La qualification juridique de donation partage ne lie pas le juge,lequel peut requalifier le même acte en donation entre vifs.
Telle est la substance de l'arrêt rendu par la Première Chambre Civile de la Cour de Cassation le,20 novembre 2013,pourvoi N°12-25-681.
La donation partage suppose aussi un partage.
Si celui-ci n'a pas été opéré, alors elle n'existe pas.
I- Explications
En l’éspèce par acte du 5 février 1987 visant donation partage une mère,veuve. a procédé à une donation “à titre de partage anticipé” à ses trois enfants, qui l’ont acceptée, de tous ses droits dans les immeubles dépendant de la communauté ayant existé avec son mari, sous la condition que l’un de ses enfants consente la licitation de ses droits tant dans ces immeubles que dans ceux dépendant de la succession son père au profit de sa soeur et de son frère moyennant un prix déterminé dont les modalités de paiement étaient fixées ;
Par testament olographe postérieur, cette mère a consenti des legs à chacun de ses enfants.
L’un des fils non soumis à l’obligation de licitation décède, laissant une veuve et 4 enfants puis postérieurement la mère décède.
C’est dans ce contexte que le partage judiciaire est demandé suite à ces décès.
La question posée a été de savoir si la qualification donnée par les parties de donation partage est juste ou s’il ne s’agirait que d’une simple donation entre vifs.
De cette analyse dépendait en effet l’absence ou non de rapport des bies à la succession.
L’article 1075 du code civil ( dans sa rédaction antérieure) suppose que l’ascendant effectue une répartition matérielle des biens donnés entre ses descendants.
Pour la cour d’appel il y a donation partage cumulative non soumise à rapport et non rescindable pour lésion, elle déboute ll'un des fins de ses demandes de rapport, au motif que le partage intervenu, accepté par les trois enfants, obéit aux dispositions des articles 1075 et suivants du code civil, peu important que tous les biens donnés n’aient pas été partagés entre les trois héritiers et qu’aux termes du même acte, M. Thierry X... se soit engagé à liciter sa part à son frère et à sa soeur ;
Censure de la cour au motif que, quelle qu’en ait été la qualification donnée par les parties, l’acte litigieux, qui n’attribuait que des droits indivis à deux des trois gratifiés n’avait pu opérer un partage, de sorte que cet acte s’analysait en une donation entre vifs, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
Présentation de 1 ere Civ 20 novembre 2013 pourvoi N°12-25.681
Cassation partielle
Attendu, selon l’arrêt attaqué que, par acte du 5 février 1987 visant les articles 1075 et suivants du code civil, Magdeleine A..., veuve de Bernard X... a procédé à une donation “à titre de partage anticipé” à leurs trois enfants, Sabine, Pierre et Thierry, qui l’ont acceptée, de tous ses droits dans les immeubles dépendant de la communauté ayant existé avec son mari, sous la condition que M. Thierry X... consente la licitation de ses droits tant dans ces immeubles que dans ceux dépendant de la succession de Bernard X... au profit de sa soeur et de son frère moyennant un prix déterminé dont les modalités de paiement étaient fixées ; que, par testament olographe du 12 août 1999, Magdeleine A... a consenti des legs à chacun de ses enfants ; qu’elle est décédée le 22 août 2005, postérieurement à son fils, Pierre X..., décédé le 12 juin 2003, en laissant sa veuve, Mme Elvine Z... et leurs quatre enfants, MM. Antoine, Vincent, Jean Marie et Thibault X... ; que des difficultés étant nées pour la liquidation des successions de Bernard X... et de Magdeleine A..., le partage judiciaire a été demandé ;
Sur le premier moyen :
Vu l’article 1075 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 23 juin 2006 ;
Attendu qu’il n’y a de donation-partage que dans la mesure où l’ascendant effectue une répartition matérielle des biens donnés entre ses descendants ;
Attendu que, pour décider que l’acte du 5 février 1987 s’analyse en une donation partage cumulative non soumise à rapport et non rescindable pour lésion et débouter, en conséquence, M. Thierry X... de ses demandes de rapport, l’arrêt retient que le partage intervenu, accepté par les trois enfants, obéit aux dispositions des articles 1075 et suivants du code civil, peu important que tous les biens donnés n’aient pas été partagés entre les trois héritiers et qu’aux termes du même acte, M. Thierry X... se soit engagé à liciter sa part à son frère et à sa soeur ;
Qu’en statuant ainsi, alors que, quelle qu’en ait été la qualification donnée par les parties, l’acte litigieux, qui n’attribuait que des droits indivis à deux des trois gratifiés n’avait pu opérer un partage, de sorte que cet acte s’analysait en une donation entre vifs, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le second moyen, pris en sa première branche :
Vu les articles 561 et 566 du code de procédure civile ;
Attendu que, pour inviter les parties à saisir à nouveau le tribunal, à défaut d’accord entre elles, à la suite des opérations de partage confiées au notaire afin qu’il soit statué sur la qualification juridique de l’acte du 12 août 1999 et sur les conséquences du décès de Pierre X... sur le legs particulier qui lui avait été consenti par Magdeleine A..., l’arrêt retient que ces questions n’ont pas été soumises au tribunal et sont soulevées pour la première fois en cause d’appel ;
Qu’en statuant ainsi alors que saisie, par l’effet dévolutif de l’appel, de la demande de liquidation et partage de la succession de Magdeleine A..., l’ensemble des contestations élevées sur le mode d’y procéder pouvait lui être soumis, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a débouté M. Thierry X... de ses demandes de rapport et invité les parties, à saisir à nouveau le tribunal, à défaut d’accord entre elles, suite aux opérations de partage confiées au notaire, pour voir statuer sur la question de la nature de l’acte du 12 août 1999 et sur les conséquences du décès de Pierre X... sur le legs particulier qui lui a été consenti par Magdeleine A..., l’arrêt rendu le 13 décembre 2011, entre les parties, par la cour d’appel de Riom ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Lyon
Demeurant à votre disposition
Maître HADDAD Sabine