L’action publique est l’action engagée par le Ministère Public pour le trouble à l’ordre public.
Elle concerne la culpabilité et la peine de la personne poursuivie comme prévenu, alors que l’action civile est engagée par la victime d'une infraction devant la juridiction pénale en vue d’obtenir une indemnisation pour le préjudice subi, à savoir des dommages et intérêts.
Le jugement du tribunal correctionnel statue donc systématiquement sur les dispositions pénales (culpabilité au regard de l’infraction délictuelle reprochée, peine) et sur les dispositions civiles lorsqu'une victime s'est constituée partie civile et a formulé une demande de dommages et intérêts.
I- Conditions et Mise en oeuvre de l'appel du jugement correctionnel
A ) Qui peut interjeter appel ?
Article 497 du CPP
La faculté d'appeler appartient :
1º Au prévenu ;
2º A la personne civilement responsable quant aux intérêts civils seulement ;
3º A la partie civile, quant à ses intérêts civils seulement ;
4º Au procureur de la République ;
5º Aux administrations publiques, dans les cas où celles-ci exercent l'action publique ;
6º Au procureur général près la cour d'appel.
Remarque : L'appel de l'assureur condamné à garantir produit effet à l'égard de l'assuré en ce qui concerne l'action civile. Il est, dans un délai de trois jours, notifié à l'assuré par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée par l'assureur.
Attention : En cas de jugement de relaxe non suivi d'un appel du Parquet, la partie civile ne perd pas son droit de faire appel, mais en l'absence de responsabilité pénale, aura intérêt à plaider sur la faute civile pour demander une indemnisation OU alors à user de la voie civile.
B) La Forme
Articles 502 et 503 du CPP
La déclaration d'appel doit être faite au greffier de la juridiction qui a rendu la décision attaquée.
Elle doit être signée par le greffier et par l'appelant lui-même, ou par un avocat, ou par un fondé de pouvoir spécial ; dans ce dernier cas, le pouvoir est annexé à l'acte dressé par le greffier. Si l'appelant ne peut signer, il en sera fait mention par le greffier.
Elle est inscrite sur un registre public à ce destiné et toute personne a le droit de s'en faire délivrer une copie.
Lorsque l'appelant est détenu, l'appel peut être fait au moyen d'une déclaration auprès du chef de l'établissement pénitentiaire.
Cette déclaration est constatée, datée et signée par le chef de l'établissement pénitentiaire. Elle est également signée par l'appelant ; si celui-ci ne peut signer, il en est fait mention par le chef de l'établissement.
Ce document est adressé sans délai, en original ou en copie, au greffe de la juridiction qui a rendu la décision attaquée ; il est transcrit sur le registre prévu par le troisième alinéa de l'article 502 annexé à l'acte dressé par le greffier.
Rejet Crim , 6 mai 2008 N° pourvoi 07-86304 s’agissant d’un appel diligenté par un avocat par fax :
« ..pour déclarer irrecevable l'appel interjeté, par l'avocat du prévenu, l'arrêt retient qu'il ne l'a pas été dans les formes prescrites par l'article 502 du code de procédure pénale ; et qu’en statuant ainsi, les juges ont justifié leur décision au regard de l'article précité ;
Que, d'une part, ce texte, qui exige que la déclaration d'appel soit faite au greffier de la juridiction qui a rendu la décision et signée du greffier et du demandeur ou de son avocat, ne prive pas le prévenu d'un recours, mais le soumet seulement à des conditions de forme et de délai et n'est pas incompatible avec les textes conventionnels invoqués ; Que, d'autre part, l'indication donnée par le prévenu au procureur de la République, à l'occasion de l'exécution d'un mandat d'arrêt, de sa volonté d'interjeter appel du jugement constitue une simple déclaration d'intention et non une modalité d'exercice de cette voie de recours ; Qu'enfin, aucun texte n'impose au greffier d'examiner la recevabilité d'un appel et, à supposer cet acte irrégulier, d'inviter l'avocat du prévenu à le réitérer dans les formes prescrites par la loi «
Remarque : Un appel en deux temps est concevable tant qu’il intervient dans le délai légal.
Cass. Crim, 19 décembre 2000 Bull.crim. n°382 p.1186, Cie A... Assurances :
Aucune disposition légale n’interdit à une partie d’interjeter appel par deux déclarations successives, dès lors qu’elles interviennent dans le délai légal et ne portent pas sur les mêmes dispositions du jugement entrepris.
