I- Une distinction affirmée par la Jurisprudence
Les tribunaux, une fois saisis rechercheront les éléments essentiels cosnstitutifs de la matérialité de l'infraction pour condamner, à savoir :
1) l'allégation d'un fait précis ;
2)...qui porte atteinte à l'honneur ou à la considération ( pas une simple critique)
3)...d'une personne mise en cause déterminée ou clairement identifiable;
4)....à caractère public
Une fois la matérialité de l'infraction constatée, l'élément moral sera présumé (article 35 bis, loi 29 juillet 1881 )
Il s'agit d'une présomption simple d'intention délictuelle, donc de la mauvaise foi qui peut être renversée par la preuve de la bonne foi.
Parmi les moyens de défense, il y a l’exception de vérité des faits diffamatoires distincte de la bonne foi...
Crim 17 juin 2008, pourvoi N° 07-80-767 distingue l'exception de vérité, de la bonne foi.
1re Civ,17 mars 2011,pourvoi N°10-11.784
Crim, 19 janvier 2010 , N° de pourvoi: 09-84408
Attendu qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision, dès lors que, d'une part, le droit à un procès équitable et la liberté d'expression justifient que la personne poursuivie du chef de diffamation soit admise à produire, pour les nécessités de sa défense, les pièces de nature à établir la vérité des faits ou sa bonne foi, sans qu'elles puissent être écartées des débats au motif qu'elles auraient été obtenues par des moyens déloyaux, et que, d'autre part, la bonne foi doit être appréciée en tenant compte notamment du caractère d'intérêt général du sujet sur lequel portent les propos litigieux, et du contexte politique dans lequel ils s'inscrivent
1re Civ, 17 mars 2011 pourvoi N° 10-11.784 Syndicat libre des exploitants de chauffage (SLEC)
A) La preuve du fait avéré: l'exception de vérité (l'exceptio veritatis) comme moyen de défense au fond (articles 35 et 55)
La sincérité sera un élément important dans l'information légitime, à condition que cette preuve soit parfaite, complète et corrélative aux imputations (Cour d'appel de Paris 11 ème chambre, section A Arrêt du 10 mai 2006)
1ère Civ,25 février 2010, N° de pourvoi: 09-12641
Les premiers juges peuvent retenir l'exception de vérité dès lors qu'il est démontré qu'ils ne se sont pas uniquement fondés sur des éléments de preuve postérieurs à la diffusion.
1°-Que dit l'article 35 de la loi sur la Liberté de la Presse du 29 juillet 1881 dont l'alinéa 5 vient d'être déclaré le 20 mai 2011, inconstitutionnel ?
Dans sa décision n° 2011-131 QPC du 20 mai 2011 (NOR CSCX1113975S), le Conseil constitutionnel a déclaré contraire à la Constitution le cinquième alinéa de l'article 35 de la loi du 29 juillet 1881. Cette déclaration d'inconstitutionnalité prend effet à compter de la publication de la décision
Article 35 Modifié par Décision n°2011-131 QPC du 20 mai 2011 - art. 1, v. init.La vérité du fait diffamatoire, mais seulement quand il est relatif aux fonctions, pourra être établie par les voies ordinaires, dans le cas d'imputations contre les corps constitués, les armées de terre, de mer ou de l'air, les administrations publiques et contre toutes les personnes énumérées dans l'article 31.
La vérité des imputations diffamatoires et injurieuses pourra être également établie contre les directeurs ou administrateurs de toute entreprise industrielle, commerciale ou financière, dont les titres financiers sont admis aux négociations sur un marché réglementé ou offerts au public sur un système multilatéral de négociation ou au crédit.
La vérité des faits diffamatoires peut toujours être prouvée, sauf :
a) Lorsque l'imputation concerne la vie privée de la personne ;
b) Lorsque l'imputation se réfère à des faits qui remontent à plus de dix années ( Abrogé)
c) Lorsque l'imputation se réfère à un fait constituant une infraction amnistiée ou prescrite, ou qui a donné lieu à une condamnation effacée par la réhabilitation ou la révision ;
Les deux alinéas a et b qui précèdent ne s'appliquent pas lorsque les faits sont prévus et réprimés par les articles 222-23 à 222-32 et 227-22 à 227-27 du code pénal et ont été commis contre un mineur.
