LE JUGE DES TUTELLES ET LE PRINCIPE DU CONTRADICTOIRE

Publié le 11/03/2014 Vu 3 571 fois 0
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Le respect du contradictoire suppose pour une partie ou un juge d’assurer le respect des droits de la défense, pour permettre une loyauté des débats, une équité et une égalité dans les armes. C'est ce que la première Chambre Civile de la Cour de Cassation a rappelé à un juge des tutelles dans un arrêt du 12 février 2014 pourvoi N°13-13.581 au visa des articles 16 et 1222-1 du code de procédure civile...

Le respect du contradictoire suppose pour une partie ou un juge d’assurer le respect des droits de la défen

LE JUGE DES TUTELLES ET LE PRINCIPE DU CONTRADICTOIRE

I-La loyauté des débats suppose l’accès libre au dossier en respect du contradictoire

A) La finalité du principe de contradiction 

 Il s’agit d’assurer le respect des droits de la défense, la loyauté des débats, une équité et une égalité des armes

Particulièrement dans le cadre d’un majeur protégé, le juge des tutelles devra vérifier le respect des droits de la personne fragile, lequel aura obligation d’aviser  le majeur protégé de l’étendue de ses droits.

Tel est le sens de l’arrêt du 12 février 2014

L’article 16 du CPC dispose

« Le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.
   Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement.
   Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations. »

L’article 1222‑1 du CPC envisage une consultation du dossier par le majeur à protéger ou protégé, et/ou  son avocat.

Ce principe suppose que toutes parties au procès prenne connaissance des arguments et pièces qui vont être soumis au Tribunal pour lui permettre de prendre une décision.

Respecter les droits de la défense, cela suppose de permettre aux parties de présenter des observations écrites ou orale et  de se faire assister ou représenter en justice.

Cela suppose que:

1°-chaque partie s’informe dans un délai raisonnable de ses prétentions ainsi que des moyens de fait et de droit

y compris qu’elles communiquent leurs écritures dans les procédures écrites par représentation obligatoire d’un avocat  (assignation, conclusions, pièces produites au tribunal dans un délai raisonnable).

3ème Civ,13 septembre 2011, pourvoi N°10-23.496 

 a jugé que viole le principe du contradictoire la cour d’appel qui fonde sa décision sur un constat d’huissier produit par une partie dès lors qu'il n'apparaît pas des bordereaux de communication de pièces que cette pièce, non visée dans les conclusions des parties échangées, ait fait l'objet d'un débat contradictoire.

Dans le cadre d'une procédure orale, le Juge veillera  à ce que chaque partie ai pu répliquer aux arguments de l'autre, soit par écrit, soit oralement à l'audience.

Une demande de renvoi de l’audience pour répondre pourra souvent être acceptée

2°-les expertises soient librement débattues 

1ere Civ,1er février 2012 pourvoi n°10-18.853 a rappelé strictement ce principe au visa de l'article 16 du Code de procédure civile en matière d’expertise.

L'expert doit soumettre aux parties les pièces annexées au rapport afin de permettre à ces dernières d'en débattre contradictoirement devant lui avant le dépôt de son rapport

Désormais, les experts devront être très vigilants sur ce point afin que leurs rapports ne soient pas annulés.

 La première Chambre Civile, le 6 mars 2013 pourvoi N° 12-14.488 n'a pas hésité à rappeler son importance dans le cadre de la libre communication des pièces aux débats.

Qu'en statuant ainsi, alors que Mme Y... soutenait, sans être contredite, avoir demandé en vain par voie de sommation la communication des pièces dont se prévalaient les consorts X..., la cour d'appel, à laquelle il incombait, dès lors, d'ordonner cette communication, a violé les textes susvisés

3°-avant l’audience

Dans notre affaire il s’agissait du  renouvellement d’une mesure de  curatelle renforcée le

1 ere Civ, 12 février 2014 pourvoi N°13-13.581 au visa des articles 16 et 1222-1 du code de procédure civile ;

Casse et  rappelle que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue contradictoirement ; que cette exigence implique que chaque partie ait la faculté de prendre connaissance et de discuter de toute pièce présentée au juge, qu’il ne résulte ni des énonciations de l’arrêt, ni des pièces de la procédure, que M. X..., qui n’était pas assisté lors de l’audience, ait été avisé de la faculté qui lui était ouverte de consulter le dossier au greffe, de sorte qu’il n’est pas établi qu’il ait été mis en mesure de prendre connaissance, avant l’audience, des pièces présentées à la juridiction, partant de les discuter utilement ; qu’ainsi, il n’a pas été satisfait aux exigences des textes susvisés ;

Toutes pièces justificatives qui seront produites en justice et tous les arguments de faits et de droit soulevés soient communiqués à l’adversaire  

Crim, 6 novembre 2013 pourvoi N°13.85.658  sanctionne la chambre de l'instruction près la cour d'appel au visa des articles 6§1 et 197 du CPP qui a ordonné la remise en liberté d'un détenu en réformant une ordonnance du JLD contrairement aux réquisitions du parquet.

C'est dans ce contexte que le procureur général a interjeté appel dudit arrêt ,au fait que la cour d'appel en se fondant sur un acte de l'instruction qu'elle s'est fait communiquer lors du délibéré.

Il s'agissait d'un procès-verbal de confrontation dans lequel un témoin entendu sous anonymat, avait initialement désigné M. X... comme l'auteur des violences, l'a finalement mis hors de cause.

Pour la Cour:

Mais attendu qu'en fondant ainsi sa décision sur un acte d'instruction dont le procès-verbal, qu'elle s'est fait communiquer en cours de délibéré, ne figurait pas au dossier déposé au greffe et n'a été porté à la connaissance ni du ministère public ni de la personne mise en examen, la chambre de l'instruction, qui n'a pas soumis cette pièce au débat contradictoire, a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus énoncé

II Présentation de  1 ere Civ,12 février 2014 pourvoi N°13-13.581 

Cassation

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu les articles 16 et 1222-1 du code de procédure civile ;

Attendu que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue contradictoirement ; que cette exigence implique que chaque partie ait la faculté de prendre connaissance et de discuter de toute pièce présentée au juge ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que par jugement du 15 novembre 2007, M. X... a été placé sous curatelle renforcée, l’Entraide sociale de la Loire, étant désignée en qualité de curateur ; que par jugement du 28 octobre 2011, un juge des tutelles a maintenu cette mesure pour une période de cinq ans ;

Attendu qu’il ne résulte ni des énonciations de l’arrêt, ni des pièces de la procédure, que M. X..., qui n’était pas assisté lors de l’audience, ait été avisé de la faculté qui lui était ouverte de consulter le dossier au greffe, de sorte qu’il n’est pas établi qu’il ait été mis en mesure de prendre connaissance, avant l’audience, des pièces présentées à la juridiction, partant de les discuter utilement ; qu’ainsi, il n’a pas été satisfait aux exigences des textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 16 janvier 2013, entre les parties, par la cour d’appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Grenoble

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Sabine HADDAD

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