II Le délai de l’appel du jugement correctionnel et son point de départ
A) Les délais stricto sensu de l'appel principal
10 jours
L'appel principal est formé dans le délai de dix jours à compter du jugement ou de sa signification par huissier si le prévenu était absent à l'audience sous conditions.
En cas d'appel d'une des parties pendant les délais ci-dessus, les autres parties ont un délai supplémentaire de 5 jours pour interjeter appel à compter de l’appel principal.
24 heures
Lorsque le tribunal statue sur une demande de mise en liberté conformément aux articles 148-1 et 148-2 du CPP ainsi que lorsqu'il statue sur une demande de mainlevée ou de modification de contrôle judiciaire, l'appel doit être formé dans un délai de vingt-quatre heures.
20 jours pour le parquet général
L’article 505 du CPP modifié par la Loi n° 2009 -1436 du 24b novembre 2009 art 73 prévoit qu’en cas de jugement de condamnation, le procureur général peut également former son appel dans le délai de vingt jours à compter du jour du prononcé de la décision.
Il convient de rappeler que la différence de régime au regard des délais d’appel des deux représentants du ministère public de l’article 505 du CPP qui permettait au parquet général, de faire appel initialement dans les deux mois a été dénoncée tant par la Cour Européenne des Droits de l’Homme comme violant les dispositions de l’article 6 § 1 de la CEHD, afférentes au procès équitable, à l’égalité des armes dans la défense, ainsi que par la Cour de cassation qui a consacré cette jurisprudence.
CEDH, 3 octobre 2006, Ben Naceur c/ France, requête n° 63879/00 ;
CEDH, 22 mai 2008, Gacon c/ France, requête n° 1092/04
Cass Crim, 17 septembre 2008 N° pourvoi: 08-80598
Mais attendu que l'article 505 du code de procédure pénale ouvre au procureur général un délai d'appel plus long que celui accordé aux autres parties par l'article 498 de ce code; que, dès lors, les dispositions de ce texte ne sont pas compatibles avec le principe conventionnel énoncé ci-dessus ;
Sans préjudice de l'application des articles 498 à 500, les autres parties ont alors un délai de cinq jours pour interjeter appel incident. Même en l'absence d'appel incident, la cour d'appel peut, en cas d'appel formé par le seul procureur général en application du présent article, prononcer une peine moins importante que celle prononcée par le tribunal correctionnel.
B) L’appel incident : un appel qui suit le sort de l’appel principal au délai spécifique
L'appel incident est un appel en défense formé dans un délai de cinq jours qui court à compter de la déclaration d'appel.
Article 500 du CPP
En cas d'appel d'une des parties pendant les délais ci-dessus, les autres parties ont un délai supplémentaire de cinq jours pour interjeter appel.
Remarque : L'appel incident, contrairement à l'appel principal qui est définitif, tombe automatiquement si l'appelant principal se désiste dans les trente jours.
Article 500-1 du CPP
Lorsqu'il intervient dans un délai d'un mois à compter de l'appel, le désistement par le prévenu ou la partie civile de son appel principal entraîne la caducité des appels incidents, y compris celui du ministère public si ce désistement intervient dans les formes prévues pour la déclaration d'appel. Constitue un appel incident l'appel formé dans le délai prévu par l'article 500, ainsi que l'appel formé, à la suite d'un précédent appel, dans les délais prévus par les articles 498 ou 505, lorsque l'appelant précise qu'il s'agit d'un appel incident. Dans tous les cas, le ministère public peut toujours se désister de son appel formé après celui du prévenu en cas de désistement de celui-ci. Le désistement d'appel est constaté par ordonnance du président de la chambre des appels correctionnels.
C) Le point de départ du délai
Chaque partir peut faire appel à partir du jugement, si la partie était présente ou représentée, OU à partir de la signification pour un prévenu dans le cas d'un jugement contradictoire à signifier.
A compter du prononcé de la décision contradictoire lorsque le prévenu est présent
Le jugement est contradictoire dans deux hypothèses :
- lorsque le prévenu est présent à l'audience ;
- lorsque le prévenu demande à être jugé en son absence en étant représenté au cours de l'audience par un avocat.
Si le tribunal estime nécessaire la comparution personnelle du prévenu, il peut renvoyer l'affaire à une audience ultérieure en ordonnant cette comparution.
