ne pouvait appliquer à la victime d’une atteinte à la présomption d’innocence une obligation de réitération des actes interruptifs que la Cour de cassation n’imposait pas à la date de son action, dès lors que l’application immédiate de l’interprétation nouvelle, résultant de l’arrêt de 2e chambre Civ, 8 juillet 2004, ce qui aurait eu pour effet de la priver d’un procès équitable, au sens de l’article 6§1 CEHD, en lui interdisant l’accès au juge.
B) Quid de la jurisprudence récente ?
1ère Civ, 31 janvier 2008, pourvoi N°07-11.479
les actions fondées sur une atteinte au respect de la présomption d'innocence sont soumises à un délai de prescription particulier imposant au demandeur, non seulement d'introduire l'instance dans les trois mois de la publication incriminée, mais aussi de réitérer, dans le même délai, un acte de procédure manifestant à l'adversaire son intention de la poursuivre, la cour d'appel a violé l’article 65-1 de la loi susvisé
1ère Civ, 30 avril 2009, N° pourvoi : 07-19.879.
Au visa de l’article 65-1 de la loi du 29 juillet 1881, a jugé que
« les actions fondées sur une atteinte au respect de la présomption d’innocence sont soumises à un délai de prescription particulier imposant au demandeur, non seulement d’introduire l’instance dans les trois mois de la publication incriminée, mais aussi de réitérer, dans le même délai, un acte de procédure manifestant à l’adversaire son intention de la poursuivre. »
Elle précise ensuite que spécialement saisie de l’absence de signature des conclusions de première instance, irrégularité faisant obstacle à l’interruption de la prescription et pouvant dès lors, en matière de presse, être soulevée en tout état de la procédure, le juge a le devoir de vérifier l’exactitude de l’allégation.
Demeurant à votre entière disposition pour toutes précisions en cliquant sur http://www.conseil-juridique.net/sabine-haddad/avocat-1372.htm
Sabine HADDAD
Avocate au barreau de Paris