Dans les cas prévus aux deux paragraphes précédents, la preuve contraire est réservée. Si la preuve du fait diffamatoire est rapportée, le prévenu sera renvoyé des fins de la plainte.
Dans toute autre circonstance et envers toute autre personne non qualifiée, lorsque le fait imputé est l'objet de poursuites commencées à la requête du ministère public, ou d'une plainte de la part du prévenu, il sera, durant l'instruction qui devra avoir lieu, sursis à la poursuite et au jugement du délit de diffamation.
Le prévenu peut produire pour les nécessités de sa défense, sans que cette production puisse donner lieu à des poursuites pour recel, des éléments provenant d'une violation du secret de l'enquête ou de l'instruction ou de tout autre secret professionnel s'ils sont de nature à établir sa bonne foi ou la vérité des faits diffamatoires.
Désormais,la vérité des faits diffamatoires pourra être établie sans prescription, comme par le passé...
2°-Quel délai de réaction ? article 55 de la loi
: Quand le prévenu voudra être admis à prouver la vérité des faits diffamatoires, conformément aux dispositions de l'article 35 de la présente loi, il devra, dans le délai de 10 jours après la signification de la citation, suivant qu'il est assigné à la requête de l'un ou de l'autre :
1. Les faits articulés et qualifiés dans la citation , desquels il entend prouver la vérité ;
2. La copie des pièces ;
3. Les noms, professions et demeures des témoins par lesquels il entend faire la preuve.
Cette signification contiendra élection de domicile près le tribunal correctionnel, le tout à peine d'être déchu du droit de faire la preuve.
1re Civ,17 mars 2011, pourvoi N° 10-11.784. Le juge doit rechercher si l'offre de preuve de la vérité des faits a bien été présentée dans les dix jours suivant la signification de la citation
B) La preuve de la bonne foi par QUATRE éléments destinés à renverser la présomption simple d'intention
- la légitimité du but poursuivi,
- l'absence d'animosité personnelle,
- la prudence et la mesure dans l'expression,
- le sérieux ou la qualité de l'enquête réalisée
II- Présentation de 1re Civ,17 mars 2011
pourvoi N°10-11.784 Syndicat libre des exploitants de chauffage (SLEC)
Demandeur(s) : M. A... X...
Défendeur(s) : le Syndicat libre des exploitants de chauffage (SLEC)
Attendu qu’avant les élections du mois de juin 2007 aux fins de renouvellement des membres du comité d’établissement de la société Dalkia, le Syndicat libre des exploitants de chauffage a distribué un tract, contenant notamment les termes suivants : “Enfin M. X... oublie de vous rappeler qu’en 2000, alors qu’il était secrétaire du CE, il a licencié Mme J... Y..., assistante du CE et ce, de façon indigne, surtout alors qu’elle souffrait d’une grave et longue maladie” ; que M. X... a fait assigner le syndicat en diffamation ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881 ;
Attendu que pour écarter la diffamation imputée au syndicat, la cour d’appel a énoncé que celui-ci n’avait fait que porter à la connaissance des salariés, de toute bonne foi, des faits avérés tenant à la manière dont M. X... avait procédé au licenciement d’une employée atteinte d’une maladie grave ayant exercé son activité professionnelle au sein du comité d’établissement pendant plus de seize années et ce, dans un contexte électoral particulièrement tendu ;
Qu’en statuant ainsi, quand le fait justificatif de bonne foi distinct de l’exception de vérité des faits diffamatoires se caractérise par la légitimité du but poursuivi, l’absence d’animosité personnelle, la prudence et la mesure dans l’expression ainsi que par le sérieux de l’enquête, la cour d’appel, qui n’a pas constaté la réunion de ces éléments, n’a pas donné de base légale à sa décision ;
Sur la deuxième branche du moyen :
Vu les articles 35 et 55 de la loi du 29 juillet 1881 ;
Attendu que pour rejeter la demande de M. X..., l’arrêt énonce encore que la vérité des faits allégués est corroborée par l’attestation, rédigée par M. Z..., qui n’est pas contestée ;
Qu’en statuant ainsi, sans rechercher comme elle y était invitée si le syndicat avait respecté le délai de dix jours après la signification de la citation pour faire l’offre de preuve de la vérité des faits imputés à M. X..., la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 26 novembre 2009, entre les parties, par la cour d’appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris
Demeurant à votre disposition pour toutes précisions
Maître HADDAD Sabine
Avocate au barreau de Paris