Le procureur de la République procède alors à une nouvelle citation du prévenu.
Le prévenu qui ne répondrait pas à cette nouvelle citation peut être jugé contradictoirement si son avocat est présent et entendu. Le tribunal peut également, le cas échéant, après avoir entendu les observations de l'avocat, renvoyer à nouveau l'affaire en faisant application des dispositions de l'article 410-1 du CPP
A compter de la signification de la décision contradictoire lorsque le prévenu est absent mais touché par la citation sous certaines conditions : la question du jugement contradictoire à signifier (article 498 du CPP)
Le délai de 10 jours court à compter de la signification du jugement si le prévenu, bien que cité à personne était absent à l’audience (signification par huissier en principe ou quel qu’en soit le mode).
Cette signification visera ainsi la situation suivante :
- d’une partie qui, après débat contradictoire, n'était pas présente ou représentée à l'audience où le jugement a été prononcé, mais seulement dans le cas où elle-même ou son représentant n'auraient pas été informés du jour où le jugement serait prononcé ;
- du prévenu
ü jugé en son absence, après audition d'un avocat qui s'est présenté pour assurer sa défense, sans mandat de représentation signé
ü non comparant et non excusé mais pourtant avisé de l’audience
ü qui a demandé à être jugé en son absence en demandant à être représenté par un avocat qui finalement n’a pas comparu (article 411, al 5 du CPP)
ü de l'opposant, régulièrement mis en demeure qui ne comparaît pas.
Dans ces cas il s’agira d’un jugement contradictoire à signifier.
Remarque : Rappel des dispositions de l’article 498-1 al 1 et 2 du CPP pour le prévenu condamné touché par la citation qui n’a pas comparu.
« Pour un jugement de condamnation à une peine d'emprisonnement ferme ou à une peine d'emprisonnement assortie d'un sursis partiel, rendu dans les conditions prévues à l'article 410 et qui n'a pas été signifié à personne, le délai d'appel ne court à compter de la signification du jugement faite à domicile, à étude d'huissier de justice ou à parquet que sous réserve des dispositions du deuxième alinéa. Le jugement est exécutoire à l'expiration de ce délai.
S'il ne résulte pas soit de l'avis constatant la remise de la lettre recommandée ou du récépissé prévus aux articles 557 et 558, soit d'un acte d'exécution quelconque ou de l'avis donné conformément à l'article 560, que le prévenu a eu connaissance de la signification, l'appel, tant en ce qui concerne les intérêts civils que la condamnation pénale, reste recevable jusqu'à l'expiration des délais de prescription de la peine, le délai d'appel courant à compter de la date à laquelle le prévenu a eu connaissance de la condamnation… »
La question du prévenu non touché par la citation, absent, non excusé et non représenté : jugement par défaut ou itératif défaut susceptible d’appel (parce que le prévenu s’est manifesté à un moment )
Si la citation n'a pas été délivrée à la personne du prévenu, et s'il n'est pas établi qu'il ait eu connaissance de la citation, la décision, au cas de non-comparution du prévenu, est rendue par défaut, sauf s'il est fait application des dispositions de l'article 411 du CPP lorsqu’en particulier le prévenu demande à être jugé en son absence et que le renvoi n’est pas ordonné.
Si le jugement est rendu par défaut ou par itératif défaut, le délai d'appel ne court qu'à compter de la signification du jugement, quel qu'en soit le mode. (article 499 du CPP).
Rappel : Lorsque le défendeur n'a pas comparu, qu'il n'a pas été assigné ou réassigné à personne, et lorsque l'affaire n'est pas susceptible d'appel, la seule voie ordinaire de recours possible contre ce type de jugement est l'opposition. Par cette voie de recours, la partie contre laquelle a été rendue une décision par défaut, peut ressaisir le Tribunal qui a déjà statué, en lui demandant à nouveau de juger l'affaire.
Prudence : En cas d'absence injustifiée, si la peine encourue est supérieure à deux ans, le tribunal peut renvoyer l'affaire à une date ultérieure,
Dans ce cas, il peut délivrer un mandat d'arrêt ou d'amener contre le prévenu pour permettre son jugement en personne.
Dans un prochain article j'analyserai l'effet suspensif et dévolotuf de l'appel correctionnel.
Je reste à votre disposition pour toutes précisions par la voie des consultations en ligne
Maître HADDAD Sabine