1 ere Civ, 28 mai 2014, pourvoi N° 13-15760 répond que ce procédé doit rester exceptionnel si bien que les juges du fonde devront vérifier s’il n’existe pas d’autres modalités de paiement suffisante pour garantir le règlement de ladite prestation.
I- Analyse de l’arrêt : 1 ere Civ, 28 mai 2014, pourvoi N° 13-15760
A) Les modalités légales de paiement de la prestation compensatoire
L’article 274 du code civil dispose
Le juge décide des modalités selon lesquelles s'exécutera la prestation compensatoire en capital parmi les formes suivantes :
1° Versement d'une somme d'argent, le prononcé du divorce pouvant être subordonné à la constitution des garanties prévues à l'article 277 ;
2° Attribution de biens en propriété ou d'un droit temporaire ou viager d'usage, d'habitation ou d'usufruit, le jugement opérant cession forcée en faveur du créancier. Toutefois, l'accord de l'époux débiteur est exigé pour l'attribution en propriété de biens qu'il a reçus par succession ou donation.
Pour rappel la rente est l’exception
L’article 276 du code civil dispose
A titre exceptionnel, le juge peut, par décision spécialement motivée, lorsque l'âge ou l'état de santé du créancier ne lui permet pas de subvenir à ses besoins, fixer la prestation compensatoire sous forme de rente viagère.
Il prend en considération les éléments d'appréciation prévus à l'article 271.
Le montant de la rente peut être minoré, lorsque les circonstances l'imposent, par l'attribution d'une fraction en capital parmi les formes prévues à l'article 274.
Cette prestation sous forme de rente à vie, suppose une décision motivée du Juge, lorsque la situation personnelle, l’âge ou l’état de santé du bénéficiaire ne lui permet pas de subvenir à ses besoins.
Dans certaines circonstances, une prestation compensatoire mixte peut être versée. Dans ce cas, une fraction est versée en capital et l’autre fraction est versée sous forme de rente. 1ere Civ, 23 juin 2010, pourvoi N° 09-13.872
En l’espèce : le principe de la prestation due par un époux était acquis, le quantum déterminé à 82.500 euros.
Quid de la modalité de paiement ?
La question posée aux juges a été de savoir si le 1°) Prime sur le 2°)
Pour la cour d’Appel de d’Aix en Provence cet époux condamné doit payer sa prestation compensatoire par abandon de droits de propriété sur la part de l’appartement commun, alors que cet époux souhaitait s’en départir par un paiement en numéraire ( argent)
B) Pour la cour de cassation
En conformité avec le conseil constitutionnel qui a considéré dans sa décision en réponse à une question prioritaire de constitutionnalité QPC N°2011-151 du 13 juillet 2011 que l’attribution forcée pour payer une prestation compensatoire est nécessairement subsidiaire , la cour de Cassation casse parce que la première solution posée par l’article 274 1°) est prioritaire.
La cour n’avait pas imposer un paiement par abandon de droit, mais devait rechercher au préalable si un autre moyen existait pour garantir ce paiement en argent ( gage, caution…)
II Présentation de 1 ere Civ,28 mai 2014 : pourvoi N°13-15.760
Cassation partielle
Attendu, selon l’arrêt attaqué, qu’un juge aux affaires familiales a prononcé le divorce des époux X.../Y... et ordonné la liquidation et le partage de leurs intérêts patrimoniaux ;
Sur le premier moyen :
Attendu que ce moyen n’est pas de nature à permettre l’admission du pourvoi ;
Mais sur le second moyen, pris en sa première branche :
Vu l’article 4 du code de procédure civile ;
Attendu que, pour condamner l’époux au paiement d’une prestation compensatoire d’un certain montant, l’arrêt retient que “M. X... ne fait état d’aucun problème de santé” ;
Qu’en statuant ainsi, alors que celui-ci faisait valoir, dans ses conclusions d’appel, qu’il était en train de perdre la vue de l’oeil gauche et qu’à la suite de ces ennuis, il avait dû suivre une psychothérapie hebdomadaire assortie d’un traitement médicamenteux, afin de remédier à divers troubles, notamment de la mémoire, de l’attention et de la concentration, dont certains étaient dramatiques pour un entrepreneur, la cour d’appel a, en dénaturant les termes clairs et précis de ces conclusions, violé le textes susvisé ;
Et sur le même moyen, pris en sa quatrième branche :
Vu l’article 274 du code civil ;
Vu la réserve d’interprétation émise par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2011 151 QPC du 13 juillet 2011, aux termes de laquelle l’atteinte au droit de propriété qui résulte de l’attribution forcée prévue par le 2° de l’article 274 du code civil ne peut être regardée comme une mesure proportionnée au but d’intérêt général poursuivi que si elle constitue une modalité subsidiaire d’exécution de la prestation compensatoire en capital de sorte qu’elle ne saurait être ordonnée par le juge que dans le cas où, au regard des circonstances de l’espèce, les modalités prévues au 1° n’apparaissent pas suffisantes pour garantir le versement de cette prestation ;
Attendu que, pour imposer à M. X... le règlement de la prestation compensatoire par l’abandon de la part dont il était titulaire dans l’appartement commun, l’arrêt énonce que la disparité constatée dans les conditions de vie des époux au détriment de l’épouse sera compensée par l’octroi d’une prestation compensatoire évaluée à la somme de 82 500 euros sous la forme de l’attribution en pleine propriété de l’immeuble commun ;
Qu’en statuant ainsi, sans constater que les modalités prévues au 1° de l’article 274 du code civil n’étaient pas suffisantes pour garantir le versement de cette prestation, la cour d’appel a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a condamné M. X... à verser à Mme Y... une prestation compensatoire de 82 500 euros sous la forme de l’attribution à l’épouse en pleine propriété par abandon de la part de M. X... de l’appartement commun des époux sis [...] à Marseille, l’arrêt rendu le 5 février 2013, entre les parties, par la cour d’appel d’Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Montpellier
Demeurant à votre disposition
Maître HADDAD Sabine
Avocat à la Cour